Riolo : "Le cas Fekir…"

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C’est pas encore officiel, mais puisque Bernard Lacombe a lâché le morceau… Fekir a donc changé d’avis et il va jouer pour l’équipe de France. Enfin, il va se mettre à la disposition des Bleus, parce que jusqu’à preuve du contraire, c’est le sélectionneur qui choisit et pas l’inverse. Encore que parfois j’ai un doute.
Fekir a donc changé d’avis. D’abord heureux de déclarer que l’Algérie était son pays et qu’il aimerait évoluer avec les Fennecs, il sera tout heureux bientôt de jouer avec les Bleus.
Entendons nous bien. Evidemment, Fekir fait ce qu’il veut puisqu’il en a la possibilité. Comme tous les binationaux, il peut choisir sa sélection. On ne va pas s’attarder ici sur le règlement FIFA qui autorise un joueur à débuter avec les espoirs puis de changer de maillot.
Et ce n’est pas non plus le fait de changer d’avis qui pose problème. Encore une fois, Fekir est libre. Les binationaux sont tous tiraillés entre deux cultures, deux pays. Non moi ce qui me dérange c’est la raison du revirement.
Personne n’a, en effet, obligé Fekir a d’abord choisir l’Algérie en déclarant que c’était son pays. Personne ne l’a obligé à parler du choix du cœur. Et l’entendre dire ensuite que son choix serait celui qui serait le plus en phase avec ses intérêts à quelque chose de troublant.
Quand j’ai entendu ce mot : « intérêt », j’ai compris que le revirement était possible, annoncé.
Et quand son président, Jean-Michel Aulas s’en est mêlé, tout est devenu clair. Le cœur a alors vite laissé place à la raison. Et soyons clair, à la logique de l’oseille.
« On va l’aider à choisir », a lâché Aulas la semaine dernière. Comment être plus clair ?
Lyon n’a aucun intérêt à voir Fekir choisir l’Algérie. C’est une perte de valeur conséquente sur le marché des transferts. Et l’OL a besoin de vendre les vedettes de son centre de formation. En plus, cette histoire tombe pile au moment de la négociation de son nouveau contrat. Si on avait l’esprit tordu, qu’est-ce qu’on irait pas imaginer…
Logiquement Fekir a facilement compris que faire une carrière en équipe de France était autrement plus rentable qu’avec le maillot vert. Un enfant de dix ans l’aurait compris, et lui en a 21. Un âge raisonnable, enfin sauf pour ceux qui continuent de nous parler des joueurs de foot comme si c’était des enfants…
Depuis que Fekir est devenu l’un des joueurs les plus en vues de notre L1 et que ça s’agite autour de lui, beaucoup de choses ont changé dans son environnement. Son papa parle beaucoup et visiblement a cherché à avoir des garanties d’un côté ou de l’autre. Le joueur a changé d’agent. Exit Hassan Kachloul et Éric Castagnino qui l’accompagnaient jusque-là et depuis longtemps. J’attends avec impatience le nom du nouveau et quelque chose me dit que... Non attendons. Ce sera meilleur de savourer ça plus tard.
Il y a presque 5 ans maintenant, à la DTN, sur les ruines de Knysna, on a monté un projet, une idée autour de la notion d’attachement. Le mot était dans tous les dossiers. « On doit travailler sur l’attachement à la sélection ». J’ai essayé de me renseigner, de comprendre comment on pouvait travailler sur un concept aussi flou. On m’a expliqué, mais j’ai eu du mal à comprendre. Et d’ailleurs, c’est resté très flou.
La sélection n’est finalement rien d’autre qu’un club. Et quand on peut choisir, c’est toujours l’intérêt qui prévaut, l’oseille. Après tout, l’attachement à un club n’existe plus, la logique marchande écrase tout dans le foot, alors pourquoi être étonné que le dernier bastion tombe aussi. Les Brésiliens s’inventent de nouvelles nationalités depuis longtemps. En Italie, on se trouve un grand-père et le cœur bat à nouveau la chamade. On part jouer pour la Pologne parce qu’on a un nom qui sonne bien. Après le hand, le Qatar ne va pas tarder à se monter une équipe avec plein de choix du cœur pour le Mondial 2022.
Pour Fekir, ce n’est pas pareil. Il est Français et a, à ce titre, évidemment le droit de jouer en Bleu. Oui je sais j’insiste, mais comme on dit partout dans les médias que c’est un sujet délicat, que c’est le genre de débat à éviter parce que… parce que quoi ? Eh bien parce que, tu comprends quoi, facho tout ça…Ah oui, c’est vrai.
Mais est-ce qu’on se demande comment ceux qui sont de l’autre côté du business jugent cette logique d’intérêt ? J’ai comme dans l’idée qu’en Algérie, on doit se sentir un peu pris pour des cons. Et en France, on va récupérer un super joueur dont le cœur bat pour un autre maillot. Reste plus pour Nike qu’à coudre une poche arrière sur le short pour glisser le portefeuille.