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Biathlon (Oslo): "C'est un accomplissement", savoure Julia Simon après son sacre

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5e du sprint ce samedi à Oslo, Julia Simon (26 ans) a officiellement remporté son premier gros globe de cristal. Un "accomplissement" pour la biathlète des Saisies, en quête de régularité après plusieurs saisons à faire le yo-yo.

Ça y est, vous êtes la meilleure biathlète du monde...
J'ai encore du mal à me rendre compte... Pour moi, ce sprint était une course comme une autre. Bien sur que j'étais consciente de l'enjeu, il y a avait de la pression. J'avais un peu les jambes fébriles aujourd'hui mais j'essayais vraiment de me concentrer sur ce que j'avais à faire. Et là j'ai encore du mal à me rendre compte. Je suis quelqu'un qui a du mal à laisser aller et je pense que du coup il va falloir que la course de demain soit terminée pour que je me rende compte que c'est bon, c'est fini. Ça commence à devenir réel avec tout le monde qui m'en parle. C'est fou, pour le moment je n'ai pas les mots, je pense que ce sera plus facile demain.

Quand vous franchissez la ligne, vous savez que c'est gagné? 
Non, je ne savais pas. J'avais dit à Cyril (Burdet l'entraîneur des filles, ndlr) après les Mondiaux que je ne voulais pas qu'ils m'annoncent les écarts sur la piste avec les rivales pour le globe, qu'on m'annonce les écarts comme sur une course normale avec celles qui sont devant. Je ne veux pas faire la course au globe je veux faire ma course. Et c'était pareil aujourd'hui. J'ai juste vu Dorothea après la course qui disait qu'elle était 13e et je me suis dit 'ok c'est fait'. Mais sur le moment, je fais ma course et j'essaye de ne pas me 'polluer l'esprit', ne pas laisser passer ces pensées qui peuvent emmener de la fébrilité au tir. J'en avais déjà assez, mes jambes étaient un peu plus fébriles que d'habitude. Mais j'ai su gérer cette pression, et j'ai prouvé que ma régularité c'était quelque chose de très important cet hiver et que j'ai mérité ce maillot.

Mais on ne vous voit pas exploser de joie, décompresser... 
Ça ne se passe pas comme ça, il n'y a pas un bouton on/off. Je pense que la décompression arrivera demain et encore je ne sais pas, parce qu'il y a une tournée des médias et ce n'est pas mon élément. C'est limite le truc qui me stresse le plus.

Si on vous avait dit à l'automne que vous remporteriez le gros globe...
Je ne l'aurais pas cru du tout. Je voyais à l'automne que mon tir se stabilisait, que je tirais de mieux en mieux en mieux, mais je n'aurais jamais pensé être capable de pouvoir tenir ça une saison, vraiment une saison complète en ayant une moins bonne perf qui doit être une 18e place à Antholz. Je n'aurais jamais pensé pouvoir faire autant de cérémonies des fleurs (qui récompense les six premières de chaque course), monter autant de fois sur le podium. J'aurais trouvé ça prétentieux de dire ça, je ne l'aurais pas cru. J'ai eu des moments de doute aussi cet hiver. Des moments où je suis tombée malade ou j'étais moins bien, mais ne pas en parler, de pas laisser passer le doute, de continuer à continuer à suivre ma ligne que je m'étais tracée et de faire mon faire mon taf en silence, bien focus sur ce que j'ai à faire.

Vous avez changé de statut cette saison, c'est aussi une fierté d'avoir tenu tout le long de l'hiver avec ce dossard jaune?
Une fierté personnelle, je n'ai pas envie de me pavaner avec le maillot et de dire c'est moi qui l'ai. Ce n'est pas ça pour moi le plus important. La fierté, c'est d'avoir dit en début d'année à Polo (Jean Paul Giacchino, l'entraîneur du tir): 'Je veux être régulière et d'avoir réussi à le faire'. Avoir réussi à cocher mes objectifs de l'hiver, arrêter d'avoir ces hauts et ces bas. C'est ça ma plus grande fierté et ce n'était pas facile. Cet hiver j'avais l'impression que tout était presque plus facile et c'est un sentiment très agréable. Si il faut surfer là dessus, je sais très bien que quand je reviendrai au printemps après une pause un peu plus longue que prévu, je sais très bien qu'il faudra retourner au travail et que ce qu'il s'est passé sera complètement effacé et il faudra repartir à zéro. Sinon c'est le meilleur moyen de se prendre une grosse claque.

Ça donne quelles sensations de réussir tout ça?
J'ai eu des moments de doute quand même, même si je n'en ai pas parlé. Il y a eu ce Covid, je ne savais pas comment mon corps allait réagir. J'ai pris les choses avec beaucoup de légèreté et de recul. J'ai mûri un petit peu et par exemple au lieu d'aller faire une séance alors que je ne me sentais pas bien, je me suis laissée plus de recul en me disant: 'aujourd'hui ce n'est pas grave de ne pas t'entraîner car tu es moins bien'. J'ai appris à m'écouter un peu plus et ça m'a permis de tenir sur la longueur.

Vous allez faire quoi en rentrant à la maison?
Je vais surtout prendre le temps d'aller voir la famille et les amis. C'est ce qui me fera le plus de bien. Mine de rien, depuis deux ans, c'était un peu compliqué avec le Covid. C'est fou, c'est toujours un peu dans nos têtes. Je vois ma famille proche avec mes soeurs, mes parents, et j'aimerais bien retourner voir mes cousines, voir mes potes et vraiment profiter de tout ça. Et ne pas prendre le boulard parce que ça peut vite faire un retour de manivelle. Rester sur terre et voir les gens pour qui je n'ai pas changé parce que tu sors d'une tournée médiatique tu as vite fait de te prendre pour quelqu'un d'autre. Rentrer à la maison c'est le meilleur moyen et c'est très important pour moi.

Il représente quoi ce gros globe? C'est un accomplissement? 
Sportivement parlant c'est un accomplissement. Et la manière que j'ai mis pour accomplir ça aussi, cette régularité, c'est un accomplissement et c'est ce qui m'apporte le plus de fierté. D'avoir réussi à mettre la manière, ne pas avoir eu de grosse craquante comme je pouvais faire les années d'avant.

Propos recueillis par Julien Richard, à Oslo