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PSG-Inter: "La fraîcheur mentale est fondamentale", Luis Enrique a-t-il bien fait de laisser une semaine de repos à certains joueurs?

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Les joueurs du PSG sont de retour à l'entraînement collectif ce mercredi, certains après trois journées de repos, d'autres après six jours pleins. Ces petites "vacances" accordées par Luis Enrique à ses hommes, avant d'entrer activement dans la préparation de la finale de Ligue des champions contre l'Inter Milan (31 mai), ont pu surprendre. Mais pour le préparateur mental Pier Gauthier, il faut faire confiance au technicien espagnol, très attaché à la fraîcheur psychologique de son équipe.

Fini, le soleil de Marbella ou de Barcelone, la tranquillité de Doha et les monuments romains. Place aux vertes pelouses de Poissy et à la préparation, pour certains, du match le plus important de leur vie. Ce mercredi, tous les joueurs parisiens sont attendus au Campus PSG pour la reprise de l'entraînement collectif, et le début de la ligne droite censée les conduire jusqu'à la finale de la Ligue des champions contre l'Inter Milan, le 31 mai prochain à Munich. Une rentrée printanière, en somme, après quelques "vacances" accordées par Luis Enrique et son staff.

Le technicien espagnol avait en effet décidé d'octroyer six jours de repos pleins à sept cadres de son effectif dans la foulée de la qualification contre Arsenal (Gianluigi Donnarumma, Achraf Hakimi, Marquinhos, Nuno Mendes, Willian Pacho, Fabian Ruiz, Vitinha), et trois journées aux autres joueurs présents sur la feuille de match à Montpellier, samedi soir en Ligue 1. Un procédé peu fréquent à ce stade de la saison, et forcément accompagné de quelques questions, sur une éventuelle perte de rythme, ou un risque de décrochage mental. De questions, voire de réserves.

"Moi j'ai peur de laisser les joueurs au repos comme ça, ça ne me plaît pas, tu dois être complètement focus", a ainsi commenté Vincent Moscato, mardi dans le Super Moscato Show sur RMC.

"Pour moi c'est entraînement tous les jours, il ne doit pas y avoir d'interférence. (...) Je ne lâche personne, sinon tu te coupes complètement de la pression que tu dois avoir, ce n'est pas bon."

Jérôme Rothen, ancien joueur du PSG, a pourtant un point de vue différent. "Les joueurs qui ont eu six jours de repos, c’est un luxe. Est-ce que j’aurais aimé avoir ça à l’époque? Oui, parce que la vérité, c’est qu’on est tous fatigués à ce stade de la saison, mentalement déjà", a-t-il observé dans Rothen s'enflamme. "Il y a beaucoup d’échéances, encore plus avec les sélections pour ces joueurs qui sont tous internationaux et qui enchaînent les matchs… Et quand le PSG joue quelque chose en France, il faut tout gagner. C’est une fatigue mentale qui se met en place tout au long de l’année et qui est vraiment présente dans la dernière ligne droite en mai. Alors quand tu te reposes six jours, tu déconnectes. Et physiquement, ils ne vont pas perdre en six jours. Pour moi ce n’est que du positif."

"Il y a un équilibre à trouver"

C'est aussi, globalement, l'avis de Pier Gauthier. Préparateur mental exerçant auprès de nombreux athlètes, et administrateur du site coachingmental.fr, cet ancien joueur de tennis suit avec intérêt le travail du staff parisien en ce printemps potentiellement historique. "Sur tout ce qui est impact physique du repos, je ne m'engagerai pas", prévient-il en préambule. "J’ai lu des préparateurs physiques dire que sur une semaine l’impact est négligeable, c’est aussi ce que je pense, mais en tant que professionnel je ne me permettrai pas de trancher. (...) Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que sur une échéance comme celle-là, une finale de Ligue des champions, il y a un équilibre à trouver entre le fait d’arriver dans les meilleures dispositions physiques et techniques, mais aussi d’arriver dans les meilleures dispositions mentales. Être préparé aux enjeux, et avoir la capacité mentale à pouvoir encore donner le meilleur de soi."

Selon lui, il n'y a pour cela "pas d'indication ou de contre-indication", pas de "recette magique" à délivrer. "Les joueurs de l’Inter Milan font complètement différemment. Et même s’ils n’avaient plus rien à jouer de leur côté en championnat comme le PSG, rien ne dit que leur staff les aurait laissés au repos", poursuit Pier Gauthier. "A Paris, je crois que c’est vraiment sur la fraîcheur mentale que Luis Enrique et son staff misent, et il n’y a qu’eux qui peuvent savoir."

Luis Enrique, l'un des entraîneurs les plus en avance sur la préparation mentale

En ce sens, Christophe Dugarry leur fait confiance. "Je ne vois pas de problème à ça (au fait d'accorder des jours de repos). La chose la plus importante, c’est de trouver de la fraîcheur, mentale et physique", estime l'ancien attaquant des Bleus. "Le staff a aussi des données que l’on n’a pas, sur les efforts, sur l’état de forme des joueurs avec les prises de sang… Ils sont au courant du défi physique de chacun des joueurs. C’est vrai que c’est original, on n’a jamais vu ça, mais avec Luis Enrique on a déjà vu pas mal de choses originales, et ça a plutôt bien fonctionné."

