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Canayer : « Les cicatrices sont tellement profondes… »

Nikola Karabatic et Patrice Canayer

Nikola Karabatic et Patrice Canayer - -

Le manager de Montpellier s’est exprimé sur le retour de Nikola Karabatic dans son effectif, à l’occasion du match nul face à Sélestat (30-30). Satisfait sur le plan sportif, Patrice Canayer estime en revanche qu’il subsiste encore « beaucoup de non-dits et de choses cachées ».

Patrice, êtes-vous satisfait du retour de vos joueurs ?

Sportivement, c’était important, mais ce n’est pas parce que les gens sont là physiquement que le groupe s’est reconstitué. Mentalement, on est loin du compte. Il y a beaucoup de non-dits, de choses cachées, qui sont des freins à l’unité et à la dynamique de l’équipe. Il faut essayer de faire fi de tout ça, et d’aller à l’essentiel, qui est, actuellement, d’aller chercher des performances sportives (le MAHB est 5e avec 4 victoires, 2 nuls et 2 défaites, à 6 points du leader le PSG, ndlr).

Faut-il aller plus loin et crever l’abcès ?

Vous pouvez forcer jusqu’à une certaine limite, mais aujourd’hui il y a des intérêts individuels, des stratégies adoptées. Peut-être qu’il serait bon de faire marche arrière, mais je suis trop expérimenté pour savoir qu’on ne fait pas machine arrière. La situation est d’autant plus compliquée qu’elle n’est pas définitive. On prend des décisions au jour le jour en fonction d’éléments qui nous arrivent progressivement.

L’équipe peut-elle retrouver sa cohésion d’avant le 30 septembre ?

Il faudrait pour ça avoir un rendement maximal mais aujourd’hui, je ne vois pas comment on peut l’obtenir. Il y a des gens qui ont choisi dans cette affaire de ne pas parler depuis le début que ce soit à la police, à la justice, et ils ont le droit de réintégrer l’équipe en ne disant rien… Mickaël a essayé (à Strasbourg dimanche contre Sélestat 30-30, ndlr), et il a tenu à merveille son rôle de capitaine en essayant un petit peu de crever cet abcès. On n’a pas tous envie de se sauter dans les bras et de s’embrasser. On a besoin d’apprendre à retravailler ensemble. Les cicatrices sont tellement profondes, et les intérêts sont tellement divergents.

Souhaiteriez-vous que tous les joueurs fassent comme Primoz Prost ?

Il s’est excusé avec une profondeur qui m’a touchée, il a fait de même avec les salariés, avec les dirigeants, avec des éléments de l’équipe, des supporteurs. Il a eu l’attitude d’un grand bonhomme. La faute doit être sanctionnée parce que les clubs doivent mettre des limites, c’est notre responsabilité d’éducateurs. Mais j’ai dit à Primoz qu’il pouvait grandir dans ses fautes. Depuis le début j’aurais aimé qu’on soit dans la clarté, l’honnêteté et le respect. L’éthique, c’est de dire j’ai fait une faute, je m’excuse, je la paie, et on avance. Mais si les gens n’ont rien fait… On ne sait pas, c’est ce qui rend la situation compliquée. On ne peut cicatriser que quand la source du mal est identifiée.

Sur les réseaux sociaux, beaucoup de gens affirment que vous, le club, parlez beaucoup. Comprenez-vous cette réaction ?

J’ai beaucoup d’empathie pour le grand public, il y avait 5500 à Strasbourg, 700 personnes nous attendaient pour nous soutenir. Le problème, c’est que j’ai du mal à comprendre ce que veulent les gens. Je crois qu’ils voudraient que ça n’ait jamais eu lieu. Mais en situation de responsabilité, il faut prendre des décisions. Sont-elles les bonnes ? On décide en fonction d’éléments que l’on dispose et que l’on ne peut pas forcément transmettre.

Personnellement, où en êtes-vous, quel est votre état d’esprit ?

(Long silence) Comment dire… Je suis déçu par les comportements humains. Étais-je dans une forme d’utopie ? Dès que je suis dans l’inaction, je me pose beaucoup de questions sur les hommes. C’est pour ça que je me trouve le moins possible dans cette situation. Avec plus de temps, on a aura l’occasion d’en reparler.

Sportivement, le match contre Aix est important pour tenter de recoller aux leaders…

Il faut gagner demain (mercredi), il faut retrouver petit à petit un niveau compatible avec ce qu’est Montpellier. Tous les matches sont importants, comme dimanche en Ligue des champions. Il faut essayer de relativiser. Depuis un mois, on est dans notre truc. Il faut se dire qu’on n’est « que » dans une grosse péripétie. Le monde ne dépend pas de nous.

Propos recueillis par Julien Landry à Montpellier