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XV de France : faut-il vendre le maillot des Bleus ?

Le XV de France

Le XV de France - AFP

Bernard Laporte, candidat à la présidence de la Fédération française de rugby (FFR), veut innover avec l’apparition d’un sponsor sur le maillot du XV de France. RMC Sport a demandé l'avis à deux grands anciens capitaines, Jean-Pierre Rives et Philippe Saint-André, ainsi qu’à un économiste du sport.

« C’est une bonne chose de vendre le maillot de l’équipe de France à un beau fleuron français ». Jeudi soir à Bègles, Bernard Laporte a lancé une idée novatrice et souhaite bousculer l’histoire du XV de France s’il est élu président de la Fédération française de rugby. Jamais le maillot des Bleus n’a en effet affiché un sponsor. « Cela vaut entre cinq et dix millions d’euros, qui seront mis à disposition du Fonds du développement du rugby (FNDR) », a justifié l’entraîneur du RC Toulon.

Rives : « Ce maillot, c’est une seconde peau »

Destinée à accompagner les clubs dans la formation des jeunes, et dans la valorisation du rugby féminin, cette manne financière mettrait en tout cas fin à une tradition : celle du maillot de la sélection nationale vierge. Alors sacrilège ou bon sens économique ? « Ce maillot, c'est une seconde peau. Qu'il y ait un sponsor sur le maillot, ça ne me dérange pas à condition de ne pas y laisser sa peau, de ne pas la vendre n'importe comment », confie à RMC Sport Jean-Pierre Rives (59 sélections), ancien capitaine des Bleus, qui a participé à la création du dernier maillot.

La France, la dernière équipe du Tournoi sans sponsor

Lors du dernier Tournoi des VI Nations, la France était la seule à ne pas afficher de sponsors sur sa tenue. Une hérésie pour l’ancien sélectionneur Philippe Saint-André (69 capes en tant que joueur), qui rejoint la pensée de Laporte : « C’est une chose logique et normale de vendre le maillot. On était les derniers mohicans sans sponsors. C’est nous qui avions le moins de moyens sur la planète mondiale, sur la disponibilité des joueurs et l’accès aux joueurs. A un moment donné, il faut faire des choses pour pouvoir rivaliser avec les autres nations. C’est bien des fois de vendre les bijoux de famille. »

« Dix millions, c’est dur à atteindre »

Et combien pourraient donc rapporter ces « bijoux de famille » ? Bernard Laporte estime le gain potentiel « entre cinq et dix millions d’euros ». Réaliste ? « Récupérer cinq millions en sponsoring, ça ne me semble pas impossible, dix millions, c’est peut-être ambitieux », explique Jean-François Nys, spécialiste de l’économie du sport, maître de conférence à l’université de Limoges et directeur adjoint de l’IAE. « Cinq millions, ça situe le maillot de l’équipe de France au niveau d’un maillot de club de foot de Ligue 1 de rang moyen. Le XV de France a une notoriété, l’image du rugby est positive. Alors cinq millions, ce n’est pas trop ambitieux. Mais dix millions, c’est dur à atteindre. On est dans une période difficile pour le sponsoring. »

« Tous les sponsors ne sont pas acceptables »

D’autres joueurs, du passé ou du présent, seront quand même peut-être hostiles à « sacrifier » le maillot tricolore. « Tous les sponsors ne sont pas acceptables, c’est sûr. Il faut que cela valorise aussi l’équipe », précise Jean-François Nys. Alors, vers quel type de partenaires pourrait se tourner la FFR en cas d’élection de Bernard Laporte ? « La nourriture, la cochonnaille, ça me semble trop marqué. On peut imaginer des opérateurs de voyage, ce qui fait un peu rêver. Difficile aussi d’imaginer des marques de luxe, qui peut-être ne s’accordent pas avec l’image du rugby. Comme l’équipe de France est amenée à voyager, on peut imaginer des grands tours opérateurs ou des compagnies aériennes type Air France ou autre », conclut le spécialiste de l’économie du sport. De quoi faire redécoller le rugby français ?

D.W avec L.D et M.G