TOUR DE FRANCE - Bouhanni, le boxeur du sprint

Le logo s’affiche sur son casque noir. Un gant de boxe blanc avec l’inscription « Fight » et ses initiales, « NB ». Le rappel d’une passion. Le début d’un portrait, aussi. Dans la vie comme dans les sprints, Nacer Bouhanni aime le goût du combat. « La boxe, c’est depuis tout petit, explique le coureur de l’équipe Cofidis, dont l’idole se nomme Mike Tyson. J’ai toujours boxé. Je m’en sers aussi en préparation hivernale. C’est ce qui rapproche le plus du sprint pour un cycliste. Quand on est sprinteur, on donne tout ce qu’on a à 200 mètres de la ligne. Et quand on est boxeur et qu’on veut mettre un KO, il faut lâcher son adrénaline au bon moment. »
A 24 ans (25 le 25 juillet), le Français est déjà un gros bras des funambules du peloton, ces rois de la vitesse qui jouent leur course sur quelques hectomètres à pleine patate. Un monde avec ses codes et ses cadors où Bouhanni a su faire sa place. Quitte à jouer des coudes. « C’est un véritable requin et finalement, on se rend compte qu’il n’y a pas beaucoup de place pour les dauphins, lance dans un sourire son entraîneur, Jacques Decrion, passé de la FDJ à Cofidis lors de la dernière intersaison pour suivre son poulain. Il a envie de mordre, de passer la ligne le premier et de lever les bras. Il ne supporte pas la deuxième place ou la troisième. C’est quelqu’un qui ne se laisse pas marcher sur les pieds. Dans un sprint, ça joue des coudes et Nacer est respecté du fait qu’il fait de la boxe. Ses adversaires en ont peur, entre guillemets. Il a des réactions assez vives tout en maîtrisant son instinct. »
« Une victoire d’étape, déjà, ce serait bien »
Une formule qui paie. En 2014, le garçon explose. Trois étapes et le maillot du classement par points du Giro. Deux victoires sur la Vuelta. Reste à briller sur le troisième grand Tour, celui de France. En 2013, alors à la FDJ, le Vosgien abandonne lors de la sixième étape, victime d’une maladie et de plusieurs chutes. En 2014, concurrence avec Arnaud Démare oblige, il n’avait pas été aligné par Marc Madiot. De quoi le pousser à rejoindre Cofidis cette saison. Après un petit retard à l’allumage, le temps de s’adapter à sa nouvelle équipe, le « requin d’Hennecourt » – son surnom – a recommencé à sortir les dents à partir du mois d’avril : cinq victoires dont deux sur le Dauphiné (il a également remporté le maillot vert de cette épreuve).
Logique, donc, d’arriver ambitieux sur la Grande Boucle. Même après cette chute au championnat de France qui a failli le priver du rendez-vous et l’empêche forcément d’être à 100%. « Mes objectifs sur le Tour ? Une victoire d’étape, déjà, ce serait bien, et bien sûr le maillot vert, expliquait Bouhanni lors d’un stage préparatoire sur les hauteurs de Gérardmer, dans ses Vosges, début mai. Quand on est sprinteur, on rêve d’avoir ce maillot sur les Champs (le dernier à l’avoir fait est Laurent Jalabert, en 1995, ndlr). Il y a beaucoup d’attentes autour de moi et c’est normal. Mais je pense que je suis arrivé à maturité et je me sens prêt, même s’il y a forcément plus de pression sur le Tour pour un Français. » Jacques Decrion suit son coureur : « Il a encore progressé cette année et le grand public va apprendre à le connaître. Ce qu’il a réalisé au Giro et sur la Vuelta, il est capable de le faire sur le Tour. » Face aux meilleurs sprinteurs de la planète, Bouhanni aura ses chances. A lui de les saisir et de mettre ses rivaux KO.