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EXCLU RMC SPORT - Inquiétudes au sein des forces de l'ordre pour la sécurité de la cérémonie d’ouverture des JO 2024

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Depuis les incidents au Stade de France, le 28 mai dernier lors de la finale de la Ligue des champions, l’ensemble des policiers interrogés par RMC Sport s’inquiètent de l’organisation de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024. Plus de 600.000 spectateurs sont attendus sur les bords de seine le 26 juillet 2024. Vigilance maximale et préparation forcément sous surveillance pour les forces de l’ordre. Explications.

"Au moins 600.000 spectateurs sont conviés à la fête sur les quais et ponts de Paris, soit dix fois plus que dans un stade en configuration olympique. 80 écrans géants et une sonorisation permettront à tous de profiter de l’ambiance magique que ce spectacle hors-norme diffusera dans toute la capitale", promet l’organisation de Paris 2024 sur son site internet. Sauf que, depuis les événements du stade de France lors de la finale de la Ligue des champions, cette phrase prend un tout autre sens. "C’était déjà un sujet important, ça devient un sujet capital peut être même prioritaire et il ne faudra pas se louper", avoue un membre du ministère de l’Intérieur au sujet de cet événement considéré comme la plus grande manifestation au monde et la plus importante jamais organisée en France.

Il faut remonter au 13 décembre dernier, lorsque le conseil d'administration du Comité d'organisation des Jeux olympiques (COJO) de Paris 2024 avait validé l’organisation de la cérémonie d'ouverture sur la Seine, une première hors d'un stade pour des Jeux olympiques d’été. Selon nos informations, les forces de l’ordre voulaient, lors des réunions préparatoires, une jauge limitée à 250.000 personnes sur les bords de Seine.

Finalement, 600.000 personnes seront présentes lors de cette cérémonie avec un défilé de plus de 10.500 athlètes, sur 160 bateaux en plein cœur de Paris et surtout 120 chefs d'Etat et de gouvernement assisteront à ce moment. Du côté de la police, on se dit que maximum "400 à 450.000 personnes pourront assister" sur les bords de Seine à cette première fête autour des Jeux. "On ne va pas compresser les gens et la gestion des flux après les incidents du stade de France va devenir un élément capital", confie une source policière.

Entre 90 et 100 UFM mobilisées

Dès l’annonce, les forces de l’ordre, via leurs syndicats, ont partagé des craintes sur la sécurisation de l’événement. Cette crainte est, d’après nos informations, aussi partagée dans les bureaux de la Préfecture de Police de Paris. "On parle aujourd’hui du fait qu’il faudra lors de cette cérémonie d’ouverture entre 90 et 100 UFM (Unité de forces mobiles, ndlr) mobilisées, au minimum 10.000 policiers/gendarmes, c’est considérable, confie un commissaire de Police à RMC Sport. Et encore, c’était un plan avant les événements du stade de France, sans compter la protection des personnalités, les politiques vont maintenant s’en mêler. Jamais ils ne voudront revenir sur leur décision de ne pas faire la cérémonie dans un stade. Il faudrait même plus d’UFM pour sécuriser cette cérémonie mais on ne va pas appeler la totalité des forces présentes sur le territoire français. C’est donc aux forces de l’ordre de s’adapter en deux ans."  

Pendant cet événement, Paris ne sera pas la seule ville utilisée. "Il faudra sécuriser les stades de football partout sur le territoire ainsi que le site à Marseille pour les épreuves de voile… N’oublions pas le parcours de la flamme, insiste ce commissaire. On va devoir présenter des forces de l’ordre sur l’ensemble du pays. Vous ne pensez pas qu’une cérémonie dans un stade serait plus raisonnable pour tous afin de soulager les forces de sécurité ?"

"Il faut peut-être y renoncer"

Un avis qui commence à être partagé par certains représentants politique en Ile-de-France. "La cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques à ciel ouvert sur la Seine, c’est un cauchemar pour tous les services de sécurité, avait confié Patrick Karam, vice-président de la région Ile-de-France en charge des Sports, sur RMC/BFMTV le 30 mai dernier. Un sujet sécuritaire qui n’est pas encore totalement verrouillé, il faut peut-être y renoncer. On ne pourra pas garantir sur l’ensemble du parcours la sécurité de nos compatriotes. Et surtout les coûts vont flamber." Les policiers et gendarmes s’attendent déjà à avoir peu de vacances dans cette année 2024.  

