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NBA: "Ça va monter plus haut", après ses 50 points, jusqu'où peut aller Victor Wembanyama?

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Stephen Brun, le consultant basket de RMC Sport, analyse le match historique de Victor Wembanyama. Le géant français de 20 ans a inscrit 50 points lors de la victoire de San Antonio face à Washington dans la nuit de mercredi à jeudi en NBA (139-130). Une performance XXL qui en appelle d’autres pour notre spécialiste de la balle orange.

Stephen Brun, que vous inspire les 50 points inscrits par Victor Wembanyama lors de la victoire de San Antonio face à Washington, dans la nuit de mercredi à jeudi en NBA (139-130)?

"Quand tu as une énorme adresse à 3 points, ça facilite la tâche. A 8/16, tu peux faire un énorme carton. On attendait la grosse perf’ du début de saison de Wemby au scoring. Il était un peu en détresse au niveau de l’adresse à longue distance, mais il continue à prendre beaucoup de tirs à 3 points. On avait pu douter de cette tactique au début, et finalement, on s’aperçoit que Gregg Popovich (son coach) a encore une fois raison, puisqu’il avait dit qu’il était hors de question d’arrêter, que ça faisait partie du processus et qu’il voulait que Victor Wembanyama soit ce type de joueur-là. On voit que ce n’est pas un one shot, parce qu’il a mis 20 tirs à 3 points lors de ses trois matchs. C’est une perf’ que seuls Steph Curry, Klay Thompson ou les plus grands tireurs de l’histoire sont capables de faire."

Ces 50 points valident sa volonté de shooter à longue distance, alors que certains estiment qu’il serait plus efficace près du cercle…

"Il a dit lui-même qu’il prenait de meilleurs tirs. Face à Washington, il y a beaucoup de tirs où il est seul parce que c’est compliqué de défendre sur un mec de 2,24m qui est souvent au large. Mais il faut les mettre. Quand tu mets dedans, la bascule est là. C'est vrai que ça fait tiquer quand il est à 1/8 à 3 points, à 40% aux tirs, mais Victor, ce n’est pas Shaquille O’Neal. Ce n’est pas le même physique. Tu ne peux pas lui demander de défoncer tout le monde. Il se fait bousculer parce que les équipes mettent face à lui de plus petits gabarits pour le contester et le déséquilibrera au niveau de la hanche. Donc il est obligé d’avoir cette polyvalence dans son jeu. S’il faisait 150kg, à 2,24m, on ne lui demanderait que de dérouiller les gens, comme l’a fait ‘Shaq’ pendant dix ans. Là, ce n’est pas le cas. C’est un joueur à part, qui est unique. Je pense que le process est bon et qu’il a répondu aux critiques sur son adresse à 3 points. En fait, il a une vraie qualité de tir."

"Les 71 points de David Robinson, ça me semble envisageable"

Êtes-vous surpris de le voir atteindre un total de points aussi élevé dès le début de sa deuxième saison en NBA?

"Non, je ne suis pas surpris. Il avait déjà mis 40 points face aux Knicks la saison dernière. Le match se termine à 139-130, donc pour monter à ce niveau-là, il faut des mecs qui mettent des points. C’est la NBA d’aujourd’hui, je ne suis pas surpris. Giannis (Antetokounmpo) a mis 59 points dans la même soirée (lors de Milwaukee-Detroit). Après, je crois qu’il n’y a eu que 150 ou 160 performances à 50 points dans l’histoire de la NBA, donc ça le fait quand même entrer dans une caste un peu restreinte. Mais ça va monter plus haut. Victor est encore jeune. Il a encore beaucoup de choses à améliorer et apprendre dans l’univers NBA. C’est un énorme match à 50 points, mais dans dix-quinze ans, peut-être que ce sera un petit match pour Victor Wembanyama…"

Peut-il aller chercher le record mythique de 100 points établi en 1962 par Wilt Chamberlain lors d’un match entre Philadelphie et New York?

"Victor a mis 50 points, ce n’est que la moitié hein (sourire). Il n’a fait que la moitié du chemin pour viser ce record. Les 100 points, j’ai du mal à y croire… Les 71 points de David Robinson (record des Spurs), ça me semble envisageable. Et je pense que les 55 points de Tony Parker (qui a établi le record français en 2008 lors d’un San Antonio-Minnesota), va rapidement tomber. Avec le nombre de matchs qu’il y a en NBA, ça va monter plus haut. Il y a des soirs où, si tout se goupille bien, Victor aura de l’adresse à 3 points, il ira sur la ligne des lancers et il mettra des points dans la raquette. C’était sa première grosse perf’, mais elle va en appeler d’autres."

"On n’est qu’aux prémices de l’ère Wembanyama"

Dans quels domaines peut-il progresser pour aller chercher des performances encore plus élevées?

"Déjà, jouer plus. Il y a bien un soir où le match va être serré jusqu’au bout et il jouera 38 ou 39 minutes. Forcément, ça lui donnera des opportunités supplémentaires. Il pourrait également provoquer plus de lancers avec son gabarit. Son statut va évoluer aussi, peut-être qu’il aura un peu plus de coups de sifflet de star, ça commence déjà (sourire). Et puis, un soir où il a tout pour lui, il prendra sans doute plus de rebonds. Il a encore une marge de progression sur la lecture de jeu, sur les ballons perdus."

"On en est qu’aux prémices de l’ère Wembanyama. C’est fou de se dire ça. Les gens ne se rendent pas compte parce qu’on en a fait beaucoup sur lui. On en parle comme d’un alien ou d’un phénomène, certains en viennent à croire que c’est normal de mettre 50 points. Non, ce n’est pas normal. Surtout quand tu as 20 ans. Et puis la mise en route a été compliquée après un été où il n’a pas vraiment coupé. Les JO lui ont pompé beaucoup d’énergie physique et psychologique. Il a dit qu’il lui fallait un peu de temps pour se remettre en rythme. Là, j’ai l’impression qu’il y est et les Spurs gagnent des matchs (six victoires, six défaites), c’est beaucoup mieux pour lui. Il a des objectifs collectifs: gagner plus de 40 matchs et rester le plus longtemps possible dans la course au play-in (dans la Conférence Ouest). Mais il a surtout l’objectif d’être All Star en février. Il faut pour ça allier les résultats collectifs et les performances individuelles. Et un match à 50 points, ça marque les esprits."

Son statut de nouveau patron à San Antonio va également l’aider dans sa progression….

"C’est la plaque tournante des Spurs aujourd’hui. Tous les ballons passent quasiment par lui. Il remonte la balle, il joue les pick and roll, et il est maintenant entouré de garçons d’expérience. Il profite de sa relation avec Chris Paul et de ses conseils. Chris Paul n’a jamais été champion NBA mais il fait partie des quinze meilleurs meneurs de l’histoire de la ligue. Il a une connaissance et une lecture de jeu supérieurs à la moyenne, donc ça va aussi aider Victor".

https://twitter.com/AlexJaquin Alexandre Jaquin Journaliste RMC Sport