Philippe Auclair - 16/11

Chelsea implose...mais pourquoi donc?
Une fois n’est pas coutume: cette semaine, un seul sujet au menu de ce billet, mais celui-là est de taille, puisqu’il ne s’agit ni plus ni moins que de l’implosion des Blues hier au Bridge, dont j’ai été le témoin, assis à dix mètres au dessus de la zone technique de Carlo Ancelotti. Evidemment qu’il y a 100 autres sujets dont nous pourrions parler ensemble – comment Aston Villa, avec cinq joueurs de moins de 21 ans, sans milieu de terrain, sans avant-centre, a été bien malheureux de concéder le nul 2-2 face à un MU inexistant pendant 80 minutes, et qui a désormais sept matchs nuls à son compteur. Comment Liverpool a rechuté à Stoke, et comment certains supporters font tout pour miner le terrain sur lequel doit avancer Hodgson, alors que celui-ci a enfin trouvé ses marques avec Stevie G et Carragher. Comment Arsenal a cravaché pour prendre trois points à Goodison, avec un Nasri encore une fois remarquable et qui, ca y est, est devenu un vrai patron qui enchaîne les performances de haut niveau. Oui, c’est vrai, il y a tellement à raconter.
Mais comment ne pas être abasourdi de ce qui s’est passé au Bridge?
Je n’ai pas souvenir d’avoir vu un champion d’Angleterre en titre se faire humilier de la sorte, et devant son public. Jamais. Même si Sunderland a produit l’une des plus grandes performance de son histoire (ce que certains amis, fans des Black Cats, me soutiennent mordicus), il n’en demeure pas moins que Chelsea a sombré. Sans un grand Petr Cech, les Blues auraient pu – dû – encaisser six, sept buts.
Je dois me relire pour y croire: “Sans un grand Petr Cech, les Blues auraient pu – dû – encaisser six, sept buts.”
Comment a-t-on pu en arriver là? Et quelles peuvent être les conséquences de cette déroute sans précédent?
Les blessures – certes. Pas de Terry, pas d’Alex, pas de Lampard, pas d’Essien. Drogba pas encore remis de sa crise de paludisme. Mais regardez Manchester United, Arsenal, Villa et Spurs cette saison, et l’argument ne tient plus. Eux aussi ont été (et, dans le cas des Villans, demeurent) saignés à blanc. Tout club passe par ces phases où des acteurs de premier plan viennent à manquer. Cela arrive à tout le monde; c’est la capacité de faire front dans des circonstances difficiles qui distingue les gagneurs. Carlo Ancelotti, beau joueur comme toujours, ne se cachait pas derrière de fausses excuses de ce genre. Mais il y a une vérité qu’Ancelotti se refuse à admettre - mais en a-t-il le droit?
C’est à son banc qu’on reconnait une equipe capable de prétendre aux plus grands honneurs.
Or regardez le banc des Blues dimanche. Oui, Josh McEachran a un gros potentiel, tout comme Gaël Kakuta – et Jeffrey Bruma, laissé moisir sur la ligne de touche, incompréhensiblement, alors que Paulo Ferreira se noyait en défense centrale. Mais voilà ce qui arrive lorsqu’on laisse partir cinq internationaux confirmés: Ballack, Joe Cole, Belletti, Deco et Ricardo Carvalho (oh, mon dieu, laisser partir Ricky...quelle bourde), et qu’on ne les remplace pas, ou alors par des joueurs – Ramires – qui auront de toute façon besoin de plusieurs mois pour se faire au tempo et au défu physique de la Premier League.
