L’Irlande joue la belle indifférente

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Après l’indignation, l’indifférence ! Ou presque. Trois mois après la main de Thierry Henry, lors des barrages de la Coupe du Monde 2010, les Irlandais sont de retour au Stade de France. Pour encourager leur équipe de rugby. Ce samedi, à 17h30, le XV du Trèfle défie le XV de France pour le compte de la deuxième journée du Tournoi des Six Nations.
A cette occasion, l’enceinte dionysienne accueillera une nouvelle marée verte. Avec un arrière-goût de revanche ? Pas sûr. « En Irlande, on a très peu évoqué l’action d’Henry ces derniers jours, témoigne Jerry Thornley, journaliste au Irish Times. Il n’y a pas eu de référence dans les médias. En conférence de presse, aucun membre de l’équipe n’a abordé le sujet. Les deux sports sont différents. Les supporteurs le sont également. En football, nous sommes un pays modeste alors qu’en rugby, nous avons remporté le Grand Chelem l’an passé. »
Seul le capitaine Brian O’Driscoll a commenté publiquement le geste de l’attaquant du Barça, en déclarant en substance que « l’erreur est humaine ». C’était au lendemain de la rencontre. Depuis, le pays des sports gaéliques a fait son deuil du Mondial sud-africain. Et même si le capitaine des Bleus reste un sujet tabou, la rancune n’est plus tellement présente chez les Irlandais. « Le souffle est retombé, assure Pascal Boniface, géopolitologue et spécialiste des questions sportives. Le tsunami qui avait saisi l’Irlande dans les jours qui ont suivi le match s’est largement estompé. »
Une analyse partagée par Trevor Brennan, l’ex-rugbyman irlandais. « Chez nous, la déception a été énorme après ce match. On a vécu une grande injustice. Mais aujourd’hui, on ne parle que de rugby. Pas du tout de revanche. Le football, c’est autre chose », explique l’ancien joueur du Stade Toulousain.
« Le contexte n’est pas le même »
Malgré tout, ces retrouvailles entre les deux nations restent un moment particulier. « On y fera bien sûr référence. Comme à chaque fois que les Français croiseront les Irlandais, concède Boniface. Michel Platini a lui-même fait une plaisanterie à ce sujet lors du tirage au sort des éliminatoires de l’Euro 2012. Mais en rugby, je ne pense pas que ça puisse prendre les mêmes proportions. Le contexte n’est pas le même. »
Effectivement. En novembre dernier, c’est l’Irlande du Sud qui a été éliminée par les Bleus. Alors que ce week-end, le XV de France affronte l’Irlande unifiée. « En rugby, les Irlandais privilégient l’unité du peuple. Alors qu’en football, ils gardent le découpage entre les territoires du Nord et du Sud. C’est un cas unique », décrypte Boniface. Quoi qu’il en soit, revanche ou pas, la bande à Dusautoir peut s’attendre à un rude combat face aux hommes de Declan Kidney. « Ils ont l’ambition de réaliser un nouveau Grand Chelem cette année, souffle le capitaine français. Donc je ne pense pas qu’ils aient besoin de la main de Thierry Henry pour se motiver. »