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Cyclisme: "Le maillot tricolore, ça fait rêver", Coquard ambitieux avant le championnat de France

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Après une longue période de doute qui s’est conclue par un départ de l’équipe B&B pour Cofidis, Bryan Coquard a retrouvé le goût de la victoire dés le début de la saison. A la veille du championnat de France où il fait partie des favoris et du prochain Tour de France, il revient sur cette nouvelle étape de sa carrière.

Une victoire après trois jours de course, une autre assez rapidement, des podiums… Bryan, comment analysez-vous cette première partie de saison dans votre nouvelle équipe Cofidis ?

C'était l'objectif que Cédric Vasseur (manager général de Cofidis) m'avait fixé en début de saison : gagner le plus rapidement possible parce que j'arrivais d'une saison sans victoire. Pour un sprinteur ce n'est jamais agréable et jamais bon de cogiter. Donc c'était un soulagement de gagner dès Bessèges, même si dès la Marseillaise j'y croyais dur et je fais six. Je me suis dit "c'est reparti", pourtant j'avais bien travaillé, j'étais en très bonne condition. Il a fallu rester patient et heureusement ça a été assez rapide et j'ai enchaîné les victoires, les bons résultats. Et ce qui me fait d'autant plus plaisir, même si je n'ai pas gagné, c’est le renouveau en cours au niveau ProTour avec deux deuxièmes places.

Une deuxième place à Paris-Nice, derrière Pedersen, qui était très très très fort à cette période de la saison. Et deuxième dernièrement au Tour de Suisse (derrière Sagan) où là j'ai un peu plus de regrets parce que j'avais la victoire dans les jambes. Mais il faut garder le positif, c'est un bon début de saison pour moi. Notamment ici au Tour de Suisse, parce que ça faisait un petit mois que j'avais repris la compétition et on va dire que ça "broutait" un petit peu. Ça n'allait pas comme je le voulais, même si c'était prévu d'être bien physiquement à partir de cette période du Tour de Suisse, championnat et Tour. J'ai souvent eu l'habitude auparavant d'être bien directement à la reprise et ça commençait à s'essouffler un peu au Tour et aussi en fin de saison. Donc on avait fait ce choix-là et je suis très content car j'arrive confiant. Je pense que c'est ça le principal : d’être bien physiquement, bien dans sa tête, d'être confiant avant de grosses échéances qui arrivent.

500 jours sans victoire, comment avez-vous géré cette période ?

J’y croyais à chaque course, j'espérais gagner à chaque fois. Ça a été long. Bien évidemment qu'on doute. On se dit c'est peut-être fini, on ne gagnera plus, on n'a plus le niveau ou peut-être que les jeunes qui arrivent sont trop forts et ce n'est pas facile à gérer. Ce n'est pas facile quand tu as gagné régulièrement tout au long de ta carrière et que là tu fais une saison blanche. Mais bon, c'est derrière moi maintenant.

Le changement d'équipe, ça a joué beaucoup ?

Oui et non, je ne sais pas. Je n'arrive pas trop à analyser l'impact que ça a pu avoir. Parce que pour moi, j'étais tout autant professionnel avant. Les quatre dernières saisons j'étais tout autant professionnel, mais ça ne marchait pas. Mais d'un autre côté, je dirais que oui aussi parce qu'il y a pas mal de petites choses qui ont changé. Déjà mon statut au niveau de l'équipe. Chez Cofidis j'ai un statut important mais je ne suis pas le seul et unique leader avec tous les regards sont tournés vers moi. On a beaucoup de coureurs. C'est aussi normal. C'est une équipe ProTour avec un niveau plus homogène, qui tire vers le haut. Cédric en début de saison n'avait pas fait spécialement de hiérarchie au niveau du sprint, donc ça m'a un petit peu poussé dans mes retranchements. J'avais à cœur de prouver que j'étais le plus rapide et que c'était à moi qu'il fallait faire confiance pour les grands rendez-vous. Voilà les choses principales et une chose aussi que j’ai ressenti après le Tour de Suisse : c'est une régularité au niveau World Tour. Régulièrement, faire des courses de haut niveau et de World Tour, pour ne pas perdre l'habitude ça te tire vers le haut. Ça fait partie de mon quotidien et de ma saison. Ce n'est plus ponctuellement comme auparavant où j'avais deux beaux rendez-vous dans l'année, c'était Paris-Nice et le Tour de France. Mais à part ces deux grosses courses, je n'étais pas confronté vraiment à ce niveau-là, alors que là, maintenant, c'est assez régulier et ça me fait énormément de bien je trouve.