L'entraîneur du PSG Luis Enrique, et le psychologue sportif Joaquin Valdes Fonseca, le 8 avril 2025
L'entraîneur du PSG Luis Enrique, et le psychologue sportif Joaquin Valdes Fonseca, le 8 avril 2025 © Baptiste Fernandez/Icon Sport

Une analyse partagée par Pier Gauthier. "Là où le staff du PSG a vraiment été très fort, c’est qu’il a réussi à trouver et ajuster un équilibre permanent", décrit le préparateur mental. "À chaque fois qu’il y avait une échéance à venir les joueurs sont montés en puissance, à chaque fois qu’il y avait un match couperet ils ont montré une intensité assez impressionnante. J’imagine que Luis Enrique suit très bien ça." Car le coach espagnol, s'il aime évidemment des joueurs en jambes, a toujours accordé une grande importance à ce qu'il se passe dans leurs têtes.

"On parle d’un entraîneur qui a un préparateur mental dans son staff (le psychologue Joaquin Valdes Fonseca, NDLR), ce n’est pas rien", rappelle Gauthier.

"C’est une donnée importante à ses yeux. Et si le staff croit que certains joueurs – pas tous – ont besoin de plusieurs jours voire d’une semaine pour recharger les batteries mentales, c’est lui le mieux placé. Le truc qui est sûr, c’est que la fraîcheur mentale est fondamentale. Et ça, on l’oublie trop souvent."

Luis Enrique sans doute moins que certains de ses confrères. "Ce qui me plaît surtout, c’est de voir que cette dimension-là, quand elle est utilisée, comprise et appliquée, elle obtient des résultats", se réjouit Pier Gauthier. "En fait c’est l’inverse qui me surprend: que des entraîneurs pensent encore aujourd’hui qu’on peut performer au plus haut niveau sans travailler cet aspect mental. Attention, je ne suis pas en train de dire que c’est plus important que le plan physique, ou tactique. Mais comment peut-on croire encore qu’on peut être performant sans être blindé sur le plan mental? On a aujourd’hui deux bons exemples en France. Le PSG avec Luis Enrique dont le plus vieux collaborateur dans son staff est un préparateur mental et qui fait quelque chose à Paris que jamais personne n’a réussi à faire ; et le deuxième c’est Brest, qui a pris il y a deux ans un préparateur mental dans son staff, Thomas Sammut, et qui a obtenu des résultats fous."

Dix-sept jours pour arriver au top

Dans le cas précis du PSG, Christophe Dugarry considère par ailleurs que Luis Enrique a à sa disposition un vestiaire sérieux, et responsable. Des hommes à qui l'on peut faire confiance, à moins de trois semaines d'une finale de Ligue des champions. "Je n’ai pas l’impression qu’il ait des 'loulous' dans l’équipe", lance-t-il. "S’il avait des Ronaldinho ou des Neymar, peut-être qu’il ne leur aurait pas laissé six jours (rires). Mais il connaît aussi la mentalité de ses joueurs, il sait des choses qu’on ne sait pas, donc ça ne me choque pas outre-mesure."

"Ce travail de responsabilisation des joueurs est déjà fait, les joueurs sont impliqués, ils ont leur objectif bien en tête, je ne vois pas un cadre de l’équipe partir à Ibiza se mettre des bouteilles de whisky en boîte", appuie Gauthier. "Les joueurs ont conscience de l’enjeu, je suis convaincu qu’ils ont tous fait le programme d’entretien physique qui leur a été donné."

Et Christophe Dugarry d'insister: "Encore une fois, la priorité aujourd’hui va à la fraîcheur. Ce n’est pas parce que le Paris Saint-Germain va s’entraîner une semaine de plus ou de moins, que ça va changer quelque chose à son jeu. Et là il reste encore 17 jours, il y a du temps."

Du temps pour remettre les corps en route, pour établir et travailler un plan de jeu à même de défaire une redoutable équipe italienne, et pour conditionner un peu plus les esprits. "Je ne pense pas qu’il est nécessaire d’enlever de la pression", indique Pier Gauthier. "Je prépare depuis longtemps tous mes athlètes à comprendre que la pression est indispensable au très haut niveau. On ne peut pas espérer être dans son état optimal de performance sans être sous pression. S’il y a un manque de pression, d’intensité, même physiquement on va être en dessous de quelqu’un de très motivé. La pression n’est absolument pas à enlever, elle est à bien gérer. Effectivement il faut être capable de l’utiliser et non pas qu’elle vienne vous inhiber, et c’est en ça qu’il y a un travail mental de préparation à faire. Mais le but n’est pas de mettre moins les joueurs sous pression. L’objectif est très clair, la motivation doit être très forte."

https://twitter.com/clementchaillou Clément Chaillou Journaliste RMC Sport