RMC Sport

OM: Bien plus qu'un coach, Villas-Boas se raconte "comme jamais"

placeholder video
André Villas-Boas, l’entraîneur de l’OM, est ce mercredi soir le premier invité de l’émission "Comme jamais" sur RMC Sport 1 (21h). Dans un entretien exceptionnel, le technicien portugais a évoqué très longuement son quotidien, ses passions, et bien évidement sa carrière, ses réussites et ses échecs. Un parcours tortueux, à l’image de sa relation avec la fonction d’entraîneur. Costume qu’il veut parfois enlever mais qui lui manque dès qu’il ne le porte plus.

Il y a les obsessionnels, les torturés, à la Marcelo Bielsa, qui respirent football, mangent football, dorment football. Il y a aussi les doyens, à la Arsène Wenger ou Jupp Heynckes, qui n’ont jamais voulu raccrocher ou ont toujours repoussé ce moment fatidique, par passion ou peur du vide. Et puis il y a André Villas-Boas: un technicien qui, malgré des débuts précoces, ne s’est jamais vu battre des records de longévité sur un banc. "J’ai toujours dit que je ferai une carrière de 15 ans, je sais que je ne veux pas rester longtemps", rappelle le Portugais, à l’occasion du premier numéro de "Comme jamais", émission qui vous proposera toute la saison une série d'entretiens exceptionnels et intimistes, ce mercredi soir sur RMC Sport 1 (21h).

Abonnez-vous par ici aux offres RMC Sport

Le coach a beau n’aborder avec l’Olympique de Marseille que sa onzième année comme numéro 1, et n’avoir que 41 ans, il est tout à fait capable d’imaginer le club phocéen comme son dernier challenge. Parce que la lassitude le guette? Ce n’est pas l’impression que donne l’ancien homme fort de Chelsea et Tottenham. Avec Villas-Boas, il s’agit plus d’une question d’équilibre. Comme si le coaching n’était pas la chose la plus importante dans son existence. Ou plus exactement, comme si le coaching n’était pas tout.

Le foot, mais aussi la moto et l'aventure

Faute de proposition intéressante, d’offre conforme à ses attentes, AVB n’a d’ailleurs pas hésité à prendre ses distances avec le milieu pendant près de deux ans, après son départ de Shanghai en novembre 2017. L’occasion pour lui de voyager, de voir d’autres gens, de se nourrir d’autres passions. "Je sors toujours avec mes motos, glisse-t-il, je vais dans les montagnes pour faire un peu d’enduro. C’est quelque chose d’ancré dans ma famille, on a l’amour de la course, l’amour des moteurs. Quand j’ai pris cette année sabbatique, avec mes amis je sortais quasiment tous les week-end quand j’étais au Portugal." Le coach est aussi passé de deux à quatre roues à l’occasion du Dakar 2018, et sait déjà qu’il veut "revivre cette sensation exceptionnelle" quand il ne sera plus en fonction.

Aventurier, André Villas-Boas? Un peu oui. "J’aime être dans la nature, c’est ma façon de m’aventurer, observe-t-il. Quand j’étais petit, je partais souvent avec mon père dans les montagnes, dans un parc naturel dans le nord du pays, où j’ai acheté une maison. C’est mon jardin secret."

Villas-Boas au Dakar 2018
Villas-Boas au Dakar 2018 © Icon

"Il y a parfois des moments où tu te retrouves seul, sans rien faire, et c’est là que tu penses à revenir dans le football"

Mais le Portugais, comme chaque homme, a son lot de contradictions. Et c’est quand il s’est le plus éloigné d’un banc que l’élastique s’est tendu, que le vestiaire, que le quotidien et les soucis d’un entraîneur, lui ont manqué. "Quand tu es absent de ce monde, il y a parfois des moments où tu te retrouves seul, sans rien faire, et c’est là que tu penses à revenir dans le football, raconte AVB. [...] Vu l’exigence et la pression que l’on a dans le foot, quand tu es dans une année sabbatique, tu veux profiter des moments avec les enfants, les emmener à l’école, faire des choses diverses… Mais le problème, c’est que quand tu les attends dans l’après-midi, que tu es seul, là tu recommences à penser au foot. Parce que quand tu es au travail (en fonction), tu as toujours quelque chose en tête. Le prochain entraînement, le prochain onze de départ, les suspensions, les joueurs à qui tu veux donner confiance, ceux à qui tu veux mettre la pression…"

Car s’il a d’autres centres d’intérêt, il ne faut pas croire que Villas-Boas n’est pas un passionné de ballon. Le natif de Porto, "fan absolu" du club de sa ville, fréquentait avec assiduité les virages du stade des Antas à l’adolescence, et passait des heures devant les matchs télévisés ou sur les jeux vidéo de simulation. Il reconnait d’ailleurs être tombé dans l’excès à ses débuts comme numéro 1 sur le banc du FCP. "La pression que je me suis mise moi-même, comme je connaissais tout le monde à Porto, c’était quelque chose de difficile, se remémore le quadragénaire. Je n’existais pas pour ma famille, j’étais entraîneur de Porto 24 heures par jour, je passais souvent des nuits blanches. Cette pression intense, à la fin, a été un peu la raison de mon départ. J’étais trop fatigué."

