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Philippe Auclair - 6 novembre 2011

Et si on parlait des ‘petits’, pour changer?

Car ce sont peut-être ces ‘petits’ qui sont la vraie belle histoire de cette saison de Premier League, par ce qu’ils ont accompli depuis le début de la saison, mais, surtout, par la manière dont ils l’on fait. Nos trois promus, QPR, Swansea et Norwich, figuraient tous dans le Top 12 de la Premier League dimanche matin. Qui l’aurait parié en août dernier?

Norwich et Swansea étaient allés trop vite, disait-on. Les premiers jouaient encore en League One quand Paul Lambert, le plus allemand des entraîneurs britanniques, arriva à Carrow Road en août 2009. Les seconds étaient eux aussi en D3 un an plus tôt, lorsque Roberto Martinez, le plus britannique des Espagnols, révolutionna leur jeu et les mena à une première promotion. QPR? Encore en D3 en 2004, avant de s’embringuer dans un invraisemblable tourbillon de joueurs, managers, agents et propriétaires qui faillit faire crever le club. Mais regardez-les aujourd’hui.

Les Rangers ont enfin recouvré la stabilité, avec un nouveau mécène, Tony Fernandes, qui a su appuyer le manager de la remontée en Premier League, Neil Warnock, alors que le régime précédent voulait s’en débarrasser. Bien lui en a pris. Hier encore, on ne s’est pas ennuyé à Loftus Road. Totalement décomplexés, les Rs ont été à une transversale de tenir en échec Man City dans l’un des matches les plus débridés de la saison, deux semaines après leur hold-up contre Chelsea. Ils connaîtront peut-être encore des jours sans, comme celui de la raclée 6-0 reçue à Fulham; mais Fernandes a déjà fait savoir que Warnock disposerait de fonds supplémentaires en janvier; s’ils sont utilisés aussi astucieusement que l’été dernier, quand Wright-Phillips et Barton avaient été pincés sous la barbe de beaucoup d’autres clubs, les Rangers ne devraient pas trop craindre la perspective des cinq mois suivants. Ce n’est pas tous les jours qu’ils feront face à une équipe qui, lorsqu’elle tourne moins bien, peut faire confiance à un Dzeko et un Silva pour marquer deux buts exceptionnels et salvateurs.

Le parcours de Norwich constitue une moindre surprise à mes yeux. QPR marche à la passion, les Canaries chantent l’air que Paul Lambert leur fait répéter à longueur de séance, depuis plus de deux saisons. Avec lui, des joueurs limités comme Grant Holt (par ailleurs formidable de combativité et de courage) se découvrent meilleurs qu’on le dit. Ce coup franc de Pilkington...un chef d’oeuvre! Une fois encore, le score final à Villa (2-3) n’était que l’intitulé d’un chapitre qu’on devait lire autrement; Norwich avait secoué un Villa en progrès, et n’aurait pas volé de partager les deux points d’un nul. Lambert est un maître tacticien tout autant qu’un fin stratège, et je ne suis pas près d’oublier comment il donna une leçon dans ces deux domaines à André Villas-Boas au Bridge, avant que l’expulsion de John Ruddy ne fasse chavirer le match en faveur des Blues.

Un point commun entre les Canaries et d’autres oiseaux – les Swans – est que, si leur effectif n’est pas des plus riches, ils possèdent au moins un joueur sur lequel compter en toutes circonstances pour apporter un brin de fantaisie à un entrejeu par ailleurs remarquablement équilibré. Dans le cas de Norwich, c’est l’épatant Wes Hoolahan, un Irlandais qui a de l’esprit pour deux, et dont je me demande bien pourquoi il n’a été sélectionné qu’une seule fois par le Trap’. Pour les Gallois, que j’ai laissé en dernier afin de faire durer le plaisir, c’est le merveilleux Leon Britton, le Xavi de Swanselona, formé à Arsenal, mais (hormis un prêt à Sheffield United) fidèle au club de la Principauté depuis 2002. Le week-end dernier, contre Bolton (3-1), Britton, 1m65, était devenu le premier joueur d’un club de Premier League à jouer 90 minutes en réussissant 100% de ses passes – 67 sur 67. Contre Liverpool, il n’en a réussi ‘que’ 92,6% (63 sur 68)...à Anfield.

