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XV de France : la victoire en questions

Vincent Clerc

Vincent Clerc - -

Vainqueur pénible du Canada (46-19), à Napier, le XV de France n'a pas évacué les doutes qui l'habitent, alors que se profile déjà le match face à la Nouvelle-Zélande samedi (10h30). Retour en quatre volets sur un week-end qui pourrait tout changer.

Après leur prestation décevante face au Japon (47-21), les Bleus ont-ils progressé dans le jeu ?

Face aux « Canucks », la France a une nouvelle fois bafouillé son rugby. La faute à plusieurs imprécisions techniques qui l’ont empêché de développer des mouvements d’envergure, excepté en fin de match, sur les deux essais de Vincent Clerc (78e, 80e). Pour expliquer leurs difficultés, les Bleus ont mis en cause la pluie, à l’instar de Morgan Parra (23 points) : « Dans ces conditions, on était obligé d’avoir du déchet. Si vous (les journalistes) pensez que tout a été brouillon, tant pis. » Mais c’est encore une fois un manque de constance mêlé à un complexe de supériorité qui a semblé coller aux basques des Tricolores. Avant la rencontre, Marc Lièvremont s’en était plaint : « La France n’est pas la Nouvelle-Zélande. Je ne suis pas sûr que l’on soit capable de faire preuve de la constance qui caractérise les Blacks pendant 80 minutes. Eux respectent leurs adversaires et sont capables de maintenir leur engagement de jouer jusqu’à la dernière seconde pour les écrabouiller. Nous (face au Japon), on a été un peu plus légers mais c’est typiquement latin. »

La France a-t-elle peiné sur le plan physique ?

Malgré les jambes de Clerc en fin de match, les Bleus ont semblé manquer de jus dans les phases de regroupement et sur les rucks. Pourtant, les Canadiens n’avaient bénéficié que de quatre jours de repos. La préparation « commando » de deux mois doit leur permettre d'atteindre leur pic de forme pour les tests décisifs face à la Nouvelle-Zélande et aux Tonga. Avant le match, le sélectionneur avait déjà laissé entendre que les deux premiers matches amèneraient une montée en puissance : « Face aux Blacks, il faudra être dans une forme optimale. » Toute en pointant les problèmes inhérents à une compétition internationale : « Le souci, c’est que la préparation n’a pas été linéaire pour tous les joueurs, certains se sont blessés. » Ce qui expliquerait les états de forme disparates affichés par les joueurs.

La victoire de l'Irlande face à l'Australie (15-6) change-t-elle les enjeux du match face aux All Blacks ?

Dans la perspective d’une qualification pour la finale, la deuxième place de la poule A permettrait au XV de France un parcours prétendument plus abordable en évitant les autres nations du Sud et en se retrouvant dans une moitié de tableau où l’attendraient l’Angleterre, puis le vainqueur de Galles-Irlande. Après la victoire face au Canada, Lièvremont a balayé l'idée d'un éventuel laisser-aller de ses troupes, samedi : « Cela sous-entendrait qu’on lâche le match face aux All Blacks. Et il n’en a jamais été question. Quand bien même il nous permettrait d’évoluer dans un tableau plus facile. De plus, cela reste à prouver, d’autres surprises peuvent arriver. Je ne suis pas non plus persuadé que cette attitude soit adéquate avec l’esprit du rugby. Si on bat la Nouvelle-Zélande chez elle, ce sera un exploit. On va donc essayer de progresser et essayer de gagner cette rencontre. » Le sélectionneur a toute la semaine pour y réfléchir.

Peut-on s'attendre à ce que les Blacks jouent eux aussi avec le frein à main samedi ?

C’est complètement improbable. Même si les Blacks ont dû observer avec intérêt l’acte de bravoure irlandais, ils ne devraient pas lâcher de lest face aux Français. Le peuple néo-zélandais ne le supporterait pas, lui qui n’a pas oublié les retentissants échecs face aux Bleus en 1999 et 2007. L’objectif des joueurs de Graham Henry reste le titre suprême. Mais le décrocher en battant successivement la France, l’Afrique du Sud, l’Australie et pourquoi pas l’Angleterre en finale rendrait leur parcours des plus nobles. Enfin, cette rencontre revêt un caractère symbolique car elle marquera la 100e sélection de Richie McCaw, l’emblématique capitaine maori. Dans l’antre mythique d’Eden Park, où les Blacks avaient conquis leur seul titre en 1987, une défaite ferait mauvais genre.