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Top 14 – "Je tombais presque sur Emmanuel Macron", se souvient Médard au moment de soulever le Brennus

Maxime Medard à droite du bouclier de Brennus. Emmanuel Macron doit être quelque part en dessous

Maxime Medard à droite du bouclier de Brennus. Emmanuel Macron doit être quelque part en dessous - AFP

Avant de clore cette année 2019, le Toulousain Maxime Médard revient sur cette année chargée pour lui et les Toulousains. Le Bouclier de Brennus, son 4e personnel, la liesse avec les supporters, mais aussi la Coupe du Monde au Japon et ce quart de finale imperdable face au Pays de Galles. Avec quelques anecdotes de la vie des groupes dans lesquels l’arrière a évolué cette année.

Dans les moments qui ont compté pour le Stade Toulousain cette saison, la victoire en quart de finale de Coupe d’Europe au Racing 92 doit être en bonne place…

Oui, c’est un moment très important. Cela faisait un moment qu’on n’allait pas plus loin qu’un quart de finale dans plusieurs compétitions. Gagner, à l’extérieur, au Racing, qui en plus dit depuis plusieurs années qu’il veut gagner la Coupe d’Europe, à 14 qui plus est, c’est vrai que pas mal de choses nous souriaient à ce moment-là.

Est-ce un des matchs les plus plaisants de la saison?

Oui, un match plaisant. Moi j’étais content car quand tu es ailier et que tu marques, c’est toujours super (sourire). Et en plus c’était vraiment particulier, dans cette enceinte de l’Arena, il y avait beaucoup de Toulousains. Ceux qui habitent à Paris étaient venus nous supporter et on sentait, à l’extérieur en voyant tous ces drapeaux ou même quand on est rentré dans les vestiaires et quand on a vu des affiches, que tout le monde était derrière nous. Que ce soit les gens salariés du club, les supporters, on sentait que quelque chose nous poussait à un jour magnifique. Nous, l’équipe, on devait augmenter notre niveau et être performant ce jour-là.

Il y a eu ensuite une montée en puissance de l’équipe…

Après la défaite à domicile face à Castres à l’aller, on s’est posé les bonnes questions avec le staff et les leaders. On a réfléchi sur notre rugby, notre façon de marquer des points au bons moments. Et pleins de choses, mentalement, qu’il fallait gérer. On a mis en place certains lancements qui nous ont permis de retrouver de la confiance sur certains matchs. C’est un tout et au final, progressivement, il n’y a plus eu d’égo dans l’équipe. Jeunes, vieux, tout le monde pouvait prendre la parole, s’amuser. Vraiment une bande de potes.

Vous avez senti cette évolution?

Oui. Match après match, te ne sentais plus de doute. Il y avait de la confiance, mais pas de la confiance déplacée. On voulait mettre notre jeu en place et écrire notre histoire. Et surtout, passer dans une nouvelle ère du Stade Toulousain.

Cette confiance vous a-t-elle guidée lors des phases finales?

Oui, mais beaucoup de choses se sont faites naturellement. La veille de la finale, alors que nous étions dans un château à la campagne, à l’extérieur de Paris, il y avait des mecs qui jouaient à la pétanque, d’autres au ping-pong. Tu ne sentais pas que tu allais jouer une finale. C’est aussi à nous, aux anciens, de s’adapter parce qu’on n’avait pas forcément connu ça avec Guy (Novès), mais c’était chouette. Le club nous a aussi permis d’avoir des petits mots de la famille: avant la demi-finale, les dirigeants nous ont fait une vidéo avec des membres de nos familles et c’était assez émouvant. Et on s’est dit qu’on n’allait pas avoir ce genre de choses pour la finale puisqu’ils l’avaient déjà fait. Et quand on est rentré dans notre chambre d’hôtel, on avait des petits mots, des photos de nos familles. Alors je ne vais pas encore vanter les mérites de Didier (Lacroix), mais il nous a permis de grandir chacun, que ce soit dans les bureaux ou nous, l’équipe, sur le terrain. Il a rassemblé beaucoup de gens. Je me souviendrais toujours de sa première réunion, où il nous a dit: "si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous venez me voir". Je pense que c’est bien d’avoir quelqu’un comme ça.

Vous avez gagné votre 4e Bouclier de Brennus en juin dernier. Est-ce toujours la même puissance, la même joie?

Pour ma part c’était encore plus intense. Parce que tu essais de savourer encore un peu plus. Il me reste très peu d’années encore. On a passé sept ans à ne plus avoir de titres, à être critiqués. Et je pense que j’ai savouré ça comme les anciens ont pu le faire en 2008, quand je suis arrivé. Et quand on est arrivé au Capitole, il y avait cette foule. Même avant d’y accéder, il y avait des gens partout, c’était la folie. Au-delà du titre, je pense qu’on a vraiment, par le jeu qu’on a donné (il s’arrête)… c’était beau à voir. On s’éclatait, on avait beaucoup de plaisir à jouer ensemble. On tentait beaucoup de choses et ça marchait. Donc voilà. C’était magique.

