Du financement participatif à la finale de la Coupe du monde: la folle épopée de l'équipe féminine de rugby du Canada

C'est une épopée digne d'un film. Pour arriver dans de bonnes conditions à la Coupe du monde féminine de rugby 2025, dont le Canada dispute ce samedi la finale contre l'Angleterre, la fédération a lancé une cagnotte sur internet, signe des handicaps du rugby dans le pays malgré un haut niveau de performance.
Ce financement participatif visait un million de dollars canadien (environ 620.000 euros) pour s'ajouter aux 2,6 millions investis par la fédération pour financer le "programme d'entraînement et de préparation idéal" pour les Canadiennes. À la veille de la finale, 95% de la somme a été recueillie.
Un budget bien inférieur aux grosses nations
Le budget est bien en dessous des autres grandes nations du rugby. En France, le budget de la fédération pour le rugby féminin, qui comprend les équipes de France à XV, à 7 et les dispositifs autour des compétitions féminines, s'élève à 10 millions d'euros.
Ce sous-investissement, ainsi que la 24e place occupée par les hommes au classement mondial, fait que le Canada peut être perçu comme un Petit Poucet, alors qu'elle est la deuxième nation mondiale chez les femmes et va vivre une deuxième finale, après 2014.
"Ces trois dernières années, les gens avaient presque oublié qu'on faisait partie du top 4. Maintenant, ils n'ont plus le choix que de nous remarquer", savourait avant la demi-finale, gagnée contre la Nouvelle-Zélande, Tyson Beukeboom déjà présente en 2014.
Une des raisons de cette surperformance réside dans le fait que les internationales évoluent à l'étranger: sur le XV titulaire depuis les quarts de finale, quatre joueuses seulement évoluent au Canada, mais neuf en Angleterre et deux en France. Car au pays, le championnat peine à exister.
Shania Twain en supportrice
"Le rugby au Canada, ce n'est pas tant populaire comparé en Angleterre. (...) Ça me surprend toujours qu'il n'y ait pas de programme en place au Canada", souligne Frédérique Rajotte, ancienne internationale canadienne. "Quand je faisais partie de l'équipe junior canadienne qui est allée à la Coupe des nations, il fallait payer" pour participer, "donc il fallait faire des levées de fonds. C'était vraiment ardu comme processus", se rappelle-t-elle.
Le parcours des Canadiennes a permis d'attirer un peu la lumière sur elles: la finale sera diffusée par CTV2, petite soeur de la populaire CTV, et des stars nationales, comme la chanteuse Shania Twain, ont apporté leur soutien.
"Si on rentre avec un trophée, là oui, ce serait un tournant. Mais tant qu'on n'a pas cette place de numéro un, je pense que ça restera difficile d'avoir un vrai bond", estime la demi de mêlée Olivia Apps. "Ce serait fantastique" d'avoir un championnat professionnel au Canada, rêve Tyson Beukeboom, qui évolue aux Ealing Trailfinders, en Angleterre: "Ça prendra sans doute quelques années, mais c'est clairement un objectif", nécessaire pour "assurer un vrai succès sur le long terme."