Peur sur les Bleus

Cédric Heymans - -
Il est 8h, Paris et la France, s’éveillent. Les paupières peinent à s’ouvrir en ce samedi matin ensoleillé. De l’autre côté de la Terre, à 20 000 kilomètres de la Tour Eiffel, quinze représentants de la nation se doivent eux d’être parfaitement alertes. Il est 18h, à Auckland. L’heure du premier rendez-vous du XV de France dans la Coupe du monde 2011. Ils sont tout de blanc vêtus, semblent moins pâlichons qu’il y a quatre ans, quand l’Argentine avait douché le Stade de France en ouverture de la compétition. Mais ces Bleus-là ont un autre cauchemar qui trotte dans leurs têtes. Une défaite humiliante à Rome, au mois de mars (22-21). A North Harbour, la réplique a failli être catastrophique. Mêmes maux, mêmes effets. Ou presque. Malgré la panique, le XV de France a évité de sombrer dans le port d’Auckland (47-21).
Les trois essais rapidement inscrits par Julien Pierre (5e), François Trinh-Duc (12e) et Vincent Clerc (34e), comme les trois autres en fin de match (Nallet 71e, Pape 77e, Parra 80e), n’ont pourtant été que des leurres et la nette domination au score qu’une image trompeuse. Les esprits tricolores sont toujours marqués par Flaminio. Le sens tactique de l’équipe de Marc Lièvremont est encore énigmatique, alors que les deux victoires face à l’Irlande en préparation avaient rassuré. Face à des Japonais très joueurs, vifs et beaucoup plus à l’aise avec le ballon, les Bleus n’ont jamais essayé d’occuper le terrain, de repousser dans leur camp des adversaires pourtant modestes (13e au classement mondial).
Les Japonais ont fini par craquer
De l’efficacité, de la méthode, à défaut d’un flair et d’une finesse clairement oubliés à la maison, c’est ce qu’il aurait fallu à ce XV de France. Or il a tremblé presque jusqu’au bout, à cause du retour nippon au tableau d’affichage. A la mi-temps, les Tricolores menaient pourtant 25-11. Un avantage confortable mais déjà illusoire. La récitation des lancements de jeu appris cet été a permis de bien démarrer la rencontre. L’interception de François Trinh-Duc sur une passe du Néo-Zélandais de naissance James Alridge, elle, a symbolisé le gagne-petit qui allait devoir guider l’équipe de France par la suite. Car dans les quinze dernières minutes de la première période, les Japonais ont pris l’ascendant.
Après une chandelle manquée par l’ouvreur français, puis un contre heureux, James Alridge a aplati une première fois (31e). Et une deuxième, au retour des vestiaires (49e), alors qu’Imanol Harinordoquy et François Trinh-Duc ont été incapables de l’arrêter. Les Bleus ont ensuite vu leurs adversaires revenir à quatre points (25-21), au gré des pénalités. Finalement, et parce que les Japonais ont explosé physiquement dans les dix dernières minutes, Lionel Nallet, Pascal Papé et Morgan Parra ont mis à l’abri l’équipe de France. Avec le bonus offensif, les Bleus prennent cinq points et recollent aux All Blacks en tête du groupe A. Mais qu’il sera difficile d’oublier cette période d’errance, de la 25e à la 70e minute. Pour le XV de France, le début de la Coupe du monde s’accompagne déjà d’une foule de questions.