Vendée Globe 2024: Maxime Sorel, le marin qui ne veut pas décevoir

Avec sa tête blonde d’angelot, on a du mal à imaginer Maxime Sorel, la clope au bec, allongé sur la plage de Cancale en pleine nuit avec ses copains de collège. Et pourtant c’était bien lui. "Mais j’étais un rebelle gentil", s’amuse le marin qui met les voiles aujourd’hui pour son deuxième Vendée Globe. Entre le grand frère Jérémy et la petite sœur Charline, "Max", comme l’appellent affectueusement la plupart des spectateurs présents sur les pontons des Sables-d’Olonne, a eu un passage en adolescence un peu compliqué quand les chemins d’Éric et Sylvie, les parents, se sont séparés.
"Il n’a pas bien vécu cette période-là", explique son grand-frère. "Il était dur. À l’école il s’en foutait, il faisait les 400 coups avec des potes. Il est parti vivre seul avec notre père à la fin du collège." Le virage est radical. Le Cancalais s’installe autour de Rennes avec une ligne rouge du paternel à ne pas dépasser: "Je te prends avec moi mais tu ne me déçois pas". Les mots font mouche. "Je suis passé du cancre à l’intello de service", sourit Sorel.
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Entre père et mère avant d’être entre terre et mer
"Ça a construit beaucoup de choses. C’est pour ça que je mets tant d’énergie à tout essayer de réussir. J’ai toujours peur que quelqu’un soit déçu. J’ai parfois un peu l’impression de penser plus aux autres qu’à moi, même seul au milieu de l’océan."
Mais avant de partir sur l’eau, Maxime Sorel est avant tout un passionné d’athlétisme, avec une spécialité au lycée, la perche. Sans doute cette obsession d’aller toujours voir plus haut. "J’adorais la physique, les matchs et le sport, mais pas le reste. Et avant d’avoir eu mon bac je ne savais pas ce que je voulais faire. Je bossais depuis l’âge de 16 ans dans les travaux publics. J’étais dans la tranchée à pousser des cailloux ou à conduire des rouleaux-compresseurs…" Toutes ces rencontres vont amener Maxime au diplôme d’ingénieur en génie-civil spécialisé dans les travaux maritimes, puis à un défi, faire une transat. Ça sera la route du Rhum 2014.
La voile depuis 10 ans, l’Everest depuis dix-huit mois
S’il a tiré ses premiers bords près de Cancale dès son plus jeune âge, "Max" n’a jamais pensé en faire son métier et c’est en se lançant ce défi qu’il va changer de vie et un peu celle de ceux qui l’entourent. Dans l’univers de Maxime Sorel, il y a tout proche son frère Jérémy, aujourd’hui team manager de l’équipe, qu’il embarque rapidement avec lui. Depuis une décennie, l’ancien éducateur sportif a vu l’évolution.
"Il est hyperactif et jusqu’au-boutiste. Ce qui fait qu’aujourd’hui il arrive à titiller les plus grands. Notre point faible c’est de ne pas toujours savoir déléguer. Mais son point fort c’est que dans l’équipe tout le monde est derrière lui pour vouloir l’aider. Il me surprend vraiment. Je n’arrive pas à savoir où il va chercher cette force dont il a besoin." Une force qui lui a permis de devenir le seul homme sur terre à boucler un double Everest. Celui des mers, le Vendée Globe, et le véritable Everest, dans l’Himalaya, gravi en avril 2023.
Franchir un cap mental
Entre ses deux Vendée Globe, la vie du marin a donc changé. Celle du terrien également depuis qu’il partage la vie de la discrète Candice entre Lorient et Concarneau. Car avec son équipe technique, Maxime Sorel a pris ses quartiers dans les hangars de la société "Kairos" de Roland Jourdain dans le Finistère.
"Bilou", 3e du Vendée Globe en 2001, se devine quelques points communs malgré deux décennies d’écart. "Nous ne sommes pas dans l’intimité complète avec Max mais je pense qu’il se met une grosse pression. En plus il faut qu’il s’invente un avenir en trouvant de nouveaux sponsors. Je me vois parfois en le regardant. On essaye de faire bonne figure, d’être bons partout. On a une équipe à faire vivre, on est dans l’excellence et on sait que le diable se cache dans les détails." Résultat: le sac est parfois un peu lourd à porter. Mais pour Jourdain, le Breton ne doit pas se laisser envahir par tout ça. "J’aimerais qu’il prenne du plaisir et retrouve les racines de ce qui l’a amené à prendre la décision de se lancer. Les débuts de courses sont importants, j’espère qu’il va bien passer le cap Finistère, et le cap mental." Comme s’il n’y en avait pas assez sur un tour du monde voici donc un cap de plus à franchir pour Maxime Sorel. Un défi de plus dans la collection en attendant les prochains qui trottent déjà dans la tête du skipper.