J’adore ce joueur, j’adore cette équipe, j’adore Brendan Rodgers pour ce qu’ils représentent de neuf: un désir de jeu au-delà des limites supposées du football anglais, et avec des joueurs en majorité anglo-saxons. Quiconque suit le Championship, qui vaut bien quelques autres championnats dits ‘majeurs’, sait que cela fait plusieurs saisons que le ballon, s’il bouge toujours aussi vite, file davantage sur le gazon que via la stratosphère. Après Blackpool, tant regretté, au tour de Swansea de nous le confirmer.

Swansea qui aura rappellé quelles sont les limites actuelles de Liverpool. Une autre stat: 82,6% de conservation du ballon pour les visiteurs, un tout petit peu plus de 80% pour les Reds. Certes, ‘Pool joue un football plus direct, ce qui est normal quand Andy Carroll est là en point de fixation. Mais tout de même..chez soi? Je ne suis toujours pas convaincu par ces Reds de 2011-12, et beaucoup de leurs supporters partagent d’ailleurs cet avis. Que se passerait-il si Suarez venait à se blesser? D’où viendrait la créativité dans les 30 mètres adverses? On n’en sait toujours pas plus sur Steven Gerrard, le talisman, l’ouvre-boîte parfois génial; si ce n’est que la trêve internationale ne pouvait survenir à meilleur moment. Jordan Henderson – remplacé à la mi-temps – n’a pas vraiment progressé. Downing a montré de belles choses, mais demeure inconstant. Charlie Adam a des éclairs, mais doit encore épurer son jeu à ce niveau. Peut-être le 2-0 à l’Emirates, pas malchanceux d’ailleurs, et face à des Gunners en plein désarroi, a-t-il occulté les carences de l’équipe de Dalglish. Je le disais à l’époque, je le dis aujourd’hui: une place dans le Top 4 me parait au-delà des capacités actuelles des Reds. Tottenham et – oui – Arsenal me semblent bien mieux armés, et je ne crois pas que Chelsea s’effondrera, quel que soit le sort à terme de Villas-Boas.

Honneur aux ‘petits’. Et Newcastle n’en fait pas partie. Mais, même en jouant mal, les Magpies sont demeurés invaincus. Dans la douleur, au sens littéral pour Cabaye et Marveaux, dont les pépins ne semblent heureusement pas trop graves. Là aussi, la trêve internationale arrive à point nommé. Alain Depardieu ou Gérard Pardew, comme vous voulez, a besoin de souffler un peu. Man City, Man United, Chelsea à suivre. On sera bientôt fixé. Un rappel, cependant: depuis la création de la Premier League en 1992, seule une équipe classée dans le Top 3 après 11 journées a fini hors des six premières.

Van Persie, 29 buts en 28 matches de championnat disputés en 2011...Prenez-en soin, M. Van Marwijk! Arsenal s’est baladé contre West Brom. Mine de rien, cela fait quatre victoires consécutives en EPL pour les Gunners, leur meilleure série depuis vingt mois. Au passage, ceux qui avaient des doutes sur la capacité de Mikel Arteta de passer à la vitesse supérieure devraient regarder ce match, pendant lequel il a survolé les débats en milieu de terrain.

John Terry? Innocent tant qu’il n’a pas été prononcé coupable, raison pour laquelle je ne vais pas joindre ma voix au choeur de lyncheurs, quoi que je pense de l’individu. Je ne ferai aucun autre commentaire sur le sujet. Chelsea? Une victoire énorme, croyez-moi. Parce qu’une défaite, même un nul, auraient pu avoir un impact catastrophique sur leur manager.

Sir Alex et United? Nous en parlerons en longueur dans le grand after de lundi. Rendez-vous pris. Et n’oubliez pas que vous pouvez me retrouver sur twitter, @PhilippeAuclair, où j’ai déjà conversé avec beaucoup de fidèles de RMC, comme vous pouvez deviser avec moi – et entre vous - sur ce blog.

En route pour Fulham, maintenant!