C'est vrai qu’on se dit qu’aujourd’hui certaines classiques, comme Milan-San Remo, pourraient être pour vous...

Oui, c'est sûr ! Cette année, j'étais très motivé, très en condition. Je sortais d'un bon Paris-Nice. J'étais très confiant et je me dis que oui, c'est possible après l'avoir fait. Mais voilà, cette année, j'ai coincé dans la Cipressa. On n’était plus que vingt-cinq coureurs, mais je pense que c'était un manque d'expérience. C'était seulement la deuxième fois que je le faisais et la première fois ça devait être ma deuxième année pro. Donc je manquais un peu d'expérience et de repères. Je n’avais pas réalisé à quel point c'était difficile et important de compter ses coups de pédale sur Milan-San Remo. Par exemple d'absolument arriver placé en bas de la Cipressa. Car finalement, ce n'est pas énormément dur. Pour moi, c'est une bosse qui n'est pas compliquée. Sauf qu'en fait, ça arrive après 270 kilomètres et que le corps ne réagit pas pareil. Ce ne sont pas les mêmes sensations et c'est super important d'être bien placé, bien épaulé et d'être super concentré et super focus à cet endroit-là. C'était ces petits manques d'expérience. Sur d'autres classiques, clairement le manque de courses de haut niveau a joué.

Ça peut donc être un véritable objectif l'année prochaine ?

Oui, bien sûr. Ce sont des courses que j'affectionne, qui me font rêver. Et c'était la première fois depuis très longtemps que je les faisais. Donc c'est sûr que ça me tient à cœur de réussir à être performant sur ce genre de courses.

Si on en vient à la première échéance, le championnat de France ce week-end, vu le parcours on vous inscrit forcément dans la liste des favoris ?

Je connais bien le favori numéro un ! Pour être honnête, je pense que c'est clairement Arnaud Démare. Après le super Giro qu'il a réalisé il ne pouvait y avoir qu’une petite interrogation, c'était de voir comment il l'avait digéré ou assimilé. Et il a gagné la semaine dernière en Occitanie, donc je pense qu'il est très bien. Après, je suis plutôt en très bonne condition. En tout cas, je suis confiant sur ma condition. Il faudra être bon et intelligent dimanche. J'ai déjà regardé un petit peu et ça m'a l'air d'être un circuit plutôt urbain sans rien d'insurmontable ni de trop difficile. Donc pour moi, on aura un sprint massif dimanche soir.

Porter le maillot tricolore…

(Il coupe) Ça fait rêver. C'est toujours une course à part le championnat. Et je pense que tous les coureurs qui se couchent le samedi soir en fermant les yeux s'imaginent avec le maillot bleu blanc rouge. Quel que soit le style de coureurs, grimpeur ou rouleur, on sait que sur un championnat, tout est possible. Si c'est sûr c'est quelque chose qui me fait rêver, que j'ai envie de cocher dans ma liste, durant ma carrière. Bien évidemment, j'aimerais être champion de France et encore plus après avoir fait deux à Grand-Champ il y a deux ans. Je l'ai touché presque des doigts ce maillot, donc j'ai envie d'y prendre goût.

C'est vrai qu'il y a eu certaines frustrations dans votre carrière. Cette année encore derrière Sagan récemment. Mais on se rappelle sur le Tour aussi, deux fois deuxième. Dans ce nouvel environnement, vous imaginez plus de possibilités de monter sur la première place ?