Ancelotti n’est en rien responsable de cet état de fait. Il a mené son équipe au premier doublé de son histoire. Ce n’est pas lui qui a décidé de couper la pompe à phynances, comme disait Jarry – c’esr Roman en personne, comme c’est Roman, pas Carlo, qui a décidé de limoger Ray Wilkins alors que (info RMC!) il lui restait encore six mois de contrat. Wilkins, l’allié des joueurs, qui ne comptait que des amis dans le vestiaire, et dont le départ, sans impact sur le ‘sportif’, comme on dit puis, en a déjà un sur le mental de ses anciens protégés. Je peux vous assurer que Terry, en particulier, a été profondément affecté par le départ forcé de son ami. Chelsea n’a pas existé dimanche. On n’a pas reconnu les Blues de Mourinho, de Hiddink et même de Claudio Ranieri. 3-0. Un score comme celui-là , les Blues n’en avaient pas concédé un à la maison depuis 2002 – et c’était contre Manchester United!
Je sais, je me répète – c’est que j’ai du mal à y croire.
C’est tant mieux pour la Premier League, me direz-vous; et, objectivement, c’est vrai. Un championnat a besoin de ce genre de secousses, qui sont un signe qu’il existe une vraie vie au delà du pseudo-Big Four ou Five. Nous en avons connu quelques-unes cette saison. On sent que des équipes comme Newcastle et Bolton sont en train de monter en puissance, grâce à un recrutement habile et à d’excellents techniciens (Owen Coyle et Chris Hughton). Mais ça?
J’ignore si, de France, on sent les ‘aftershocks’ du tremblement de terre du Bridge comme c’est la cas ici. Vous qui suivez ce blog savez bien que je n’ai rien contre Chelsea, comme ‘contre’ quiconque d’ailleurs. Sauf Sam Allardyce ?. Et Alan Hansen. Mais ne nous égarons pas.
Il est impossible de ne pas se demander quel impact cette catastrophe collective aura sur une équipe qui se nourrit de ses tensions internes, certes, mais qui n’a pas paru aussi fragilisée depuis le limogeage de Jose Mourinho en 2007. Chelsea avait su rebondir. Les hommes forts du vestiaire avaient pris l’équipe en main, Avram Grant avait suivi.
Aujourd’hui, ces hommes forts sont diminués. Deux d’entre eux – Carvalho et Ballack, s’en sont allés. Les autres ont vieilli, ou sont blessés. Frank Lampard, dont l’influence passée est de plus en plus palpable maintenant qu’il n’est plus là...quand reviendra-t-il, lui qui ne devait être absent que dix jours.
Je continue de penser que Chelsea peut conserver son titre; mais, comme vous tous, j’imagine, je suis sous le choc, et je ne peux imaginer qu’il en soit autrement des joueurs et du staff qui l’a vécu en première ligne. Ancelotti, le quadruple vainqueur de la Ligue des Champions, comme joueur et comme entraîneur, fait aujourd’hui face à l’un des plus gros défis de sa carrière. Sans l’appui d’Abramovitch, il aura du mal à le relever, et c’est ce qui m’inquiète le plus.
Et Sunderland? Magnifique. Fans de Rennes, comme Gyan doit vous manquer. Fans de MU, ne regrettez-vous pas d’avoir laissé Danny Wellbeck partir en prêt chez les Mackems? Steve Bruce mérite tous les compliments qu’il a reçus depuis son ‘coup’ du Bridge. Aucun autre entraîneur d’un club dit ‘petit’ (ce que Sunderland, historiquement, n’est certainement pas) n’aurait eu le culot de venir jouer en 4-4-2 chez le champion. M. Bruce, bravo de votre courage. Bravo d’avoir inspiré vos joueurs de la sorte, avec mention spéciale à Boudewijn Zenden, eh oui, qui a ‘mouillé le maillot’ comme jamais, et montré des choses ravissantes avec son pied gauche de velours. Henderson, quel potentiel!
Mais souvenez-vous: Sunderland a battu Villa et City, fait match nul contre Arsenal, Liverpool et Manchester United. C’est déjà remarquable. Atomiser Chelsea, c’est autre chose.
Je dois vous quitter maintenant. La conférence de presse de Laurent Blanc à Sopwell House commence dans un instant, et ‘le devoir appelle’.
Pas un mot de Angleterre-France? Eh non. Je préfère vous parler de football. Du vrai. Le mot 'amical' ne figure pas dans ce dictionnaire.
A très vite à l’antenne, ladies & gentlemen!