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Fifa: pourquoi Platini peut encore s’en sortir

ENQUETE RMC SPORT. L’étau se resserre autour de Michel Platini, contre qui la chambre d’instruction du comité d’éthique de la Fifa préconise une radiation à vie de toute activité liée au football. Même si l’horizon s’assombrit furieusement pour l’ancien maître à jouer des Bleus, son sort n’est pas encore scellé. Question d’honneur, d’image de marque et de recours dont il devrait user dans les prochaines semaines.

« La question n’est pas de savoir si Michel Platini recevra une nouvelle sanction, mais pour combien d’années il sera suspendu (de toutes activités liées au football), si ce n’est pas pour la vie ». Il y a un mois, cette information confiée par une source interne à la commission d’éthique de la Fifa à RMC Sport semblait exagérée et disproportionnée. Mais ce mardi, force est de constater que l’ancien maître à jouer des Bleus est bel et bien dans la nasse, la chambre d’instruction du comité d’éthique de la fédération internationale ayant requis à son encontre la radiation à vie. Une sanction extrême qui mérite quelques éclaircissements.

Que reproche-ton à Platini ?

Si dans un premier temps des soupçons de « falsification des comptes » (non inscription des 2 millions de francs suisses reçus par Platini en 2011 et validés oralement) visaient principalement Sepp Blatter, l’affaire a rapidement éclaboussé le Lorrain. En tant que membre du comité exécutif depuis 2002, il aurait dû informer ses collègues de cet arriéré de paiement. En effet, l’article 19 du code éthique de la FIFA est très clair : « Dans le cadre de leurs activités pour le compte de la FIFA ou avant d’être élues ou désignées comme officiel, les personnes auxquelles s’applique le présent code doivent révéler tout intérêt personnel qui pourrait être lié à leurs nouvelles fonctions ».

Dans ce contexte synonyme de conflit d’intérêt aux yeux de la commission d’éthique de la Fifa, le tarif pour ce genre de « négligence » -comme l’a qualifié en ces termes un des proches de Platini à RMC Sport- est très clair : c’est 5 à 7 ans de suspension. 5 années pour conflit d’intérêt stricto sensu et 1 à 2 années pour ne pas avoir suffisamment collaboré avec la commission d’éthique.

Pourquoi la suspension à vie ?

Parallèlement à cela, les enquêteurs de la commission d’éthique de la FIFA ont cherché à savoir durant plusieurs semaines d’enquête si Michel Platini s’était également rendu coupable de corruption. Une accusation beaucoup plus grave, passible, elle, d’une suspension à vie, comme semble le confirmer aujourd’hui dans son réquisitoire la chambre d’instruction du comité d’éthique.

C’est le comportement de l’ancien maître à jouer de la Juventus Turin, avant et après le paiement de 2011, qu’ont cherché à analyser les enquêteurs à travers des compte-rendu de réunions, correspondances et autres prises de position de Platini vis-à-vis de Blatter. En clair, ils souhaitaient savoir si « Michel Platini avait changé d’avis sur Sepp Blatter avant et après le paiement » en vue des élections présidentielles remportées par le Suisse.

Comme le stipule l’article 21 de son règlement, la commission d’éthique ne plaisante pas sur cet aspect des choses : « Les personnes auxquelles s’applique le présent code doivent s’abstenir de toute activité ou tout comportement pouvant donner l’impression ou laisser supposer l’existence d’un comportement fautif ou l’existence d’une tentative de comportement fautif ». Pas besoin donc de prouver formellement la corruption, documents à l’appui, pour établir la culpabilité d’un dirigeant de la Fifa.

Peut-il encore s’en sortir ?

C’est désormais probablement cette « faille » que va tenter d’exploiter la défense de Michel Platini afin de prouver son innocence. Autre élément qui pourrait plaider en faveur de Platini : le conflit d’intérêt n’est pas un délit aux yeux de la justice suisse donc civile.

Si ses chances de se présenter aux élections présidentielles de la Fifa du 26 février prochain sont quasi nulles, l’ancien triple Ballon d’or voit bien au-delà de cette échéance désormais presque anecdotiques. Question d’honneur et d’image de marque. Platini et son entourage sont donc bien décidés à user de tous les recours afin d’alléger voire lever purement et simplement cette suspension à vie, si elle vient à se confirmer. Selon nos informations, le Français -qui a désormais accès au dossier- va étoffer sa défense. Il s'est même d'ores et déjà attaché les services de Thomas Clay, technicien spécialiste de l'arbitrage qui s'est notamment déjà illustré dans l'affaire de l’arbitrage Tapie, en vue d’une convocation a priori en décembre (comme Blatter d’ailleurs).

Si le TAS puis la chambre de jugement de la Fifa confirment dans un premier temps sa suspension initiale de 90 jours, Platini pourra de nouveau faire appel cette fois-ci auprès de la Chambre des recours de la Fifa puis de nouveau du Tribunal Arbitral du Sport. Un parcours du combattant qu’entend bien mener jusqu’au bout le président de l’UEFA.

la rédaction avec A.Arlot