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Comment Killian Hayes, le Français drafté le plus haut de l'histoire, a enfin lancé sa carrière NBA

Choisi en septième position de la draft en 2020, du jamais-vu pour un Français, Killian Hayes a vécu deux premières saisons très délicates sous le maillot des Détroit Pistons. Mais, alors qu’il s’apprête à disputer le NBA Paris Game à l’Accor Arena ce jeudi contre les Chicago Bulls (21h), l’ancien joueur de Cholet Basket a connu un véritable déclic en plein cœur de l’hiver.

Au moins jusqu’au mois de juin prochain et l’avènement programmé du phénomène Victor Wembanyama, il est le Français drafté le plus haut dans toute l’histoire de la NBA. Lorsqu’il a été choisi en septième position par les Détroit Pistons en 2020, Killian Hayes (21 ans) a fait son entrée dans la Grande Ligue accompagné de nombreuses promesses. Mais aussi des attentes qui vont avec.

Depuis son arrivée sur les parquets de NBA, l’ancien joueur de Cholet Basket a eu mille peines à concrétiser tous les espoirs placés en lui. Pourtant, à l’inverse de prospects partis trop tôt tenter l’aventure américaine, le meneur est arrivé au pays de l’Oncle Sam avec un solide bagage. Au moment de sa draft, il avait déjà effectué deux saisons complètes en professionnel (Cholet Basket en 2018-2019, Ratiopharm ULM, en D1 allemande, en 2019-2020), à chaque fois dans la peau d’un titulaire.

Dans son entourage, la présence de son père, DeRon Hayes, était également de nature à rassurer sur sa capacité à appréhender le grand saut. Lui-même professionnel, DeRon Hayes a évolué très longtemps en France (Cholet, JL Bourg, Nancy, Limoges…) et jouait encore en Nationale 3, le cinquième échelon français… à 45 ans. Mais l’acclimatation de Killian Hayes à la plus grande ligue de basket au monde a mis plus de temps que prévu.

Sa première saison sous le maillot des Pistons, en 2020-2021, s’interrompt après seulement 26 matchs. En janvier 2021, une blessure à la hanche le contraint à déclarer forfait jusqu’à la fin de l’exercice, sans que l’ancien Choletais n’ait eu l’opportunité de monter en puissance d’un point de vue statistique (6,8 points, 2,4 rebonds, 5,3 passes décisives). De retour sur les parquets au début de la saison 2021-2022, le Français a dû faire face à un nouvel obstacle: lors de la draft 2021, son équipe avait choisi de miser sur Cade Cunningham, annoncé comme une superstar en devenir et évoluant… au même poste que lui.

Casey avant le début de la saison: "Il est temps de grandir"

Malgré l’arrivée de Cunningham, Hayes n’a pas perdu la confiance de son coach et son temps de jeu est resté identique à celui de la saison précédente (environ 25 minutes de jeu). Sauf que ses statistiques et son influence sur le jeu des Pistons, l’une des pires équipes de la Ligue, n’ont toujours pas décollé. Pointé du doigt pour la faiblesse de son tir extérieur (environ 27% à trois points sur ses deux premières saisons), Hayes perd peu à peu du crédit et la draft à la cinquième place de Jaden Ivey, un autre arrière ultra-prometteur, sonne comme un nouveau désaveu. D’autant que les premiers tacles de son coach finissent par tomber.

"Il ne joue pas au même niveau qu’en présaison. On doit trouver pourquoi. Il se met beaucoup de pression sur lui-même alors qu’il n’en a pas besoin. Il est temps de grandir", lance Dwane Casey, le coach des Pistons, en octobre dernier. Les premières semaines de la saison 2022-2023 ont pourtant tout d’un long chemin de croix pour le Français, qui doit se contenter d’une grosse quinzaine de minutes en sortie de banc pour des statistiques faméliques (2,5 pts de moyenne sur le mois d’octobre). Mais un événement va faire basculer le cours de la saison du Français à la mi-novembre: la grave blessure de Cade Cunningham, victime d’une fracture de stress au tibia et absent plusieurs mois.

La blessure de Cunningham a tout changé

Comme souvent dans le sport, le malheur des uns fait le bonheur des autres. Avec la blessure de Cunningham, Hayes retrouve une place de titulaire et ne cesse de monter en puissance: 9,8 pts et 5 passes de moyenne en novembre, 12,1 pts et 6,6 passes en décembre puis 14,6 pts et 8 passes depuis le début du mois de janvier (7 matchs). Surtout, le meneur tricolore a été capable de sortir plusieurs cartons offensifs, histoire de marquer les esprits (22 points, 8 passes le 12 décembre contre Dallas, 25 pts, 8 passes, 7 rebonds le 15 décembre à Charlotte, 26 points, 6 passes le 8 janvier face à Philadelphie…).

L’évolution des statistiques de Killian Hayes depuis son arrivée en NBA

Saison 20-21: 6,8 points, 2,4 rebonds, 5,3 passes décisives, 1,0 interception en 25,8 minutes
Saison 21-22: 6,9 pts, 3,2 rbs, 4,2 passes, 1,2 interception
Saison 22-23: 10,0 pts, 2,8 rbs, 5,7 passes, 1,3 interception
Depuis un mois: 13,2 pts, 2,9 rbs, 6,9 passes, 1,8 interception

"Mon rôle a un peu changé, j’ai commencé à starter avec la blessure de Cade (Cunningham) et mes tirs ont commencé à rentrer, a confié Hayes auprès de RMC Sport mardi, à deux jours du NBA Paris Game à l’Accor Arena face aux Chicago Bulls. J’ai de plus en plus de confiance, le coach me fait confiance, mes teammates (coéquipiers) me font confiance, et ça continue. Je prends les mêmes shoots qu’avant mais ils rentrent."

Les plus sceptiques mettront en avant le fait que Cade Cunningham va finir par sortir de l’infirmerie - son retour est prévu pour le début de la saison prochaine - et que le meneur français ne sera pas dans de telles dispositions indéfiniment. Mais personne n’effacera les performances réalisées par Hayes depuis maintenant plus de deux mois et, que ce soit aux Pistons ou ailleurs, le septième choix de la draft 2020, sous contrat garanti jusqu’en 2024, a prouvé qu’il avait le niveau pour exister en NBA.

Objectif Coupe du monde avec les Bleus

Maintenant que le déclic a eu lieu sur les parquets américains, Hayes se sent prêt à aider l’équipe de France durant l’intersaison. Après avoir défendu le maillot tricolore chez les jeunes, Hayes n’est plus réapparu en Bleu depuis son départ en NBA et a même refusé une invitation pour être partenaire d’entraînement de Rudy Gobert, Evan Fournier & Co avant les JO de Tokyo, à l’été 2021. Mais les choses ont vraisemblablement changé et il vise désormais une place dans le groupe pour disputer la prochaine Coupe du monde, prévue du 25 août au 10 septembre prochain en Indonésie, au Japon et aux Philippines.

"C’est quelque chose que je veux faire, je veux aller aux Championnats du monde cet été. Après, comme tout le monde, si je veux y aller, il faut que je gagne ma place, que j’aille au camp d'entraînement, a-t-il indiqué au micro de RMC Sport en marge du NBA Paris Game. C’est quelque chose que j’ai besoin de faire et que je veux faire. La place n’est pas donnée, il faut que je la gagne." Une grande performance ce jeudi devant le public français de l’Accor Arena pourrait être un bon début.

Felix Gabory Journaliste RMC Sport