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Philippe Auclair - 09/08

Le Community Shield, Anelka et les autres...

Respirer un grand coup. Ne pas se fier aux premières impressions, surtout quand les jambes des footballeurs sont encore lourdes d’une préparation physique conçue pour qu’ils soient au top de leur condition lorsque chaque point compte vraiment. Surtout après une Coupe du Monde qui a ressemblé à une distribution de gifles pour beaucoup d’entre eux. Résister à la tentation des jugements à l’emporte-pièce sur la foi d’un match qui, tout compte fait, compte pour du beurre. C’est quoi, le ‘Community Shield’, sinon une revue d’effectifs incomplets? Leeds l’avait bien gagné en 1992-93. Hat-trick de Cantona. Grands titres (au pluriel, certainement pas au singulier). Grande désillusion.

Et pourtant, maintenant qu’on cherche de la place pour un nouveau trophée au musée d’Old Trafford (c’était le 18ème ‘bouclier’ des Mancuniens), que c’est difficile de ne pas se laisser porter par la brise du jour, laquelle soufflait du Lancashire ce dimanche. Chelsea et Manchester United sont les favoris des bookmakers – et donc des parieurs. Des favoris logiques, d’ailleurs. Or les Blues, malgr’e une belle réaction en seconde période, ont paru empruntés (‘mais à qui?’, aurait ajouté Pierre Dac), chaussés de crampons gaînés de plomb, et ont essuyé leur quatrième défaite d’affilée, la pire série de résultats d’un champion en pré-saison dans toute l’histoire de la Premier League. Peu d’entre eux ont surnagé. Sturridge, très vif, très direct, était l’exception. United, de son côté, même un brin fragile (Jonny Evans arrière gauche, I don’t think so, Sir Alex, et Chris Smalling n’a pas vraiment convaincu), a séduit. Pimpant, frais comme le sourire du ‘chicharito’ Javier Hernandez, déjà le chouchou de son public. J’ai trouvé Berbatov épatant, par exemple. Généreux dans ses appels, lucide dans la distribution, impeccable dans la finition. Paul Scholes a ressemblé à lui-même avec cinq ans de moins, autant dire au parfait quarterback, alignant les transversales avec la précision d’une série de revers de Ken Rosewall. Rooney? On a retrouvé le bouledogue de mars dernier. Et Carrick a bien plus convaincu qu’un Lampard apathique et un Essien pas trop sûr de son positionnement. Bref, Man U avait pris comme un coup de jeune sous le soleil de Wembley. Dont la pelouse a tenu le coup, enfin!

Mais tout cela, oublions-le. Comme ces filles qu’on croise dans la rue en été et qui vous donnent dix-sept ans parce que le bleu du ciel leur suffit comme maquillage, ce qui n’empêche pas qu’on ait envie de les embrasser, juste pour dire ‘merci’. Alors merci, United, au plaisir!

(Anelka, au fait, pendant que j’y pense. Le cauchemar de Knysna nous a curieusement réveillés, nous autres correspondants qui, malgré tout ce qu’on dit, avons souvent tu nos réserves vis-à-vis de nos compatriotes exilés, même si la relation a pratiquement toujours été à sens unique, comme ce ‘respect’ qu’exigent les footballleurs et dont ils sont si avares eux-mêmes. Ancelotti l’a fait jouer seul, en pointe, dans un rôle qu’il a dit détester avec l’équipe de France. Le résultat n’a pas été brillant. Anelka a passé une mi-temps à faire l’ascenseur entre son avant-poste et le milieu de terrain, comme un client d’hôtel qui s’incruste à la réception pour exiger la clé d’une chambre qui n’est pas la sienne. Il a ensuite quitté le terrain, dans le silence. Il est inutile de l’accabler pour autant. Anelka a rendu de signalés services à Arsenal, Bolton, Manchester City et Chelsea. J’ai toujours tâché d’en rendre compte le plus généreusement possible, quand bien même le joueur en question nous snobait en zone mixte, ce sourire bizarre aux lèvres, après nous avoir fait poireauter pendant 90 minutes. Il l’a encore fait dimanche. Et ma pensée, c’est: il va passer le cap des 30 ans. Il est riche. Il est jeune et vieux à la fois, bien plus jeune et bien plus vieux (surtout ça) que moi. Et il mourra bientôt – comme joueur. Une, deux saisons, et puis bye-bye, bienvenue au Qatar. Je ne sais rien de lui. Il s’en tape. Et désormais, je m’en tape aussi. Le football est cruel: quand on n’est pas l’avenir, on n’existe déjà plus au présent.)

Aparté: Wes Brown (30 ans) et Paul Robinson (idem), appellés en équipe d’Angleterre pour le match amical de mercredi contre la Hongrie, ont décidé de s’auto-désélectionner. Quel gag! Heureusement que le ridicule n’a jamais vraiment tué, auquel cas le championnat d’Angleterre (et quelques autres) serai(en)t un tournoi de sixte. On se passera de vous, messieurs. Comme on s’en est passé auparavant.

Les DDD reprennent en douceur ce lundi, la faute à des calendriers décalés dans nos championnats respectifs. Pour l’Angleterre, les choses sérieuses ne commenceront que dans six jours, avec, illico, deux grosses affiches: Spurs-City samedi, Liverpool-Arsenal dimanche. Je vous ferai la présentation de cette première journée un peu plus tard; pour l’instant, nous sommes encore dans les eaux troubles d’un mercato comateux, dans lesquelles nous essaierons tout de même de nager ce soir. Les nouvelles réglementations de la Premier League (25 joueurs de 21 ans et plus sous contrat au maximum, dès le 31 août) font que tout le monde attend la dernière minute pour abattre son jeu, histoire de profiter des inévitables soldes, en particulier de celles qui vont bouleverser l’effectif surabondant de Manchester City – des Citizens qui auront sans doute ajouté Balotelli et Milner à leur shopping list d’ici jeudi. Il y aura de belles affaires a saisir: Bridge, Robinho, Bellamy, Santa Cruz, Jo, Ireland, Wright-Phillips...Mais, d’ici là, ça risque d’être le calme plat, et les agents en profitent pour attiser les rumeurs, histoire de faire croire que leurs poulains sont demandés partout. Fatiguant.

Au fait, William Gallas a-t-il enfin trouvé un club?

A ce soir à l’antenne...