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Top 14: Flament, l’ovni du Stade Toulousain, rêve des Bleus

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Thibaud Flament est pressenti pour faire partie la liste de Fabien Galthié annoncée ce lundi pour les tests de l’automne. Le deuxième-ligne polyvalent du Stade Toulousain est la grosse cote du moment et s'est confié pour RMC Sport. Le joueur, qui évoluait encore chez les amateurs en Belgique il y a quelques années, avant de partir en Angleterre pour ses études et d’enchaîner en quelques mois ses débuts chez les pros aux Wasps, est arrivé au Stade Toulousain et y a vécu un incroyable doublé. Rencontre avec un homme au parcours atypique.

Qu’est-ce qui vous a guidé tout au long de votre incroyable parcours?

J’ai toujours voulu faire rugbyman. Quand j’étais petit, c’était vraiment le rêve, puis plus tard au stade de projet. Après, vers 15 ans, là où on commence à faire les choix, je me suis orienté vers ça. J’ai passé mon bac et j’avais trois options: la Belgique, la France ou l’Angleterre. La Belgique ne correspondait pas à ce que je voulais faire. La France, c’était compliqué d’intégrer le système, je n’avais pas le niveau. Et du coup l’Angleterre où je pouvais faire mes études et intégrer les niveaux inférieurs en rugby et me faire monter.

Il faut avoir une sacrée volonté, une certaine confiance en soi pour gravir tous ces échelons, du monde amateur belge au toit de l’Europe avec le Stade Toulousain…

J’avais confiance en moi, oui, mais ce n’était pas mon moteur. C’était plus le plaisir de jouer, de retrouver les copains et oui, c’est un métier qui me plaisait. C’était l’envie de vouloir faire ça qui m’animait. Je suis passionné depuis toujours, les copains, l’ambiance, l’atmosphère, c’est tout ça qui me plaisait et qui me donnait envie de faire ça mon quotidien.

Quand vous prenez un peu de recul pour regarder ce parcours, ne vous semble-t-il pas "dingue"?

C’est sûr que c’est moins classique… j’ai pris un chemin qui m’a amené ici et j’espère que ça peut donner des idées à d’autres pour ne pas se décourager quand, à 14, 15 ans, ils ne sont pas dans les clous à ce moment-là. Donc si ça peut en aider d’autres, tant mieux. Mais en tous cas, chaque étape de ce circuit m’a apporté quelque chose de différent à chaque fois. C’est quelque chose qui fait partie de moi et ça m’a beaucoup aidé à ce moment-là.

"Kiffer et prendre du plaisir dans ce que je fais"

Il y a un tournant dans cette histoire?

L’Argentine (il a passé une année là-bas pour faire un stage dans le cadre de ses études, ndlr). Là-bas, c’était un peu la fougue argentine, l’instinct, la fraternité. De vivre ça au quotidien, c’était fabuleux. De jouer là-bas un an dans un club m’a permis de garder des liens très forts avec des mecs là-bas.

Je discute encore régulièrement avec eux. Et du coup, c’est quelque chose qui était assez spécial mais qui m’a beaucoup apporté. C’est là où j’ai eu un gros déclic. Ouais, j’ai eu mon déclic là-bas. En fait, pour faire simple, je voulais devenir pro, mais je me mettais trop de pression.

Thibaud Flament au contre sur Sébastien Bézy
Thibaud Flament au contre sur Sébastien Bézy © Icon Sport

Je ne profitais pas. Sur le match, aux entraînements, j’étais trop dans ma bulle, trop sérieux. Alors que je voyais mes potes qui s’en foutaient de faire rugbyman, mais qui étaient là pour se marrer. Je me suis dit: putain, il y a un problème! Moi, je veux faire de ça mon quotidien, je ne m’amuse pas alors qu’eux ils se marrent. Donc je me suis analysé moi-même, je me suis dit: je suis plus comme ci, comme ça… là il faut changer, là oui, là non… et du coup j’ai tout axé vers le plaisir.

