Lapasset : « La compétition a besoin des Bleus »

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J-J B : Êtes vous d’accord pour que le Coupe du Monde reste à vingt nations ?
B L : C’est une très bonne idée. Il y a un débat qu’il faut lancer (ndlr : pour participer à la pétition RMC pour une Coupe du Monde à 20 nations, cliquez ici). Moi je suis pour les vingt nations, je ne regrette pas le choix que j’ai fait pour la Coupe du Monde en France, parce qu’on a une diversité de cultures qui permet ça. Je sais qu’en Nouvelle Zélande il n’y a pas de clubs, il n’y a pas cette notion qui permet vraiment d’identifier une diversité de public comme on a en France. C’est un problème pour la Nouvelle Zélande en 2011 et la prochaine Coupe du Monde.
J-J B : Donc on pourrait disputer la prochaine Coupe du Monde à seize ?
B L : Je n’y suis pas favorable mais on le pourrait, parce qu’il faut adapter à chaque pays organisateur, sa propre culture. On est dans un monde où le Rugby vit à travers ses différentes façons de l’exprimer. En France on l’exprime dans une très grande diversité de cultures, de régions, de langues, de nationalités. Il y a beaucoup de joueurs étrangers qui jouent en France et c’est le cas aussi dans le public.
J-J B : Que pensez-vous du rugby aux Jeux Olympiques ?
B L : Oui c’est une très grande idée. Au départ ce serait à sept parce que c’est plus universel. Je suis très favorable à cette proposition, d’autant que nous aurons une discussion qui va s’ouvrir dans le courant de l’année 2008 avec les autorités olympiques. On a encore deux places dans le programme olympique disponibles. Ces deux places ont été rendu libres depuis deux ans maintenant, il y a eu une première tentative où nous n’avons pas été retenus. Nous sommes devenus un sport majeur, universel, de plus en plus ouvert et je crois qu’il serait bien qu’on soit dans le programme olympique.
J-J B : La « Chabalmania » ça vous énerve ?
B L : Non parce qu’il y a un phénomène qui est fort derrière cette « Chabalmania ». Il y a quatre ans c’était Michalak, le côté un peu “élégant” du rugbyman. Aujourd’hui, c’est une recherche de l’homme fort qui gagne, qui se bat. Le public attend aujourd’hui du rugbyman Français qu’il soit conquérant, qu’il soit dominateur, qu’il s’exprime à travers la victoire. On a besoin peut-être de cette image pour renforcer le potentiel.
J-J B : On a besoin de la victoire de demain soir ?
B L : On a besoin de rassurer tout le monde. Donc oui il nous faut la victoire.
J-J B : Imaginons que la France soit battue demain soir ?
B L : Ça m’étonnerait…
J-J B : Rien n’est jamais gagné d’avance…
B L : Je plaisante. Il est vrai qu’il faut se garder de tout excès d’euphorie, simplement, on a vraiment le sentiment qu’une Coupe du Monde, sans la France, ce serait vraiment dommage. Il manquerait vraiment ce qui fait la passion et l’animation dans les rues, dans les villes, dans tous le cœur des Français. On a besoin que l’équipe de France soit présente.
J-J B : Une remarque qui revient très souvent, c’est la France qui organise cette Coupe du Monde de rugby et c’est la France qui est susceptible de jouer son quart de finale à Cardiff…
B L : Malheureusement c’est un tirage au sort qui en a décidé ainsi, qui a déterminé les poules. Mais peut être que Cardiff nous réservera des surprises ? Il ne faut pas partir battu, quelque soit le stade, quelque soit l’adversaire. Une Coupe du Monde c’est sept matchs, on en a perdu un, on a donc perdu notre joker. C’est ça la réalité, nous devons maintenant gagner les six matchs qui arrivent.
J-J B : Vous battez des records d’influences en France ?
B L : On est un petit peu passé d’un extrême à l’autre. On est encore un sport un peu régional et cette Coupe du Monde nous amène sous les éclairages des grands événements internationaux. Le rugby est le troisième événement sportif mondial. Grâce à la France, il va passer encore un nouveau cap. On est en train de battre les records d’audience, et on sent véritablement monter la fièvre de ce sport.
J-J B : On ne peut malheureusement pas voir tous les matchs à la télévision ou alors il faut avoir Eurosport…
B L : Je pense que vingt matchs sur TF1 c’est déjà beau, c’est déjà un bel exploit de la part de la chaîne. C’est un petit regret de savoir qu’il y a des gens qui n’ont pas encore cette culture d’aller sur une chaîne câblée. Parce qu’en France c’est moins développé qu’en Grande-Bretagne, et il est vrai que ce contrat a été signé par les Britanniques qui ont parié sur le développement des chaînes câblées.
J-J B : Est-ce que vous serez candidat à la présidence de l’IRB ?
B L : Je pense qu’il y aura un débat ouvert et que j’en ferais partie. Il n’y a pas de candidature, il s’agit simplement d’exprimer un certain nombre de projets, et je serais dans ces projets.
J-J B : Vous avez regretté les caméras dans les vestiaires ?
B L : C’est comme le calendrier du Stade Français… J’aime beaucoup la pudeur de ce sport et je pense qu’il faut faire attention à préserver cette pudeur du rugby. Je pense qu’il vaut mieux libérer les joueurs dans un terrain que les enchaîner dans un calendrier. Je préférerai quelque chose de plus spontané. Je trouve que les vestiaires, c’est un espace qui appartient aux joueurs et aux entraîneurs et qu’il faut faire preuve de prudence par rapport à l’image.
J-J B : Est-ce que la lettre de Guy Môquet va être lu demain avant le match contre l’Irlande ?
B L : Je crois qu’il y a des choses qu’il faut essayer de faire correctement, il y a une part d’émotion nécessaire dans un message et la part de combat. Pour demain on a besoin de cette position de combat et de conviction en laissant le message et l’émotion de coté.
J-J B : Combien va rapporter cette Coupe du Monde ?
B L : On est sur une base en France, frais déduits et taxes données à l’IRB, on est à hauteur d’un potentiel de 5 millions d’euros, je pense qu’on fera un petit peu plus de bénéfices.
J-J B : Où en est-on des contrôles de dopages ?
B L : Les contrôles se font régulièrement, on a une activité très serrée sur l’ensemble des contrôles.
J-J B : Est-ce que le rugby est à la merci de l’argent ?
B L : On en est loin… Mais cette médiatisation me fait un peu peur parce qu’on n’a pas cette culture. Il faut essayer de préserver ce sport qui ne vit que parce qu’il développe des éléments autre que l’argent : des valeurs de convivialité, d’amitié, de fraternité dans les stades. Il n’y a pas cette référence à l’argent qui sépare et qui divise.