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Avant l'OL, ces anciens joueurs ont bataillé pour le maintien avec un club pas habitué au bas de tableau

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Comment se battre pour le maintien sans y être programmé? C’est la question à laquelle doit répondre l’Olympique lyonnais, avant-dernier de Ligue 1 avant d’affronter la lanterne rouge, Clermont, ce dimanche à 20h45. D’anciens joueurs qui ont connu la même situation racontent leur expérience à RMC Sport. 

Des ambitions d’Europe voire de podium, puis des résultats qui ramènent à la raison: le maintien sera le seul objectif. En affirmant, après le match contre Lorient (3-3), que son équipe jouait avant tout pour sauver sa place en Ligue 1, Fabio Grosso a rappelé quelques souvenirs d’équipes condamnées à jouer leur survie plutôt que le haut du tableau. C’est arrivé à Monaco en 2011. Quelque mois plus tôt, le club de la Principauté avait terminé huitième de L1 et avait joué la finale de la Coupe de France.

"Le groupe était bien structuré, l’équipe cohérente. Les résultats en début de saison n’étaient pas non plus catastrophiques. On n’était pas bon mais ça fait partie d’une saison. Il y avait des faits de jeu, des poteaux qui partaient à l’extérieure, la malchance", se souvient Vincent Muratori, alors défenseur à l’ASM. "Ça crée un manque de confiance puis ça s’est enchainé. Mais pour nous c’était clair, ça allait tourner. On avait énormément de qualité." Pas facile, quand vous n’êtes pas programmé pour ça, de se dire que le maintien devient le seul objectif.

"Quand vous êtes dernier, c’est là que vous prenez conscience qu’il va falloir mettre d’autres ingrédients pour prendre des points, se souvient Jérôme Rothen, sauvé in extremis avec Paris en 2008. Je ne parle même pas de victoires, mais de prendre des points. Il faut faire un tableau de marche qui vous emmène assez vite à la barre du maintien. Le fait de regarder devant et se dire qu’il reste beaucoup de matchs, c’est une erreur. Car en pensant ça, on accepte l’éventualité de se rater encore le week-end. Mais le retard s’accumule vis-à-vis des équipes qui sont habituées et formatées pour jouer le maintien." Ce qui n’est pas le cas de Lyon.

Pour des champions du monde comme Corentin Tolisso ou Nicolas Tagliafico, des buteurs internationaux comme Alexandre Lacazette, des cadres expérimentés comme Dejan Lovren ou Anthony Lopes, c’est une mission nouvelle. L'ex-défenseur Jacques Abardonado, maintenu avec l'OM en 2000 lors de l’ultime journée, se souvient: "Ça peut perturber. On avait de très grands joueurs et nous voir dégringoler, ce n’était pas évident pour eux. Ils n’ont connu que le top niveau et il y avait de l’ambition pour cette saison-là. Au quotidien, ce n’était pas facile de vivre ça. Quand on encaissait des buts, parfois on se regardait dans les yeux, et sans même se parler, on disait des choses… Ce n’étaient pas des choses heureuses."

"En pensant ça, on accepte l’éventualité de se rater encore le week-end"

La saison précédente, Marseille avait fini vice-champion de France et finaliste de la Coupe UEFA. Même constat pour Vincent Muratori: "Quand on prenait notre effectif, on ne se disait que jamais cette équipe ne descendrait. On n’a pas su gérer cette saison avec un esprit d’équipe, l’esprit de se maintenir. Pour nous, le maintien n’était pas un sujet, on savait qu’on allait y arriver. On n'a pas eu de réaction."

Mentalement, Lyon n’est pas armé comme les promus (Le Havre, Metz) ou Clermont, son adversaire du jour. La pression est encore plus grande. Comme à Marseille à l’époque: "On regardait le classement toute la semaine, avant ou après le match, relate Abardonado. Et on se dit toujours qu’on peut aller chercher le 5e ou 6e, et ensuite on regarde derrière, et on se dit: 'merde, on est à trois points du premier relégable', et là ça commence à chauffer. Ça serait inconscient de dire que la peur de descendre ne s’installe pas."

"Pour nous, ce n’était pas une question de niveau. C’était une question de prise de conscience"

C’est là que des joueurs habitués à ce type de missions peuvent être utiles. Lyon n’en a pas vraiment, mais le club rhodanien pourra essayer d’en recruter au mercato d’hiver. "Pour nous, ce n’était pas une question de niveau. C’était une question de prise de conscience, d’avoir un vécu pour gérer la pression de la descente. Je pense qu’il faut l’avoir déjà vécu dans sa carrière pour le gérer. Il faut rectifier le tir au niveau de la qualité et de la personnalité. Il faut des leaders qui connaissent cette pression", confirme Muratori. Même si, de son expérience, les changements d’entraîneurs et l’arrivée de nombreux nouveaux joueurs ne constituent pas une recette miracle.

"Il faut des leaders qui connaissent cette pression"

"Dans le vestiaire, c’est compliqué. Tout le monde a la tête basse, blanc comme un linge, quand les matchs arrivent. La pression est énorme. C’est pour ça que je parle de la force des grands joueurs qui peuvent permettre à certains, qui paniquent plus que d’autres, notamment les jeunes, de sortir la tête de l’eau. Ils doivent assumer leur statut, appuie Rothen. D’autant que, dans ces grands clubs, les supporters, inquiets, s’impatientent. Les Lyonnais avaient d’ailleurs pris une leçon par le capo du Virage Nord après la claque (4-1) subie contre Paris, le 3 septembre. 

Jérôme Rothen raconte: "Tout le monde te regarde en disant 'ils sont mauvais, ils ne vont pas s’en sortir', et des supporters se retournent un peu contre toi sur les matchs. Il faut essayer d’en parler au maximum avec tes proches car si tu restes groggy tout le temps et que tu n’arrives pas à sortir les mots…" "Ca a été délicat, compliqué. On sentait aussi la gronde des supporters quand on se faisait au Vélodrome. Ils devaient souffrir mais nous aussi", appuie Abardonado.

Il faut alors apprendre à tout compter. Monaco, en 2011, était descendu avec 44 points. Paris s’était sauvé dans les ultimes minutes en 2008. Et Marseille pour… deux buts, après le dernier match à Sedan, en 2000. Les joueurs l’avaient appris un fois dans le vestiaire, après le match. "On est tous sortis grandis de cette histoire-là", se souvient Jacques Abardonado. Les Lyonnais rêveraient de dire la même chose au soir de la 34e journée. 

VJ avec Maxime Tillette et Florent Germain