Et le "goal" ultime du rugby et même après de ma vie c’est vraiment de kiffer et de prendre du plaisir dans ce que je fais. A partir de là, j’ai pris plus de plaisir à m’entraîner, enfin en général même sur le terrain. J’ai construit des liens plus forts avec les mecs, j’ai progressé. Je suis devenu meilleur et tout a commencé à s’enchaîner à partir de là. J’ai commencé à monter les échelons, comme il y avait cinq niveaux là-bas. Donc tout ça m’a beaucoup apporté. Et l’art de vivre en Argentine, c’est quelque chose quand même.

Ensuite, les Wasps vous ont fait plonger dans le professionnalisme?

Ça m’a fait revenir dans un cadre très structuré, très pragmatique. D’ailleurs on me chambre ici, car j’ai toujours mon carnet où je note mes trucs, ça m’aide beaucoup. Au début, c’était vraiment impressionnant car je n’avais jamais côtoyé ça de près auparavant. De voir comment ils fonctionnaient là-bas, de le comparer maintenant à comment ça fonctionne ici à Toulouse, c’est enrichissant.

Et quelques mois après votre arrivée à Toulouse, Vous vivez un doublé. Vous estimez être là au bon endroit, au bon moment?

Oui, il y a beaucoup de cela aussi. C’est le club qui travaille depuis longtemps pour arriver à ça. Dans l’effectif qu’ils construisent, comment ils gèrent le groupe. C’est un travail de plusieurs années qui porte ses fruits. J’étais content de pouvoir apporter ma pierre à l’édifice. Alors oui c’est vrai que sur le papier, ça va vite, mais bon, ce n’est pas… (il s’arrête) je ne sais pas comment le dire, les choses avancent et ça se passe bien. On travaille tous pour un objectif commun. Les choses arrivent ou pas mais en tous cas on a travaillé pour. Je trouve que c’est plus une réussite du club.

Vous avez dit récemment que vous aviez des progrès à faire. Dans quels secteurs?

Il y a plein de choses, mais les points sur lesquels je me concentre, c’est les phases de rucks. Je sens que j’ai une bonne marge de progression pour être plus agressif, plus percutant. Je travaille aussi beaucoup sur les plaquages, le contest, la connaissance de la touche. Il y a beaucoup d’autres secteurs mais ce sont les trois points principaux.

Echangez-vous avec Jerome Kaino, qui est maintenant dans le staff?

Oui, énormément. C’est top. L’année dernière déjà, quand il était encore joueur, je faisais des exercices en plus avec lui, après les entraînements. Mais de pouvoir échanger après les matchs avec lui, sur des actions précises pour savoir ce que lui aurait fait, c’est génial. D’avoir un retour de joueur, enfin d’ex-joueurs il n’y a vraiment pas longtemps. Il y a aussi le retour des coachs, mais j’aime bien aussi avoir un retour de sa part, j’aime bien sa façon de voir le rugby. En plus c’est un bon mec. Pour le club, il est hyper précieux.

Le XV de France, "un rêve"

Que représente le XV de France à vos yeux?

C’est un rêve. C’est très "cliché" de dire ça mais c’est sûr que c’est un rêve. Moi je le prends plus comme une motivation supplémentaire pour bosser, essayer de postuler et pouvoir vivre des moments vraiment uniques.

En six ans, de Waterloo en Belgique jusqu'aux Bleus, le fossé serait immense...

Oui cela peut paraitre rapide… (il marque une pause) je ne sais pas trop quoi dire. Cela se passe bien (sourire)

Et si je vous dis maillot bleu à enfiler, Marseillaise, Coupe du monde?

C’est des frissons surtout! Si un jour je peux chanter la Marseillaise… moi c’est sur des moments comme cela que je me rends compte où je suis et ce qui est en train de se passer. J’ai eu ce flash lors de la finale de Top 14 où justement, on a chanté la Marseillaise avant le début du match.

Je me suis dit "ah ouais c’est ça qui est en train de se passer et je suis là." Ce sont des bons moments, des frissons et quand je vois ceux qui sont passés par le XV de France, l’émotion qu’ils ont pu vivre aussi, c’est spécial. Donc c’est le premier truc auquel je pense. Des frissons et des émotions.

Wilfried Templier