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Thuram : « Je n’ai pas perdu la tête »

Lilian Thuram

Lilian Thuram - -

L’ancien défenseur de l’équipe de France, dont il est recordman des sélections, a été choqué par la révélation de propos discriminatoires au sein de la FFF. Après s’être expliqué avec Laurent Blanc, qui a participé à de cette discussion, il ne veut pas envenimer les relations entre les champions du monde 1998.

Lilian Thuram, êtes-vous consterné par les propos discriminatoires qui ont été tenus au sein d’une réunion de la DTN, le 8 novembre dernier ?

Oui, je suis consterné. Je crois que le football peut faire passer des messages énormément plus forts que la politique ne peut le faire. Je trouve que penser à discriminer des enfants de 12 ans est un acte très violent. C’est normal que je sois déstabilisé. On ne peut pas l’accepter.

Avez-vous appelé Laurent Blanc ?

On a discuté de la situation. Il se trouve dans un tourbillon et il me l’a dit. Je peux le comprendre. Je lui ai dit que les gens, et moi le premier, ne pensent pas qu’il est raciste. Ça ne m’a jamais traversé l’esprit. Mais il faut comprendre aussi que le fait d’entendre parler de quotas, ça déstabilise. Il a été emmené sur un mauvais chemin. Je le pense sincèrement. On ne relève pas assez souvent qu’à un moment donné, dans la discussion, Laurent Blanc dit : « S’il y a onze Blacks, il n’y aucun problème pour moi. » Il ne fait pas acte de racisme. Il faut qu’il puisse s’exprimer. Mais il y a certaines personnes qui savaient exactement ce qu’elles voulaient faire. En tout cas, il est très mal.

Doit-il quitter son poste de sélectionneur ?

Je dois avouer que je n’en ai aucune idée. Ce qui est intéressant, c’est qu’il y a une enquête. Il faut attendre de savoir ce qui s’est vraiment passé et de voir les choses qui vont ressortir de cette affaire.

Christophe Dugarry vous a comparé à « un juge de la Cour suprême ». Comment réagissez-vous à cette attaque ?

Je ne prends pas ça comme de l’agressivité. Christophe donne son avis. Simplement, j’aimerais lui poser une question. Est-il d’accord pour qu’on discrimine des enfants de 12 ans ? Le débat est celui-là. Pouvons-nous accepter des discriminations envers des enfants de 12 ans ? Il répondra. J’espère de tout cœur qu’il n’est pas d’accord.

Cet échange démontre-t-il qu’il y a des tensions au sein de France 98 ?

Il n’y a pas de tensions. Il y a simplement des façons différentes de voir les choses. Chacun de nous, nous sommes libres de porter un jugement. A aucun moment, je n’agresse Laurent Blanc. Je n’oublie pas que c’est grâce à lui que j’ai réalisé ce rêve d’enfant de gagner la Coupe du monde. Je n’ai pas perdu la tête.

Le titre de l'encadré ici

Dugarry charge Thuram|||

Champion du monde en 1998 aux côtés de Laurent Blanc, dont il est resté proche, Christophe Dugarry a pris la défense mercredi du sélectionneur national. L’ancien joueur bordelais a également fustigé le comportement de Lilian Thuram, qui a beaucoup critiqué le patron des Bleus et l’encadrement de la FFF depuis les révélations de Mediapart. Pour imager ses dires, le champion du monde a livré un souvenir : « Le soir du 12 juillet 1998, dans les vestiaires, j’entends Lilian Thuram dire : ''Allez les Blacks, on fait une photo tous ensemble''. Sur le coup, ça ne me heurte absolument pas parce que je n’ai pas l’esprit mal placé et que je sais que Lilian n’est ni un facho, ni un raciste. Franck Leboeuf le relève et lui dit : ''Comment tu aurais réagi si on avait voulu faire une photo entre Blancs ?''. Ça, pour moi, ce sont des propos discriminatoires. A aucun moment, on ne les a interprétés en tant que tels. Là, il a laissé sous-entendre le contraire avec ceux de Laurent Blanc », a ainsi raconté Dugarry sur Infosport.

Propos recueillis par Jérôme Sillon