Natation: temps "pas exceptionnel", puissance, explosivité... Manaudou fait le point sur sa progression

Il n'a pas accéléré, mais gagné. Et ça suffisait ce samedi à Florent Manaudou, vainqueur du 50m nage libre du meeting de Canet-en-Roussillon dans une finale relevée. En 22"18, le triple médaillé Olympique sur la distance a nagé moins vite qu'il y a trois semaines à Anvers, en Belgique, où il était passé sous la barrière des 22" (21"98). Le nageur qui s'entraîne à Antibes, pas aidé par les conditions météo avec des températures fraiches, de la pluie et du vent sur le bassin découvert de Canet en Roussillon.
Manaudou devance l'américain Michael Andrew (22"22) et le nageur de Trinidad et Tobago Dylan Carter (22s25c). Maxime Grousset termine au pied du podium (22s29c). Le capitaine de l'équipe de France répètera une dernière fois ses gammes sur sa distance fétiche à Barcelone mercredi et jeudi avant les championnats de France à Rennes du 11 au 16 juin qui seront qualificatifs pour les championnats du monde de Fukuoka (23 au 30 juillet). Le trentenaire détaille sa gestion du poids dans sa préparation, ses progrès en musculation et son envie de se mettre à disposition du relais 4x100m si l'équipe de France devait avoir besoin de lui.
Florent Manaudou, c'est moins rapide que votre dernière sortie, mais c'est une victoire...
C'est bien de gagner des courses. Je pense que dans la finale aujourd'hui il y en aura bien au moins quatre qui seront dans la finale à Fukuoka, et j'espère que j'y serai moi aussi cet été. C'est bien, il y avait un bon niveau et ce sera pareil à Barcelone (mercredi et jeudi), voire plus. Donc c'est bien d'avoir gagné. Le temps n'est pas exceptionnel, mais on est à cinq semaines des championnats de France donc si on commence à nager vite maintenant, c'est qu'on n'a pas bien bossé. C'est bon signe d'être un petit peu fatigué mais c'est bien de gagner des courses aussi. Je suis très content de de ce soir parce que les conditions sont honnêtement compliquées. Il fait un peu froid, il y avait de la pluie et un peu de vent. Je pense qu'on avait même un petit vent contraire. Je disais ça aux mecs avant de plonger, je voyais l'eau qui allait dans le mauvais sens (rire) et ça aurait été mieux dans l'autre sens.
En quoi pensez-vous avoir bien travaillé ?
Je le sens, parce que je me sens très fort quand je tire de l'eau, mais par contre je me sens aussi très lourd. Donc ça veut dire que j'ai bien travaillé et que j'ai bien chargé en musculation parce que je fais des supers trucs en ce moment. Mais j'ai l'impression qu'avec un bon repos ça devrait revenir en terme d'explosivité et de puissance. J'ai beaucoup de force, mais pour l'instant, je n'arrive pas à utiliser cette force parce que je n'ai pas d'explosivité dessus. Avec la fraîcheur de l'affutage, Je pense qu'à 32-33 ans c'est encore plus important que quand j'en avais 25. Je le voyais notamment sur les anciens comme Fred (Bousquet) et Fab (Fabien Gilot) à l'époque. Je me demandais comment ils faisaient pour gagner une seconde et demi ou deux secondes sur un 100m en 3 semaines, mais maintenant je pense que je comprends. Quand on est plus vieux, on récupère un petit peu plus lentement, donc j'espère que j'aurai ce petit gap avant les championnats de France.
Et à 32 ou 33 ans comme vous le dites, y a-t-il encore des indices qui montrent que vous progressez sur certains points, et notamment en musculation?