"Évidemment ce qu’il s’est passé au Stade de France a posé des questions, explique Pierre Rabadan, adjoint aux Sports à la mairie de Paris pour RMC Sport. Le fait de sortir la cérémonie des stades et d’aller dans l’écrin que l’on a choisi autour de la Seine est un défi organisationnel et sécuritaire. Il n’a pas changé après ce qu’il s’est passé au Stade de France. Il y a aujourd’hui des groupes de travail qui coordonnent et qui inspectent ce qui peut être fait sur l’aspect sécurité de la cérémonie d’ouverture. On va attendre le retour de ces groupes, voir la réalité de ce qui peut être fait. Nous on veut une cérémonie ouverte qui va réunir le plus de monde possible dans des conditions de sécurité optimales."

Comment sécuriser l’événement en bord de Seine ?

Autre problème soulevé par un responsable de la police parisienne contacté par RMC Sport, la sécurisation de l’événement dans un environnement aquatique. Qui dit cérémonie sur l’eau, dit brigade fluviale. D’après nos informations et les remontées de terrain côté police, deux ans avant la cérémonie, il n’y a pas assez de bateaux pour permettre une sécurité optimale le jour de l’événement. Les effectifs sont encore insuffisants.

"C’est tout bête, mais vous pensez qu’on va sécuriser une cérémonie mondiale où il y aura 600.000 personnes avec notre dizaine d’embarcations ?, se questionne ce responsable policier. On aura deux fois six kilomètres de berges à couvrir, donc 12 kilomètres à sécuriser au bord de l’eau. C’est sûrement le plus gros risque." En plus des policiers, policiers municipaux, gendarmes et des militaires, l’organisation comptera surtout sur la sécurité privée. Sauf qu’aujourd’hui, les entreprises font face à de gros problèmes de recrutement.  

"On est dans une démonstration"

En octobre dernier, en marge du Milipol à Paris, un événement mondial de la sécurité intérieure des États, le Préfet, Ziad Khoury, directeur de la Coordination Nationale pour la Sécurité des Jeux olympiques 2024 (CNSJ), avait pris la parole pour expliquer les enjeux de ces JO sur le plan sécuritaire. Un homme de l’ombre et très discret depuis l’attribution des Jeux mais qui devient aujourd’hui central dans la préparation de l’événement.  

"On va être sous le regard du monde avec 25.000 journalistes accrédités, des milliards d’échanges sur les réseaux sociaux, avoue le Préfet. On est dans une démonstration. On a l’expérience des grands événements, sportifs ou non, qu’on a réussi à organiser. Il faut continuer sur cette lancée. Tout en étant capable de s’adapter aux éléments qui nous attendent. C’est une vitrine qui nous impose une obligation de réussir. On est en train de travailler sur une seule option qui est de réussir les Jeux et c’est collectif." Une déclaration bien avant les événements du 28 mai au stade de France.

La Coupe du Monde de Rugby 2023 en grande répétition

La Coupe du Monde de Rugby 2023 va servir de grande répétition pour l’ensemble des services d’ordres mobilisés lors des JO 2024. "On va affiner le dispositif à ce moment-là", explique-t-on au ministère de l’Intérieur. Une grande répétition surtout pour les risques de cybercriminalité. Avec ses milliers de spectateurs attendus sur le territoire français, neuf mois avant les Jeux, les services pourront tester la gestion des flux (ce qui a posé problème sur la finale de la Ligue des champions) sur cette compétition. Comme pour les grands événements organisés en France, les forces de l’ordre s’appuieront sur le Centre de Renseignement Olympique pour tout ce qui concerne la remontée d’informations en amont et pendant l’événement avec un maître mot : l’anticipation des risques.  

Le COJO avait déjà revu à la hausse la partie budgétaire liée à la sécurité qui est passée à 295 millions d'euros. Ce montant pourrait encore grossir. La sécurité de l’événement sera sûrement un sujet évoqué le 23 juin, lors du bureau exécutif du COJO, et le 12 juillet, lors du conseil d’administration de Paris 2024.

Nicolas Pelletier