C'est l'objectif. C'est sûr que j'ai beaucoup de deuxièmes places à haut niveau et sur des moments importants. Bien évidemment, j'espère, je rêve de gagner sur le Tour, d'être champion de France. Encore plus de gagner sur le Tour avec le maillot de champion de France (rires). Mais chaque chose en son temps. Dimanche, c'est le championnat, ça sera important. Après, à l'image de La Haye-Fouassière ou même des championnats auparavant, je me suis vraiment beaucoup mis la pression et j'étais vraiment obnubilé par le championnat. Mais depuis Grand-Champ où finalement, ça m'avait bien réussi, je me suis dit que c'était vraiment une course comme une autre et qu'il fallait y aller libéré. Bien évidemment ça te change la vie pendant un an mais le jour J, il n’y a rien qui change. C'est une course de vélo comme tu fais tous les week-ends ou toutes les semaines. Il faut y aller cool, c'est vraiment ça mon état d'esprit pour dimanche.

Comment va s'organiser le sprint dimanche et sur le Tour ?

Ça va être très différent je pense. Parce qu’il y aura beaucoup d'étrangers au départ du Tour dans l'effectif. J’y ai un petit peu réfléchi pour dimanche le favori numéro un, c'est Arnaud. Son train est principalement constitué d'étrangers avec Guarnieri, Scotson, Konovalovas et Sinkeldam. Ils ne seront pas là dimanche. Ils ont un gros collectif et seront beaucoup au départ mais je ne suis pas sûr qu'ils aient vraiment un train, en tout cas avec de l'expérience. Et a contrario, même si nous, sur le papier, je ne pense pas qu'on ait tout le temps le meilleur train, avec Benjamin Thomas et Axel Zingle, on a vraiment deux supers cartes et possibilités pour prendre la tête et pourquoi pas au kilomètre de m'emmener super bien. Donc la stratégie, je sais qu'à 95 % on fera pour moi. Peut-être que l'idée, ça sera de mettre des mecs à l'avant pour fatiguer et amoindrir la Groupama. Je pense clairement qu'on a les cartes pour prendre la tête et me déposer à 150 mètres dimanche.

Ça sera une formule différente sur le Tour.

Je pense que Benjamin y sera. On a trois cartes importantes avec Izaguirre et Guillaume Martin et moi. Après au Tour, comment ça va s'articuler ? Je ne sais pas encore. Il y a neuf noms qui sont plus ou moins sortis pour huit places. Peut-être que Maximilian Walschied sera sur le Tour pour m'épauler. Avec Benjamin, ça peut être aussi un bon duo. C'est sûr qu'on n'aura pas une équipe exclusivement pour le sprint pour m'emmener. On va essayer de jouer un peu sur tous les tableaux et je pense que ça peut être une bonne solution.

Quelle est votre place sur le Tour parmi la concurrence du sprint international ?

J'ai été battu en début de saison assez facilement par Jakobsen sur le Tour d’Algarve. A Paris-Nice, sur des étapes qui étaient un peu difficiles j'étais derrière Pedersen, mais devant Van Aert. Au Tour de Suisse, je me suis trouvé plutôt très rapide. Donc voilà, je suis conscient que sur le plat, je ne suis pas le plus rapide. Je pense que Caleb Ewan et Jakobsen sont plus rapides que moi sur un sprint tout plat. Les jours du Tour, au fur et à mesure, vont en ma faveur. En grimpant très bien, en fatiguant moins en montagne, en tirant mon épingle du jeu sur des parcours un peu usant il y a moyen de décrocher une victoire. En tous cas, c'est clairement l'objectif pour Cofidis et pour moi. Il faut aussi rester les pieds sur terre. C'est le Tour de France, le plus haut niveau du monde et on verra ce que ce que ça donne. Mais oui, j'y vais avec ça comme objectif. C'est essayer de gagner enfin une étape.

Vous savez que Cofidis n’a pas gagné sur le Tour depuis 2008 ?

Je savais que ça faisait très longtemps. Le maillot de champion de France sur route, c'est pareil, ils ne l’ont jamais eu chez Cofidis. Je ne veux pas du tout de pression avec ça. On verra bien.

Propos recueillis par Pierre-Yves Leroux