Et surtout, ce comportement ne lui correspondait pas. Villas-Boas, comme glissé en préambule, n’est pas Bielsa. "On a une vision, un style et des méthodes très différents, dit-il de l’Argentin, avec qui il a eu la chance de passer plusieurs heures durant ses mois sans banc. A ce niveau-là, on n’a rien en commun. On préfère parler de principes d’éducation, de vie, de morale, d’expérience…"

Villas-Boas à Porto en 2010
Villas-Boas à Porto en 2010 © Icon

Le coaching, loin d'être une évidence

Pour comprendre ce détachement "relatif", il faut se pencher sur les jeunes années de Villas-Boas au Portugal. Grand fan de foot, le gamin ne s’était jamais imaginé en faire son métier pour autant. Pas comme acteur. Déjà parce qu’il n’était pas spécialement un bon joueur – "J’étais même mauvais, s’amuse l’ancien latéral droit, je jouais seulement en amateur". Ensuite parce que le jeune André était "très introverti", et aussi parce cela ne représentait pas un vecteur d’ascension sociale pour lui, l’enfant de noble famille. "J’ai eu une enfance merveilleuse, nous avons la chance de ne manquer de rien au sein de notre famille, se réjouit-il. J’ai eu une éducation rigide mais aussi flexible, pleine de bon sens, ce que j’essaye de transmettre désormais."

Une éducation qui aurait dû le pousser à faire des études. "Le plan initial, c’était de finir l’école pour aller à l’université, étudier la communication et devenir journaliste, se souvient Villas-Boas. Mon grand-père maternel était journaliste sportif pour le journal A Bola. C’est ce que je voulais faire quand j’avais 17 ans…" Jusqu’à ce que le coaching lui tombe dessus par hasard, au détour d’une rencontre avec le grand Bobby Robson, entraîneur de Porto de 1994 à 1996. "A ce moment-là, mon joueur préféré était Domingos Paciencia, et il ne jouait pas, explique AVB. Robson mettait Sergey Yuran à sa place, et cela m’énervait un peu. C’est pour cela que j’étais allé parler à Robson en le croisant, je lui avais dit: 'Bobby arrête, c’est mon idole que tu mets sur le banc.'" Réponse de Robson: "'Tu viens demain, tu viens à l’entraînement avec moi, et je t’explique pourquoi'." La carrière de Villas-Boas était lancée.

"J'aimerais laisser quelque chose dont je serai toujours fier. Offrir un peu d'émotions et aussi des résultats. Car à la fin, c'est ce qui compte."

Depuis, le Portugais a vécu des moments inoubliables, des émotions indescriptibles. Il a appris le plaisir de la transmission, noué des relations avec les joueurs et signé de juteux contrats. Il a aussi découvert la face noire du métier. "En Angleterre, on a vendu une image de moi qui n’a rien à voir avec la réalité, regrette-t-il. On m’a présenté comme une personne arrogante, distante… Ils (les médias) sont même allés jusqu’à critiquer mon style, qui était pourtant imposé par le club, Chelsea ayant un contrat avec Dolce & Gabbana. […] La presse a été destructrice. Un journal avait écrit: André a tellement changé que maintenant à deux heures de l’après-midi il est déjà chez Harrods, dans les beaux quartiers de Londres, et ne travaille pas. Mais c’était mon jour de repos!"

De quoi lui faire comprendre - un peu plus - que ce costume d’entraîneur pourrait vite l’user? Probablement. Mais rassurez-vous, Villas-Boas n’en a pas fini avec le coaching. Pas encore. "J’aimerais laisser (à l’OM) quelque chose dont je serai toujours fier, glisse-t-il. J’espère offrir un peu d’émotions et aussi un peu de résultats car à la fin, ce sont les résultats qui comptent. J’ai laissé un peu d’histoire au Zénith (sic), comme l’homme des records par exemple. C’est une fierté pour moi. A Porto, il y a eu les quatre trophées en une saison. Alors à Marseille, j’aimerais encore des résultats et des trophées. C’est difficile avec les déséquilibres du foot français, mais c’est possible. C’est le rêve des supporters." Et du coach qui ne fait pas du ballon rond et des terrains son seul horizon. 

"Villas-Boas Comme Jamais", un documentaire exceptionnel à revoir en replay à partir de jeudi sur rmcsport.tv et sur l'appli RMC Sport pour les abonnés. 

Clément Chaillou avec MBo