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Le Qatar candidat à l'organisation des JO 2036, bonne ou mauvaise idée?

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Ce mardi 22 juillet, le Qatar a confirmé se lancer dans la course à l'organisation des Jeux olympiques en 2036, trois ans après avoir accueilli le Mondial de foot en 2022. Bonne ou mauvaise idée? Jean-Baptiste Guegan et Virgile Caillet, experts en géopolitique et marketing du sport, donnent leur avis.

C'était dans l'air depuis plusieurs mois. Ce mardi 22 juillet, le Qatar a confirmé sa candidature pour organiser les Jeux olympiques d'été en 2036. Trois ans après avoir accueilli la Coupe du monde de football, en 2022, le riche émirat souhaite "devenir le premier pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord à accueillir les Jeux olympiques", comme l'a déclaré le Premier ministre qatari, cheikh Mohammed ben Abdulrahmane Al-Thani. Alors, bonne ou mauvaise idée? Jean-Baptiste Guegan et Virgile Caillet, experts en géopolitique et marketing du sport donnent leur avis.

Une liste de candidats bien fournie

Candidate malheureuse pour les JO de 2016, 2020 et 2032, Doha ne perd pas espoir et compte capitaliser sur son expérience du Mondial de foot en 2022. Elle fait face à une liste très fournie de concurrents : l'Inde, le Chili, la Turquie, la Corée du Sud, la Pologne, ou l'Allemagne, à titre d'exemple, ont déjà déposé leur candidature ou ont exprimé leur intérêt d'organiser les Jeux. Pour Virgile Caillet, cette candidature est tout sauf une surprise. "Je ne dis pas que c'est une bonne chose, mais cette candidature est une suite logique. Depuis une quinzaine d'années, le Qatar a choisi le sport comme outil diplomatique". De nombreux événements sportifs majeurs ont eu lieu sur le sol qatari.

En 2015, le Qatar a accueilli les championnats du monde de hand masculin. En 2019, les championnats du monde d'athlétisme se sont tenus à Doha, trois ans avant le Mondial de foot. Puis, en 2027, la Coupe du monde de basket se déroulera au Qatar du 27 août au 12 septembre. Tant d'événements qui semblent légitimer sa candidature. "Le Qatar se sert du sport pour exister, par sa capacité d'organisation et de financement", rétorque Jean-Baptiste Guegan, spécialiste en géopolitique du sport.

Après des éditions 2024 en Europe, 2028 en Amérique du Nord et 2032 en Océanie, l'édition suivante à de bonnes chances de revenir à l'Asie, à moins qu'elle soit l'occasion des premiers JO africains de l'histoire. Deux mois après l'élection de Kirsty Coventry à la tête du CIO en tant que première femme et première Africaine, le timing choisi par le Qatar pour cette annonce n'a rien d'anodin selon Jean-Baptiste Guegan : "Le Qatar est assez habile en impliquant dans sa candidature les pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord. Il n'a pas le choix pour rivaliser face à ses voisins".

"Organiser les JO sous 44 degrés, c'est impossible !"

Sites sportifs, transports, aspect financier, l'émirat sait faire. Si le Qatar avance que 95% des infrastructures sportives nécessaires sont déjà opérationnelles, organiser les Jeux implique aussi de s'exposer à de nombreuses critiques. Lors de la Coupe du monde 2022, de nombreuses polémiques avaient éclaté, notamment d'un point de vue environnemental, politique ainsi que sur le respect des droits de l'Homme. Les méthodes utilisées auprès des 1,7 millions d’ouvriers immigrés étaient au coeur de la controverse. Là encore, "le Qatar devra prouver qu'il a passé un cap sur cet aspect pour être crédible", souligne Virgile Caillet, expert en marketing du sport.

L'un des gros points faibles dans cette candidature concerne les conditions climatiques. Organiser les Jeux en été au Qatar revient à s'exposer à des températures à plus de 40 degrés. Impensable pour Roger Rua, médecin du sport: "C'est dangereux, voire criminel, de demander à des athlètes de réaliser des performances de haut niveau dans ces conditions climatiques".

Plus que des exploits sportifs se pose la question de la santé des athlètes. La Coupe du monde des clubs aux Etats-Unis en est un exemple récent. Jean-Baptiste Guegan est très inquiet sur la question. "Organiser les JO sous 44 degrés, c'est impossible ! Ce pays ne peut pas accueillir les JO l'été et mettre en danger les athlètes. En 2019, lors des championnats du monde d'athlétisme, ça a été une catastrophe". De son côté, Virgile Caillet se montre moins catégorique, mais tout aussi prudent. "C'est bien d'ouvrir le nombre de continents qui peuvent accueillir les Jeux, mais il faut un cadre strict. Le Qatar va devoir beaucoup travailler sur l'aspect climat pour proposer des JO acceptables". Organiser les JO d'été, oui, mais à quelle période de l'année? Le projet qatari est encore loin d'être gagné...

Léa Quinio