Décosse parachève son œuvre

Lucie Décosse - -
Elle est tombée en larmes. A levé le pouce vers le public. Puis s’est relevée, avant de resserrer son kimono et saluer sa victime du jour, l’Allemande Kerstin Thiele. Le protocole, d’abord. Ce n’est qu’ensuite qu’elle a laissé place à l’explosion de joie, aux sauts et à une nouvelle communion avec le public massé dans les tribunes de l’Excel Center de Londres. Avant de tomber dans les bras de son entraîneur, Larbi Benboudaoud. Lucie Décosse est au 7e ciel. Normal, la Française a enfin atteint son but.
La triple championne du monde (2005 en -63kg ; 2010 et 2011 en -70 kg) et quadruple championne d’Europe (2002, 2007 et 2008 en -63kg ; 2009 en -70kg) est allée chercher le seul titre qui lui manquait, celui qui s’était refusé à elle il y a quatre ans à Pékin. Le Graal olympique en 70 kg. Et la consécration, enfin. « Elle a chassé les démons, lâche Céline Géraud, consultante judo pour RMC Sport. Elle les a renvoyées aux vestiaires. » L’ippon terrible d’Ayumi Tanimoto en finale en 2008 ? Oublié. Cette fois, pas de fausses notes au concerto livré ce mercredi par Lucie Décosse. « Cela faisait longtemps qu’on l’attendait et elle le mérite bien, lâche émue au micro de RMC, l’ancienne triple champion du monde, Deydier. Elle a dominé ce championnat de la tête et des épaules. Il n’y a pas de contestation possible, pas l’ombre d’un doute. »
Pourtant, Lucie s’est peur jeudi. Après un ippon en entrée face à la Canadienne Kelita Zupancic et un premier plat de résistance rapidement envoyé (9 secondes !) aux dépens de la Colombienne Yuri Alvear, la sociétaire du Lagardère Paris Racing écartait la Sud-Coréenne Ye-Sul Hwang par yuko (pénalité) au terme du golden score. Avant de craquer en coulisses. « Elle a eu un moment d‘émotion incroyable, raconte son mentor Thierry Rey, ancien champion olympique (1980) et à l’origine de sa venue au sein du team Lagardère. Elle s’est souvenue qu’elle était passée à côté il y a quatre ans. »
Monter de catégorie ?
Mais la bête Décosse n’a pas eu le temps de gamberger, bien aidée aussi par les mots de Larbi Benboudaoud. « Lucie, son pire ennemi c’est elle-même, confie le champion du monde 1996 et vice-champion olympique 2000. Parce qu’en termes de judo ou de qualités physiques, elle est largement au-dessus de tout le monde. » Ce que sa protégée a confirmé toute la journée. Sans jamais vraiment réaliser.
« Un mot, ça ne suffit pas pour résumer cette journée, a soufflé la judoka après son combat… et avant de fondre en larmes sur la plus haute marche du podium. J’étais tellement concentrée… Je ne sais même pas si c’était les Jeux ou une autre compétition… J’ai transpiré. Ce n’était pas facile non plus. J’étais vraiment déterminée, j’étais bien sur les mains, agressive. Quand je fais ça, personne ne me touche. Je finis ma compétition avec une bonne image de moi. J’ai tout gagné, maintenant peut-être que je vais monter de catégorie… Dans quatre ans ? On verra bien ! » Rio et les Brésiliens sont prévenus. La Reine Décosse a encore faim.