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Leveaux : « Je me suis mis sur la touche sans le vouloir »

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Aussi discret sportivement que médiatiquement depuis plusieurs mois, Amaury Leveaux est réapparu sur le devant de la scène à l’occasion des derniers Championnats d’Europe en petit bassin. Entretien avec l’écorché vif de la natation française.

Le vice-champion olympique du 50m NL à Pékin avait choisi de rester silencieux depuis sa médaille d'argent européenne sur 100m papillon, glanée début décembre en Pologne. La seule de la délégation française aux Championnats d’Europe en petit bassin. C'est sur le site de la croix Catelan, dans le Bois de Boulogne, qu'il nous a donné rendez-vous pour revenir sur ses ambitions futures et ses erreurs passées.

Amaury Leveaux, que ressentez-vous après cette médaille d’argent ?

Ça fait du bien d’avoir une médaille. Ce n’est pas une revanche, c’est simplement que ça fait plaisir. Je la savoure. Elle est à côté de mon sapin de Noël. C’est mon cadeau. Ça m’a remotivé encore plus qu’avant les Championnats d’Europe. Je me suis remis dans la course. J’ai juste à continuer sur cette route.

On a le sentiment que vos rapports avec la Fédération n’ont pas été faciles durant ces Championnats d’Europe…

Je n’ai pas parlé avec la Fédération. Je me suis pris quelques petits piques à droite, à gauche. Jusqu’ à la médaille, ils ont été un peu froids avec moi. Ensuite, le discours a changé. J’avais alors l’impression d’appartenir à cette équipe de France. Pourtant, quand j’ai appris dans la presse que je ne remplissais pas les critères pour le stage de Val d’Isère (en août dernier, Ndlr), je me suis dit que je n’appartenais pas au groupe. Il (le DTN Christian Donzé) a peut-être fait ça pour me faire réagir. En tout cas, ce n’est pas la Fédération qui m’a donné envie de revenir, mais bien le Lagardère (son club actuel).

Quelle trace a laissé votre absence aux Mondiaux de Shanghai ?

Une vision sur ce qu’est mon métier. Nous sommes très protégés quand nous sommes dans le collectif France. Tout est fait pour la performance. Mais il y a une vie après la natation. J’ai pris conscience de la chance que j’avais. C’est moi qui n’ai pas mis les bonnes priorités à un moment. J’étais dans un sport qui demande l’excellence. Je ne m’investissais pas autant qu’il fallait.

Comment avez-vous réagi par la suite ?

Je suis arrivé dans le bureau de Monsieur Lagardère. On a parlé et je lui ai dit que je pouvais être champion olympique, ou au moins me qualifier. Je lui ai fait cette promesse. Il a eu confiance en moi. Il n’a jamais douté jusqu’à aujourd’hui. C’est à moi de lui renvoyer l’ascenseur.

« J’ai fait le ménage dans mes réseaux sociaux »

Pensez-vous que vos adversaires vous avaient oublié ?

Je ne m’occupe pas de ce que pensent un Bousquet, un Gilot, Agnel ou compagnie. Ils savent mon potentiel. Ils se sont peut-être dit que je me suis égaré. Mais c’est aux sélections, lors des Championnats de France (fin mars à Dunkerque), qu’il faudra montrer les choses. Aux Championnats de France, ça sera la guerre. Ils n’ont pas voulu me parler. J’ai fait le ménage dans mes réseaux sociaux et fait le tri dans mes amis. Je sais qu’il faudra être le meilleur et ce n’est pas en se donnant des tapes dans le dos qu’on va y arriver. Il y a aura de la tension, mais c’est ce que j’aime.

Quels sont vos objectifs sur ces championnats ?

Sortir des Championnats de France sans regret et d’être le plus fort possible. Jusqu’à maintenant, j’ai toujours fait des petites erreurs. L’objectif de tous les nageurs du monde, c’est la qualification. L’étape sera au mois de mars. Je serai au top, prêt à en découdre. Je ne suis pas distancé. Je me suis mis sur la touche sans le vouloir. Mais j’ai confiance en moi et en mon coach.

Le seul qui vous a envoyé un message des Mondiaux de Shanghai est Hugues Duboscq. Vous êtes-vous senti oublié ?

C’est quelqu’un de vrai. Il s’en fiche de tout ce qui est paillettes. Il a fait le choix de rester dans l’ombre. C’est respect pour lui. Il est entier et on est beaucoup dans la natation française à pouvoir prendre exemple sur lui. Il a l’air timide, mais on rigole ensemble. Il est sincère. Quand il m’a envoyé un message pour m’encourager à être là l’année prochaine, ça fait très plaisir. Quand on n’en reçoit qu’un, mais d’un nageur qui a le plus gros palmarès français, ça force le respect. Ça montre qu’on n’a pas besoin d’être surmédiatisé pour avoir un cœur.

Le titre de l'encadré ici

Un avenir en papillon ?|||

Amaury Leveaux a remporté sa première médaille individuelle internationale depuis les Championnats du monde de Rome en 2009 lors de Szczecim, en Pologne. Alors forcément, on s’interroge sur ses capacités à aller plus loin sur la distance. « Les temps que j’ai faits sont très rapides. Sur le 100 pap, j’ai presque battu le record de France réalisé en Jaked (l’une des combinaisons miracles de 2009). C’est extraordinaire », livre-t-il. Alors qu’une place pourrait se libérer dans le relais et que les habituels spécialistes (Florent Manaudou et Frédérick Bousquet) devront se concentrer sur le 50m NL des Championnats de France, le Dellois pourrait saisir une bonne opportunité. « C’était un choix sur le moment parce qu’on sentait bien le truc, avoue Leveaux. On s’est engouffré. Maintenant, au niveau mondial, c’est assez bouché. J’essaierai de donner le meilleur de moi-même. »