De Tavernost : "La France s’est fait avoir dans la réforme de la Ligue des champions"

Nicolas de Tavernost - AFP
Nicolas de Tavernost, comprenez-vous l’énervement des suiveurs de la Ligue 1 en voyant l’état de la pelouse du Matmut Atlantique ?
Ça nous énerve autant. Je pense qu’on a perdu des points à cause de la pelouse. On a eu l’occasion d’en parler directement au gestionnaire du stade, puisque ça dépend de lui. On nous explique que l’année a été très chaude, que toutes les pelouses sont comme ça. Moi, les années très chaudes… J’ai chaud depuis longtemps. L’été, c’est normal qu’il fasse chaud. Je crois que des travaux ont été engagés pour qu’au prochain match à domicile, les choses aillent mieux. C’est vraiment dommage. Nous en sommes les premières victimes et nous n’en sommes pas les responsables. Nous ne sommes que le club résident et non le propriétaire du stade. J’espère que ça sera une mauvaise expérience à oublier. Il n’en reste pas moins que ce stade est magnifique. Je trouve que c’est le plus beau stade en France, voire en Europe. Il est magnifique, on ne s’en aperçoit pas assez. C’est un stade formidable. L’épisode de la pelouse, ça va être réglé.
La fréquentation des stades chute, alors que la Ligue 1 doit progresser…
Il y a des tas de raisons pour lesquelles la fréquentation a plutôt baissé, pas plus au Matmut Atlantique qu’ailleurs. On ne peut pas forcément dire que c’est dû à la qualité du spectacle, parce qu’il y a plus de buts, quelques joueurs emblématiques qui sont venus. Je pense à Nice notamment. Mais la Ligue 1 doit progresser, c’est clair. Ce qui m’agace, c’est que souvent, les présidents de clubs s’engueulent entre eux au lieu de tirer dans le même sens. Dans la télé, on s’engueule toute la journée. Mais on a quand même un syndicat des télévisions privées, dans lequel on essaye de faire progresser les choses pour que les gens regardent la télé. Dans le foot, je suis toujours étonné de voir que chacun joue sa partition personnelle.
Que regrettez-vous précisément ?
Ils sont tous sympathiques quand on les voit individuellement, mais ils n’arrivent pas à se mettre ensemble. Quand on était au conseil de la Ligue, Jean-Louis (Triaud) en l’occurrence, on était les seuls à voter pour le maintien à 18. On aurait pu quand même mieux gérer le cas de Monaco. Monaco a le droit d’être dans le championnat de France, mais on pouvait avoir une discussion qui permette d’avoir une égalité de traitement entre les clubs de manière durable. Je sais qu’il y a quand même un gros travail qui est fait pour qu’il y ait un certain nombre d’améliorations. La réforme de la Ligue des champions, ce n’est pas normal que la Ligue n’ait pas été présente dessus. Les clubs de l’UEFA, qu’est-ce qu’ils vont ramasser ? C’est un scandale. On n’est pas là simplement pour protéger deux ou trois clubs français. Je suis extrêmement surpris de voir qu’on a découvert ça. Je le dis d’autant plus qu’on n’était pas dans les instances. Il y a une réforme à l’UEFA. Il y a des gens qui se disent très proches de l’UEFA. Comment ça se fait qu’on découvre en cours de route ? S’ils étaient d’accord, qu’ils le disent.
Vous pensez à Jean-Michel Aulas ?
C’est une vraie séparation entre nous. Je ne suis absolument pas d’accord avec la réforme de la Ligue des champions. La France s’est fait avoir, notamment les clubs qui concourent en Ligue Europa. J’espère que Lyon n’en sera pas victime. Jean-Michel Aulas a quand même une caractéristique, c’est qu’il est compétent et qu’il travaille. Il faut le reconnaître. Je dis simplement que je trouve que pour un sport collectif, les instances dirigeantes ne montrent pas le collectif, que ce soit à la Ligue, à la Fédé, à l’intérieur des clubs professionnels. Il y a beaucoup de gens qui changent d’avis à la dernière minute en fonction du match suivant ou du transfert qu’ils vont opérer. Ce n’est pas bien. Je connais bien Didier Quillot, le nouveau directeur de la Ligue. J’espère qu’il va remettre un état d’esprit qui fasse que ce sport soit plus collectif. Il y a beaucoup de challenges. La fréquentation des stades, l’attractivité, les droits internationaux… On ne peut pas dire que ça soit très satisfaisant de ce côté-là.
Que faut-il faire pour l’amélioration de la Ligue 1 ?
Il faut d’abord améliorer les droits TV. C’est paradoxal que je vous dise ça parce qu’on n’est pas candidat, mais il faut que les droits TV s’améliorent. Notamment sur le plan international, parce que ce n’est pas normal qu’on ait si peu. Et sur le plan français. Le moteur de la télévision payante, c’est le football. Ce n’est pas suffisamment valorisé aujourd’hui. Deuxièmement, il faut aussi qu’on soit plus présent dans les instances internationales pour ne pas se faire raboter comme c’est le cas sur l’Europa League. Troisièmement, il faut qu’on obtienne des pouvoirs publics des mesures qui ne soient pas aussi défavorables. Je rappelle qu’on s’est tapé les 75% sur les hauts salaires, la sécurité sociale, le droit à l’image qui a été supprimé… Je pense qu’il faudra discuter des choses-là avec les candidats à la présidentielle si on veut avoir un football qui rivalise avec l’Allemagne, l’Angleterre et l’Espagne. Mais il n’y a pas de raisons de ne pas y arriver. Les clubs sont connus. Il y a de beaux clubs en France, de beaux stades.
Qu’est-ce qui vous plaît en Ligue 1 ?
Quand on gagne, d’abord. Quand il y a des derbies, c’est toujours intéressant. Et j’aime bien les matchs contre Marseille, Lyon, Saint-Etienne. Et puis quand c’est serré, qu’il y a des bagarres pour le classement. Et quand les stades sont pleins.
Qu’est-ce qui vous exaspère en Ligue 1 ?
Quand on ne reconnait pas parfois qu’il faut faire des efforts sur l’arbitrage. Ça m’exaspère quand les matchs sont vraiment professionnellement faussés par l’arbitrage. On n’est pas les seuls à avoir des fautes d’arbitrage. Je pense qu’il y a des progrès à faire.
Des investisseurs étrangers arrivent à Nice, à l’OL, à l’OM… Et à Bordeaux ?
Avec des Bordelais ! On verra. Tant mieux s’il y a des investissements. C’est une très bonne chose. On est en compétition mais ça la valorise d’avoir des clubs qui progressent, qui se professionnalisent, qui ont de beaux stades, de beaux joueurs. C’est très bien. Réjouissons-nous de ça. A Bordeaux, il faut que nous suivions le mouvement en termes de professionnalisation, de résultats sportifs pour remplir le stade, d’accompagnement du club dans la région pour que nous restions à la place qui est la nôtre, entre la 3e et la 6e.
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