Oui, j'ai fait mon record sur trois répétitions en développé couché par exemplej donc c'est cool. Mais ça crée aussi énormément de fatigue. Avec James (Gibson) avec Quentin (Coton) et Yoris (Grandjean), on essaye de faire les choses bien. J'ai encore fait une très grosse séance lactique lundi. Mais voilà, c'est le jeu aussi. Evidemment, quand on arrive dans une compétition, on a envie de toujours nager vite, mais il faut aussi se rappeler ce qui s'est passé dans les mois, les semaines qui ont précédé. Et j'ai eu aussi pas mal de choses extra-sportives avec quelques shootings, qui prennent de l'énergie. Et je le répète, mais quand j'avais 22, 23 ans, ça me prenait moins d'énergie. Il faut savoir jongler avec tout ça et je sais que maintenant il ne reste plus grand chose à faire avant les championnats de France. Il me reste une bonne semaine de boulot je pense. Et après il sera temps de se rafraîchir un petit peu.
Vous attendez quoi des championnats de France à Rennes (11 au 16 juin)?
Déjà de me qualifier sur le 50 crawl. J'ai déjà fait le temps de qualification à Anvers. Sur le 50m papillonj j'en discutais avec Maxime Groussetj c'est 23"j donc c'est chaud ! Je ferai peut-être aussi un 100m le matinj histoire d'avoir un temps de référence. C'est ce que j'avais fait avant Tokyo et ça s'était plutôt bien passé. Ça me permet d'avoir potentiellement une place dans le relais si le relais est qualifié. Comme ça, je ne dis pas que j'ai déjà nagé 47"9 dans ma carrière et que j'ai ma place dans le relais. J'aime bien chaque année me dire que j'ai ce niveau-là, pour le staff et aussi pour moi. Si je ne nage pas un 100m sous les 49", je vais arriver dans un relais et je ne me sentirais pas forcément légitime. C'est pour moi et pour le staff aussi leur permettre de faire des relais correctement.
Vous avez toujours ce goût du relais?
J'aime bien aider l'équipe en fait. Je n'ai pas ce goût du 100m parce que, forcément, ça me fait mal. Mais ça me fait vraiment plaisir et puis on s'entend super bien. Je suis capitaine aussi ,donc ça me fait plaisir d'être un des leaders. J'espère, au fond de moi, que je ne ferai pas ce relais, parce que j'espère qu'il y aura quatre nageurs qui seront beaucoup plus rapides que moi. Ce serait quand même bon signe parce que je ne pense pas nager 47" aux championnats de France.
"Teddy qui gagne, c'est inspirant", pour Florent Manaudou
"Ça y est, il l'a fait?" A peine sorti de sa récupération, quand on apprend à Florent Manaudou que Teddy Riner a décroché le titre mondial, son 11ème, les yeux du champion Olympique 2016 du 50m nl et par ailleurs fan des autres sports s'illuminent. "Gagner c'est important, lâche-t-il. Je n'ai pas du tout la même carrière que Teddy parce que je pense qu'il a encore plus écrasé son sport pendant plus de dix ans. Mais avec sa défaite aux jeux il y a deux ans, les adversaires se disaient qu'ils pouvaient le battre, alors que je pense que pendant dix ans ils se disaient que le mieux qu'ils pouvaient faire c'était deuxième. Donc gagner un titre mondial comme ça, à son âge (ndlr : un an de plus que Manaudou) et à un an des jeux, c'est prometteur. Et c'est un grand leader du sport français donc ça fait toujours plaisir. Je suis trop content à chaque fois, j'ai vu le titre de Clarisse il y a trois jours. Teddy qui gagne c'est inspirant. On sait que c'est un grand champion et qu'il a des caractéristiques physiques qui l'aident à être très fort. Mais je connais le haut niveau et ce n'est pas parce qu'on est bon pendant 10 ans, qu'on arrête deux ans et qu'on revient qu'on est de nouveau le meilleur du monde. Je sais qu'il y a énormément de boulot derrière. On ne se connait pas beaucoup avec Teddy mais je sais que quand ça fait des années et des années qu'on est là et que l'on gagne, c'est dur encore de gagner. Donc bravo à lui."