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Tcheuméo, l’autobus du 9-3

Audrey Tcheuméo

Audrey Tcheuméo - -

A tout juste 20 ans, Audrey Tcheuméo va participer cette semaine à ses premiers Mondiaux de judo à Tokyo (9-13 septembre). Portrait de cette athlète à part, qui n’a commencé le judo qu’il y a cinq ans seulement.

En janvier dernier, lors de la cérémonie des kimonos d’or dans un restaurant classieux du bois de Boulogne, une partie des regards se tournait vers Frédérique Jossinet, toute juste rentrée de 40 jours de survie dans Koh-Lanta. L’autre moitié des regards était pour Audrey Tcheuméo.
Dans ce grand raout annuel du judo français où tout le monde avait fait claquer le costume ou la robe de soirée, la judokate de Villemomble avait décidé de rester elle-même. Pantalon, sous-pull et chemisier en laine. Ce qui lui a valu quelques réflexions. Elle, son truc, à part le judogi, c’est le streetwear. Du large, du coloré et de l’Américain. Des goûts qui font criser Christophe Massina, l’un des entraîneurs de l’équipe de France féminine. Il ne comprend pas qu’elle lâche 40 euros dans un t-shirt de créateur.
Ses fringues, elle les dessine et aimerait les vendre plus tard. Elle veut « ouvrir un business mais pas forcément dans les habits». Derrière cette fille qui se définit elle-même comme un bœuf se cache la dernière pépite du judo féminin français. Sur un de ses t-shirts fétiches est écrit « El Phenomeno » et c’est vrai. Audrey, 20 ans, n’a commencé le judo qu’il y a cinq ans.
La jeune fille a longtemps tâté du football. Dans ses veines coule du sang de champion. Son père, Christian Ebwea-Bile a été un Lion indomptable entre 1984 et 1986. Sa mère, Marceline, a fait partie de l’équipe du Cameroun de handball. Et sa demi-sœur n’est autre qu’Antoinette Nana Djimou, la meilleure heptathlète française. On pourrait rajouter que son demi-frère fréquente aussi le centre de formation de Newcastle.

« Je serai dingue. No limit ! »

Et sur le tatami ça déménage sévère. 1m77 et 78 kilos de force brute. Un autobus qui vous rentre dans le buffet : « Ça sera la guerre là-bas. Je serai dingue, zéro question, je vais rentrer dedans. No limit » claironne-t-elle. Double championne d’Europe junior elle a déjà plusieurs podiums en senior à son actif avec notamment une deuxième place ou tournoi de Moscou où elle a émietté les deux Japonaises de service.
Son explosivité compense largement sa technique encore défaillante. « Elle a réussi à battre assez rapidement les meilleures. C’est aussi une athlète qui a des pans entiers où elle a des difficultés mais quand elle a les mains placées elle peut faire tomber n’importe qui » prévient Martine Dupont, entraîneur en chef des féminines. Déjà classée onzième mondiale en moins de 78 kilos, Audrey s’avance à Tokyo avec de réelles chances de médailles dans cette catégorie vieillissante et pourra faire vérifier que son tatouage Successful (qui a du succès ndlr) sur l’avant-bras n’est pas de l’ego mal placé. Mais bien la marque d’une championne atypique.

Morgan Maury à Tokyo