"Au karaoké, Huget ne connaît que les fins de phrases"

Cette année a également été marquée par la Coupe du monde au Japon. Et ce premier match face à l’Argentine. Abordé avec une grosse pression?

Oui. On savait parfaitement qu’il fallait gagner pour aller en quart de finale. Et franchement, on a fait un match… une bonne première mi-temps. Une deuxième plus compliquée. Et il y a ce drop de Camille Lopez qui nous délivre. Mais ce qui était intéressant, c’est que sur la composition d’équipe, il y avait beaucoup de qualité et d’expérience sur le banc. Et franchement, les mecs qui sont rentrés nous ont permis de gagner ce match. C’était intéressant et intelligent.

Vous avez des souvenirs de la dernière pénalité tentée par l’arrière argentin Boffelli?

Oui. Bah dans ces moments, tu croises les doigts, tu regardes Dieu, tu pries, mais tu fais quelque chose! C’était intense. Mais ce jour-là, les dieux du rugby étaient de notre côté. Mais ça reste un bon souvenir, car nous n’étions pas trop appréciés dans les médias, on pensait qu’on allait être écrasé par l’Argentine. Et bien on a montré qu’on pouvait élever notre niveau de jeu.

Comment avez-vous vécu cette Coupe du monde au Japon, un pays si particulier?

C’était super. On n’était pas forcément sollicité en dehors, même si les gens te reconnaissent avec ton style européen. Mais les gens étaient souriants, gentils, respectueux. Parfois fous aussi (sic). Car ils ont pleins de règles, de choses qui ne leur permettent pas de s’exprimer. Et d’un autre côté, ils choisissent une passion et ils ont besoin de profiter un peu de la vie.

Comme le karaoké. Avez-vous testé?

Oui, j’ai testé une fois. Et je pense que j’aurais dû le faire encore plus. Parce que franchement, ça m’avait permis de lâcher beaucoup de choses. C’était avant le match face au Pays de Galles. On avait dix jours devant nous, un soir nous sommes allés au karaoké. C’était surprenant. Il y avait les Champs- Elysées, du Johnny aussi. Aznavour.

Qui est le meilleur au karaoké?

Barrassi est très bon. Yoann Huget aussi. Mais c’est bizarre parce qu’il ne connaît que les fins de phrases en fait. Ou les refrains (il rigole franchement).

Et qui ne doit pas y retourner?

Rabah Slimani. Il était à côté de moi et franchement, il ne connaissait rien (il rigole de nouveau).

"La France a un bel avenir pour plus tard"

Plus sérieusement, il y a ensuite le quart de finale face au Pays de Galles. L’avez-vous revu?

Non. Ce sont des matchs, comme la finale face à la Nouvelle Zélande en 2011, que je n’ai pas forcément envie de revoir. Franchement, on a fait un match de fou. C’est un match dont on peut être fiers. Le meilleur de notre compétition. Tu termines à 14, on tient, on tient et on subit cet essai à la fin. Après, en 2011 (en demi-finale), quand on était passés, les Gallois avaient pris un carton rouge. C’était l’effet inverse. C’est bizarre la vie. Mais on n’a pas de regret sur ce match parce qu’on a tout donné. On est déçus, parce qu’on a fait qui ce fallait. Et quand on est rentré en France, les gens étaient fiers de nous. On aurait aimé aller jusqu’en finale. Car sur des matchs couperets, t’es capable d’aller jusqu’au bout.

Qu’est-ce qui vous fait dire ça?

Parce que grâce à certains joueurs, on avait réussi à créer une ambiance particulière. Une bande de potes aussi. Les jeunes, les anciens. C’était un mix et c’était génial. Malheureusement, on ne passe pas ce quart de finale, mais je pense qu’on avait vraiment les capacités pour aller jusqu’au bout. Après il aurait fallu éliminer les Sud-Af’ en demi… bon avec des si on peut faire beaucoup de choses. Mais je pense vraiment que la France a un bel avenir pour plus tard.

L’image de 2019?

Quand je soulève le Bouclier avec Julien (Marchand). J’ai eu la chance de pouvoir être à ses côtés. Un moment magique. Les années précédentes (2008, 2011, 2012, ndlr), j’étais devant. Il faut bien se placer! Après, honnêtement, j’ai demandé si ça gênait Julien ou Jerome (Kaino). Je ne l’aurais pas fait si j’avais eu deux ans de club. Je respecte un minimum le statut, les joueurs, les gens. Mais c’était énorme. En plus je tombais presque sur Emmanuel Macron! Il y avait la sécurité qui me poussait! C’était bizarre mais c’était chouette.

Propos recueillis par Wilfried Templier