"Peut-être que la banlieue n’a pas sa place ici", Sefyu et le FC 93 Bobigny poussent pour intégrer le National

L’AC Ajaccio vient d’être exclu des championnats nationaux par la DNCG, mais pour le moment le FC 93 Bobigny n’est pas intégré au National: comment prenez-vous cette décision?
Je pense qu’avec ce cas de figure, on risque d’avoir une justice à deux vitesses. Un traitement de faveur de certains clubs face à d’autres. Boulogne a été intégré à la Ligue 2 en plein milieu de la reprise du championnat tout en sachant que le délais des accessions fixé par la FFF était au 17 juillet. Boulogne a obtenu sa montée le 7 août. Lorsqu’on s’adresse à la FFF sur ce point-là, la Fédération nous ramène à cette fameuse limitation du 17 juillet. Donc c’est un jugement à deux vitesses. C’est un traitement de faveur qui est accordé à des clubs qui ont peut-être d’autres relations avec certains membres de la FFF ou autre. Quand c’est un club amateur, qui travaille sur un ancrage territorial, puissant et fort, avec un intérêt important d’apporter un cadre social pour des jeunes de banlieue, là encore les instances nous mettent un plafond de verre au moment de prouver que l’on est capable de passer d’un club amateur à un club semi-professionnel. Nous sommes donc condamnés à rester sur cet échelon.
Vous dites-vous que vous n’avez pas assez de poids dans les instances ?
Oui, c’est comme ça que j’interprète la position de la FFF. Je pense que c’est perçu de cette manière par tous les gens autour du club aujourd’hui qui vont analyser cette situation. Il y aura un avant et un après. Il faut vraiment qu’ils se rendent compte que ça va décrédibiliser tous les autres clubs qui se retrouveront dans des situations similaires devant la DNCG. Ils verront clairement qu’il y a deux poids, deux mesures et qu’il y a un double traitement qui est effectué en fonction des différents clubs.
On se rend aussi compte que les délais de la DNCG sont difficiles à tenir…
La DNCG s’est laissée portée par la dynamique d’Ajaccio. Et je ne veux vraiment pas pointer du doigt Ajaccio, ça peut arriver à de nombreux clubs cette situation. Dans ce cas de figure, la meilleure solution était d’anticiper une possible montée avec une validation du dossier du FC 93 lors d’un passage devant la DNCG. Cela pouvait permettre de nous qualifier pour le National dès ce matin. Dans tous les cas, nous essayons de suivre les règles de la FFF. On a toujours fonctionné comme ça mais on nous met des bâtons dans les roues. Pour éviter toutes formes de contestation à l’avenir, la FFF devrait simplement respecter les règlements qu’elle met en place.
Quelle est la suite pour le FC 93?
On peut agir sur le plan juridique. Dès que la décision définitive de la DNCG concernant l’AC Ajaccio a été prise, hier soir, nous avons agi. Ce matin, nous avons constitué les éléments de manière à déposer un recours en référé devant le tribunal administratif. C’est ce qui sera mis en place si la FFF ne réagit pas. Et nous sommes en cours de demande pour un report de la première journée de N2.
Vous êtes donc prêts pour le National?
Nous sommes prêts. Nous sommes prêts pour le National.
Une accession en National, ça change quoi pour votre club?
Ça serait de faire passer le message que la banlieue peut s’organiser, peut se structurer, peut exister dans le monde professionnel français. Lorsqu’on parle des joueurs qui viennent de la région parisienne, et qui aujourd’hui constituent le cœur de l’équipe de France, on les cite comme étant des joueurs issus de la région parisienne. Aujourd’hui, on a la chance de pouvoir avoir l’incarnation de cette région parisienne au plus haut niveau avec une représentation solide. Nous sommes la banlieue par excellence. C’est comme cela que l’on tente d’expliquer notre projet. De montrer que l’on peut partir d’un bassin de territoire aussi précaire et faire preuve d’une organisation, d’une discipline et d’une assiduité dans notre travail pour réussir. On veut montrer que l’on n’est pas obligé de délocaliser pour pouvoir faire du haut niveau.
Comment les joueurs prennent-ils cette décision?
C’est une injustice pour les joueurs. Cette décision, si elle n’est pas modifiée par la FFF, risque de limiter les chances pour nos jeunes issus des banlieues. Il y a un plafond de verre qui est mis au-dessus de la tête de nos jeunes. C’est pour le moment un message fort qui est envoyé par la fédération aux clubs de banlieue. Peut-être que la banlieue n’a pas sa place ici, c’est peut-être ça, je ne sais pas. Si c’est le cas, il faudrait nous le dire directement. Mais je suis optimiste, quand je vois des clubs comme Montpellier créé au sein même de la Paillade et voir ce qu’ils sont devenus, je garde espoir de nous voir en National cette saison. On peut encore exister.