RMC Sport

15/06 Philippe Auclair

  • En Angleterre, on appelle ça la ‘silly season’, ce qui se passe de traduction, je crois. Bien sûr que nous autres journalistes sommes en partie responsables de ce surnom pas trop élogieux pour le mercato; encore que, sans vouloir nous tresser des lauriers en toc, RMC a su faire le tri entre l’intox et l’information jusque-là...Mais que de fadaises on entend, que de vent pour faire tourner le moulin aux rumeurs, mon Dieu! Un exemple. Arsenal. Combien de joueurs ont-ils déjà été mentionnés? En vrac: Bassong, Sakho, Hangeland, Vermaelen, Hazard, Matuidi, M’bia, N’Zogbia, Chamakh, Yaya Touré, pour ne citer que les moins fantaisistes. Chaque matin, on se réveille avec une nouvelle rumeur à avaler avec le croissant du petit déjeuner. Honnêtement, j’ai eu horreur de cette période pendant des années, avant de comprendre comment on en arrivait a ce tourbillon dans lequel il est malaisé de distinguer entre les fantasmes et la ‘réalité’. Il y a un mois, j’apprenais d’une source ‘très, très proche’ du joueur X... que son transfert au club ‘Y’ était ‘fait’. L’histoire était crédible, mais je décidai de la garder par devers moi; le manager de ‘Y’ était en effet un drôle de pistolet, connu pour mettre 12 fers au feu ‘au cas où’. Aujourd’hui, je suis quasiment convaincu que ‘X’ n’ira pas à ‘Y’. Non, un transfert n’est jamais ‘fait’ avant qu’il le soit, precisément. Pas même celui de Ribéry au Real, mon Fred! Le Bayern est un grand club qui ne vend que lorsqu’il veut vendre: songez au cas Ballack, à qui un bon de sortie fut refusé alors qu’il était dans sa dernière année de contrat. Cela coûta très cher au Bayern. Mais il avait rapellé qu’aucun joueur, fût-il aussi prestigieux que Ballack, n’était plus grand que le club le plus titré de la Bundesliga.
  • Oublions les rumeurs. Enfin, d’une certaine façon. Je suis inquiet pour Liverpool, qui a cru bon devoir réaffirmer – sur son site officiel - que ni Mascherano ni Alonso ne quitteraient Anfield. Ce déni est un aveu. Ce ne sont pas que les supporters des Reds qui ont peur: c’est aussi leur management. Liverpool est, hélas, malade. Liverpool souffre d’hémorrhagie financière – et cherche en vain de l’argent à transfuser. 50m€ de perte, et rien que pour payer des intérêts, plus de 400m€ de dette (et de ‘mauvaise’ dette, de plus), un refinancement de cette dette qui doit absolument être renégocié avant le 24 juillet, Tom Hicks incapable d’honorer ses engagements avec ses franchises de hockey et de baseball, Gillett qui cherche un investisseur extérieur pour ses Canadiens de Montréal...on se croirait sous la république de Weimar, mais Benitez n’est pas Stresemann. Il s’est vu signifier qu’il devrait ‘vendre pour acheter’. Et ce n’est pas en soldant Voronine (qui intéresse beaucoup de clubs allemands), Dossena (retour en Italie?) ou Benayoun (Barcelone) qu’il dégagera les fonds dont il a besoin pour se servir de la superbe 2ème place de la saison passée comme d’un tremplin. Ce serait plus que dommage, quand Liverpool fit tant pour mettre le feu aux derniers mois de cette saison. Ce serait une catastrophe. La leçon: il convient d’avoir la garantie d’un acheteur que la dette consentie pour la prise de contrôle d’un club sera assumée par lui seul, et pas par le club qui a été acheté. Légalement, c’est aujourd’hui impossible si ce club devient société privée. Ce n’est pas une affaire de DNCG, M. Thiriez. C’est une affaire de loi. Car vous savez quoi, ladies and gentlemen? Si, en France, demain, un autre Kashkar pointait le bout de son nez et trouvait 200m€ pour acheter l’OM en s’endettant, notre magnifique DNCG ne pourait en rien s’y opposer! Si l’on veut faire parler l’exception sportive, faisons-le au niveau de la loi, en trouvant le moyen d’empêcher la transformation de SA ou de SARL (ou tout ce que vous voudrez, selon votre pays) en un holding privé qui n’a de comptes à rendre qu’à lui-même, en définitive. Amen!
  • Un petit mot pour finir sur les Espoirs anglais de Stuart Pearce, qui entament leur Euro ce soir, contre la Finlande. L’équipe a belle allure: probablement Hart – Gardner, Richards, Mancienne, Gibbs – Milner (sa 42ème cape à ce niveau!), Cattermole, Noble – Walcott, Agbonlahor, Johnson. 11 joueurs qui ont tous fait l’expérience de la Premiership, 3 avec Villa, 2 avec Manchester City, 2 avec Arsenal, 2 avec Middlesbrough, plus Mancienne de Chelsea, Cattermole de Wigan et Noble de West Ham. C’est une preuve parmi d’autres que l’afflux de joueurs étrangers ne porte pas nécessairement un coup mortel à la formation, encore que l’absence totale de joueurs de Liverpool dans le groupe de Pearce apporte une autre preuve du déclin inquiétant de l’académie des Reds. Demi-finalistes malheureux en 2007 – éliminés aux tirs au but par le Pays-Bas -, les jeunes Anglais ont les moyens d’aller loin dans ce tournoi, même si le sort ne les pas gâtés en les associant à l’Espagne et à l’Allemagne dans leur poule. C’est en tous cas ce que je leur souhaite, ne serait-ce que pour montrer que la Premiership ‘où il n’y a plus d’Anglais’ demeure un terreau plus fertile qu’on le croit. À tout de suite, ladies and gentlemen.

Philippe