Mondial de handball: comment les Bleus se préparent à affronter des ambiances hostiles

Le thermomètre peine à dépasser les 0°C à Varaždin mais dans son Arena, en bord de Drave, affluent du Danube, l'atmosphère peut rapidement devenir étouffante. Dimanche soir, ils étaient presque 2000 Hongrois à siffler, hurler, chanter au soutien de leur sélection face aux Pays-Bas dans un match décisif pour la première place du groupe D du Mondial de handball. Une victoire 36-32 célébrée, traditionnellement, par un hymne national entonné à l'unisson entre joueurs et supporteurs.
"C'est notre maison ici", lance un fan hongrois
Ce mardi soir (21h), c'est face à ce mur de fans, particulièrement actifs au sein de la tribune derrière un des buts, que les Bleus vont tenter d'idéalement lancer leur tour principal. Ils se sont déjà bien chauffé la voix mais les fans hongrois ont de la ressource. "On a fait le déplacement pour pousser notre équipe afin qu'elle atteigne au moins les quarts de finale", affirme Benter, venu de Budapest. Cristian arrive lui de Szeged, il a roulé quatre heures pour rejoindre Varaždin. "C'est notre maison ici, on est des milliers depuis le début de la semaine", témoigne-t-il fièrement. "On a eu un premier tour compliqué mais on est confiant pour la suite. J'aimerais que notre soutien nous permette de battre la France, même si ça me semble difficilement réalisable."
Maté Lekai, lui, semble moins pessimiste. "La France, à tous les postes, ont des joueurs qui font partie des meilleurs du monde", souffle le demi-centre de la sélection hongroise, triple finaliste de la Ligue des champions. "Mais parfois on peut être dans un bon jour, on ne sait jamais ce qu'il peut se passer. Je ne sais pas combien de Français feront le déplacement, mais je suis certain qu'on n'entendra que les fans hongrois (rires). Depuis le début de la semaine, on a vraiment l'impression d'être huit sur le terrain, c'est comme être chez nous."
Jouer face aux sifflets, les Bleus aiment ça
Capitaine des Pays-Bas, Luc Steins a essuyé de nombreux sifflets dimanche soir. "Il y a trois ans, on les a battus en match d'ouverture chez eux en Hongrie", raconte le joueur du Paris Saint-Germain. "C'est plutôt cool de jouer dans une telle ambiance, il y a une grosse atmosphère qui n'est pas toujours en notre faveur mais il y a aussi beaucoup de Néerlandais qui nous supportent. Je suis fier d'eux et content de les voir ici." Certains joueurs français, ce mardi, seront heureux d'apercevoir dans les travées quelques membres de leur famille. C'est le cas notamment de Nedim Remili et Ludovic Fabregas, joueurs de Veszprém, en Hongrie, qui connaissent le tempérament des fans du pays.
"C'est à côté donc on pourrait presque dire que c'est une nation hôte", souligne Remili, qui retrouvera son actuel coéquipier en club Patrik Ligetvari "un bon vivant très dur qui oublie qu'il fait 110 kilos de muscle", ainsi que ses ex-partenaires Adrian Sipos - "une super personne mais je le déteste sur un terrain" - et Zoran Ilic. L'environnement qui attend les Bleus, le demi-centre tricolore compte bien s'en servir. "C'est quelque chose qui m'excite beaucoup. Je suis souvent meilleur quand c'est contre nous que pour nous", se marre "Ned". "En termes d'ambiance, on rentre dans ce qui se fait de mieux dans un Mondial, ça me galvanise."
Même motivation pour le capitaine. "Le plus important, c'est de savoir ce qui nous attend. Les atmosphères chaudes, ça nous anime", affirme Ludovic Fabregas. "C'est pour ces moments qu'on joue au handball. On est prêt à relever le défi magyar dans une ambiance survoltée. Les Hongrois vont tout faire pour nous faire déjouer et dans ce genre de match, il y a cet esprit de calmer les ardeurs en notre défaveur." En tant que joueur, l'actuel sélectionneur des Bleus Guillaume Gille (308 sélections) a joué un paquet de matchs sous la pression d'un public adverse, à l'image d'une finale de championnat du monde à Zagreb face à la Croatie en 2009 (24-19). "Quand tu sais que tu joues contre une nation, un peuple, une salle, c'est un contexte particulier dans notre sport. Le décorum sera présent, il y aura certainement aussi une influence sur le corps arbitral. Ce n'est pas simple non plus pour l'équipe qui 'reçoit' car il faut être à la hauteur de la démesure du soutien populaire dont ils bénéficient. Dans ces ambiances, il y a l'idée d'éteindre l'équipe en face et ramener à la raison l'ensemble d'une salle."
Des jets de projectiles face aux Pays-Bas
Et si les Bleus y parviennent en plus de remporter le rude combat physique qui les attend, il faudra recommencer, face à la Macédoine du Nord, samedi, alors qu'ils pourraient être déjà assurés d'être qualifiés en quarts de finale. Car les supporteurs macédoniens, eux aussi très nombreux, ne sont pas en reste quand il s'agit d'élever la voix. D'autant plus qu'ils se sentent lésés depuis quelques jours, par certaines décisions arbitrales en leur défaveur, notamment face aux Pays-Bas vendredi dernier (défaite 37-32). "On prend trois cartons rouges, au moins douze penalties", fulmine Darko, venu de Skopje. "Je vous laisse calculer le temps de jeu en infériorité. Ces arbitres ont été horribles." Hors d'eux, certains supporteurs ont d'abord entonné des chants contre la Fédération internationale de handball ("IHF Mafia"), avant d'être plus véhéments en lançant des projectiles sur le terrain.
"C'était chaud", se remémore Luc Steins. "Ils étaient nombreux en tribunes et très agressifs. Le match a été arrêté entre cinq et dix fois, c'était un match de deux heures, ce n'est pas possible... à la fin ils ont continué à jeter des trucs sur le terrain qui ont touché certains de nos joueurs. On est rentré au vestiaire avant la fin de la cérémonie (pour désigner le MVP)." Rancuniers, les fans macédoniens ont copieusement sifflé le message de fair-play du capitaine néerlandais diffusé sur les écrans en avant-match, puis l'hymne des Pays-Bas dimanche soir. "On donnera encore de la voix samedi", assure Darko. "Ça risque d'être dur car la France est favorite pour aller en finale, leurs joueurs sont excellents. Mais on sera là." Les Bleus sont prévenus, il ne gèle pas partout à Varaždin.