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"Les grognons qui restent au coin du feu vont dire que c'est plus ce que c'était": comment Starlink et Elon Musk ont révolutionné le Vendée Globe

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Certains skippers du Vendée Globe se sont équipés du réseau Starlink. Un réseau 5G haut débit, disponible en mer grâce aux satellites du groupe détenu par Elon Musk. Les skippers, comme Fabrice Amedeo (Nexans – Wewis) et Yannick Bestaven (Maître Coq V), utilisent cette installation qui leur permet de télécharger des fichiers météo précis et de communiquer avec leurs proches de manière rapide. 

"C'est une forme de liberté exceptionnelle, je peux avoir ma famille, je peux télécharger un fichier météo précis et le reste du temps, j'éteins Starlink." Fabrice Amedeo (actuellement 35e), utilise le réseau Starlink à bord de son Imoca. Une installation qui lui a même permis de commander un McDo à distance pour ses filles à Vannes.  

“On peut faire une analyse des fichiers plus pertinente, donc faire plus de stratégie.”  

Connexions, audio et vidéo, parfaites. Les skippers bénéficient en mer d’un accès rapide à l’information météorologique précise et au secours si besoin. “Ça permet de télécharger des fichiers météo assez importants pour anticiper. Par exemple, la grosse dépression qui arrive, on l'avait vue depuis longtemps”, souligne Yannick Bestaven, actuellement 8e.  

La transmission instantanée de toutes les données et de leur quotidien, permet à leurs équipes de suivre de manière précise l’évolution du skipper depuis la terre. C’est aussi un moyen de "faire vivre au public notre aventure", se réjouit Yannick Bestaven qui vit son troisième Vendée Globe.   

Sur le plan personnel, ça permet de garder un lien avec sa famille. Une joie pour Fabrice Amedeo: "Je peux appeler en visio ma femme et mes enfants tous les soirs." Tandis que Yannick Bestaven, met en garde sur les risques que cela peut représenter : "j'ai deux filles que j'appelle de temps en temps. Ça fait plaisir de les voir et elles me racontent un peu leur vie. Mais je n'en abuse pas trop parce qu'il y a le fait d'appeler puis de raccrocher. On est tout seul après."  

Une connexion rapide et parfaite à moindre coût 

En 2016, lors de son premier Vendée Globe, Fabrice Amedeo était parti avec le système "Immarsat" qui permettait d'avoir le téléphone et ses mails sur l'ordinateur. Ce système comprenait 11 gigas pour un peu plus de 20.000 euros. Pour le Vendée Globe 2020, tout le monde était parti avec le système "Certus" de Tales qui permettait d'avoir le wifi à bord, donc Whatsapp. "Il m'avait coûté 15.000 euros en télécommunications sans haut débit et là cette année, avec Starlink, ça me coûte 300 euros par mois avec une connexion illimitée”, explique Yannick Bestaven.  

Ce réseau a tout de même un coût d'installation de 5.000 euros. “C’est un système tellement récent, pour lequel il a fallu tout inventer afin de réussir à le mettre sur les bateaux”, explique Benoît Marsille, gérant de ROM-arrangé, mais “techniquement, c’est révolutionnaire.” Il a fallu répondre à pas mal de questions avant de faire le choix d’embarquer avec ce système sur une course au grand large. “La plus importante est celle de la consommation électrique. Ça consomme six fois plus que les systèmes concurrents, car la bande passante est décuplée donc bien meilleure”, développe le gérant de ROM-arrangé. Cette très récente avancée a même valu à certains de prendre une décision de dernière minute. Jusqu'à une semaine avant le départ, ROM-arrangé a installé des Starlink. 

"Malgré ça, on est tout seul en mer donc ça ne change pas. Et puis s'il y a un souci, pour venir nous chercher ça sera toujours aussi long", rappelle tout de même Yannick Bestaven.  

"C'est l'évolution, ce qui est arrivé à terre, arrive en mer" 

Au départ, le réseau Starlink n’était pas intégré dans les options des bateaux. Dans un premier temps, les skippers n’étaient pas sûrs de pouvoir s’en munir, car ils pensaient que l’antenne ne serait pas marinisée et pas étanche. Certains ont sauté le pas, un choix payant même si il ne va pas sans certaines critiques, car à commander des McDo sur Uber Eats, le mythe du marin solitaire en prend un coup.  

“Certains râlaient sur les réseaux, en disant, ce ne sont plus des marins, ils sont hyperconnectés. C’est les mêmes qui sont les premiers à gueuler si vous leur coupez la 5G et vous les remettez au minitel”, ironise Yannick Bestaven.  

"Les grognons qui restent au coin du feu vont dire que c'est plus ce que c'était, mais moi je l'allume quelques minutes par jour à bon escient, et ça ne m'empêche pas de déconnecter et d'être très heureux sur son bateau", retoque Fabrice Amedeo. 

Domitille Cortès