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Bouscatel : « On ne peut pas continuer à aller dans le mur »

René Bouscatel

René Bouscatel - -

Le président du Stade Toulousain a expliqué lundi les raisons de sa brusque démission du comité directeur de la Ligue nationale de rugby. Opposé à la nouvelle convention liant cette dernière à la Fédération, René Bouscatel dénonce les entraves subies par les clubs de Top 14.

Pourquoi avez-vous décidé de démissionner du comité directeur de la Ligue nationale de rugby ?

Je crois qu’au sein des clubs, il y avait une prise de conscience collective. On le voyait, certains s’exprimaient et moi je ne m’exprimais parce que je suis légaliste et je considérais que la meilleure façon était de participer. Mais je me rends compte qu’en participant, on finit par servir d’alibi, on perd sa liberté de parole. Et comme de toute manière, les enjeux politiques sont plus forts, on se trouve dans un moment de découragement passager. Et je pense très sincèrement, qu’à l’extérieur de ce comité, moi et d’autres serons beaucoup plus efficaces. Nous ne serons pas en guerre, pas contre le comité, mais réfléchirons, proposerons et essaierons de trouver des solutions.

Comment cette décision a-t-elle été prise ?

Cette décision n’a pas été prise par réaction de dépit ou de colère vis-à-vis du dernier avatar qui est la signature de la convention Fédération/Ligue, notamment sur la mise à disposition des joueurs internationaux. Cette décision, que je regrette et que je combats, n’a été que la dernière goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Il y a longtemps que je considère que le rugby français ne va pas dans une grande cohérence, avec des conflits permanents entre la Fédération et la Ligue, avec des conflits entre l’équipe de France et les clubs. Or, je crois que des solutions peuvent être trouvées. Mais ces solutions ne sont pas trouvées parce que nous sommes dans un système imposé par la loi sur le sport, avec un système de délégations et de subdélégations qui faussent totalement les relations entre les acteurs du rugby.

Comment expliquez-vous cette situation ?

Il n’y a que dans le microcosme du rugby qu’on n’arrive pas à le comprendre. Mais, à l’extérieur, tout le monde le comprend quand on en parle. On ne peut pas continuer à aller dans le mur. Je pense que la qualité principale d’une compétition sportive, c’est l’équité. Or, lorsqu’on prive certains clubs des 30 meilleurs joueurs du Top 14 pour le championnat, je dis que c’est une compétition inéquitable et dévalorisée. Est-ce que nos spectateurs continueront à venir alors que nous affichons de manière ostensible et règlementairement que les 30 meilleurs joueurs n’y participeront pas ?

Quelles sont vos solutions pour remédier à ce problème ?

Je pense qu’il est temps que les clubs se prennent en main. Il faut que les clubs et leurs présidents puissent se retrouver pour discuter ensemble, mieux se connaître, essayer de trouver des solutions à des problèmes communs. A mon sens, ils ne sont pas très difficiles à régler, à la condition que chacun y mette du sien et fasse des concessions. Mais je ne parle pas de concessions imposées dictatorialement par des règlements et des textes mais des concessions librement consenties dans la discussion entre les clubs. Je souhaite une réunion de l’ensemble de présidents de club, de manière informelle. Il n’y a pas besoin de créer une association ou un contre-pouvoir, car ce n’est pas un contre-pouvoir. Jusqu’à présent, beaucoup de dirigeants parlent sans que l’on sache très bien quelle est la position prise par le sportif.

Jusqu'où peut aller cette crise dans le rugby français ?

Je ne sais pas jusqu’où ça ira, mais je sais que beaucoup de présidents pensent comme moi. Je pense qu’il y aura eu une prise de conscience parce que des clubs ont réalisée qu’on était allé trop loin et qu’on ne pouvait pas continuer comme ça et qu’il fallait tout remettre à plat.

Qu'est-ce que cela va changer pour le Stade Toulousain ?

Pour le club, rien. Simplement, ça va changer pour moi. Le club a de beaux résultats. Nous espérons qu’il continuera à les avoir malgré toutes les entraves que l’on peut mettre devant nous. Mais maintenant, nous allons réfléchir à voir comment nous pourrons tirer le meilleur de nos troupes. Ce sera peut-être en faisant un peu varier notre politique sportive, trouver des ajustements. Mais croyez-le bien, ce n’est pas aussi simple que de dire nous ne voulons plus de joueurs internationaux. Les internationaux, nous les formons et c’est une fierté pour nous. Et j’espère que nous aurons toujours des joueurs internationaux, mais peut-être qu’il y aura d’autres équilibres.

Propos recueillis par J.D. à Toulouse

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La rédaction