Equipe de France: pourquoi il ne faut pas trop s’inquiéter pour Kanté

Ce sont 18 ballons perdus qui interpellent, son pire total en 35 matchs disputés avec l’équipe de France. N’Golo Kanté nous avait rarement habitués à une telle prestation… à la limite de l’indigence vendredi, lors de la défaite des Bleus contre les Pays-Bas (2-0). Une contre-performance au cœur d’un marasme collectif. Mais le milieu de terrain, habituel pilier des hommes de Didier Deschamps, s’est finalement délité comme les autres.
Faut-il pour autant s’inquiéter ? Si son remplacement pour le match amical de l’équipe de France face à l’Uruguay est fort possible, son avenir à moyen terme est bleu. Car l’ancien joueur de Leicester a pour lui un lot de circonstances atténuantes.
Un duo avec N’Zonzi qui ne fonctionne pas
En finale du Mondial, l’ancien Sévillan avait remplacé le membre des Blues en deuxième période. N’Golo Kanté, souffrant, avait affiché un visage inattendu de fébrilité face à la Croatie et Steven N’Zonzi avait brillamment pris son relais. Tout est dans ce changement: entre les deux joueurs, c’est tout l’un ou tout l’autre.
Les deux joueurs, associés dans un milieu à deux – renforcé par séquences par le replacement de Blaise Matuidi – se seront marché dessus. Le joueur de la Roma affiche un profil de pure sentinelle, ce que n’a jamais été N’Golo Kanté. Mais aucun des deux joueurs n’a cet aspect très Busquetien d’organisateur devant la défense, façon distributeur.
Plus physique – quand on fait près de deux mètres, rien d’illogique – Steven N’Zonzi a peiné à cohabiter avec son coéquipier, les deux hommes se marchant sur les pieds… mais donnant surtout l’impression de ne pas parler le même football. Avec Matuidi, les trois hommes affichaient en prime une couverture spatiale étonnamment limitée de l’entrejeu. Un Tanguy Ndombele, davantage dans la percussion, s’érige sur le papier en option plus complémentaire pour être associé à Kanté.
Un nouveau rôle à Chelsea… et chez les Bleus?
Présenté un peu trop hâtivement comme une sentinelle, N’Golo Kanté s’est encore un peu plus éloigné du profil de numéro 6 depuis quelques mois. Grâce à Maurizio Sarri, arrivé cet été sur le banc de Chelsea, le milieu de terrain a entamé sa mue vers un profil moins hybride, plus identifié numéro 8. Le serial râtisseur n’a guère officié contre les Pays-Bas. Mais les Blues s’en délectent.
>>> Nouveau rôle, Sarri, son statut... les confidences de Kanté
Ses qualités physiques – notamment cette endurance à toute épreuve – auraient finalement été sous-exploitées avec un positionnement devant la défense. D’autant que le joueur n’a pas forcément cette science du jeu qui fait de lui un organisateur… tout le contraire d’un Jorginho moins physique mais si précieux dans l’orientation du jeu. Preuve en fut encore samedi soir, lors de l’association de l’Italien avec Marco Verratti face au Portugal (0-0).
"N'Golo Kanté est un très bon milieu de terrain. Je crois qu'il peut jouer à n'importe quelle position au milieu. Ce n'est pas un problème pour lui. J'ai été surpris par ses qualités techniques", confiait son coach à Chelsea début septembre. Pas un problème certes. Mais difficile d’avoir ses repères quand on change de poste. D’autant que l’ancien technicien de Naples est connu pour ses exigences vis-à-vis du schéma de jeu. Et comme Steven N’Zonzi n’est pas Jorginho et qu’Antoine Griezmann jouait les meneurs de jeu excentrés ou très avancés, aucun joueur n’a pris la responsabilité de l’organisation face aux Pays-Bas.
Le creux de novembre
Autre argument, adaptable à de nombreux joueurs de l’effectif d’ailleurs: la fatigue. Chez N’Golo Kanté, elle est double. La première est d’ordre purement physique pour le champion du monde qui, comme ses camarades, a dû faire avec des vacances raccourcies et pleines de sollicitations médiatiques, avant de reprendre en club… dans le grand bain d’entrée.
La deuxième est d’ordre psychologique. Outre ce statut à digérer, N’Golo Kanté sera en prime passé de cadre que tout le monde admire en Premier League à chouchou mondial. Le tout en découvrant un nouveau management à Chelsea, après la fin d’aventure contrariée avec Antonio Conte. Et surtout un nouveau jeu, dans le système, les intentions… et dans son propre rôle, plus offensif, façon relayeur qui se projette (et pourrait un jour se mettre à frapper, comble de la révolution pour N’Golo Kanté).
Beaucoup à assimiler donc. Ce qui laisse entendre qu’un trou d’air en novembre n’a rien d’illogique, surtout dans un contexte de faillite collective globale. Il ne jouera peut-être pas contre l’Uruguay, façon de récupérer en vue du choc de championnat contre Tottenham le 24 novembre (18h30 sur RMC Sport). Mais il sera là dans les prochains mois. Reste à Didier Deschamps a trouver la formule pour bâtir autour de lui, en lui adjoignant une sorte de Jorginho. L’équipe de France en a-t-elle un à disposition ? C’est la mission du sélectionneur dans les prochains mois.