"Permettre de ne pas mourir": comment fonctionne le défibrillateur que s’est fait implanter Nabil Bentaleb?

Une longue haie d’honneur pour symboliser une interminable attente. Ce jeudi, près de huit mois après avoir été victime d’un arrêt cardio-respiratoire au cours d’un match de foot entre amis, le 18 juin 2024, Nabil Bentaleb a été accueilli sous les applaudissements des salariés, éducateurs et jeunes du centre de formation du Losc pour son grand retour à l’entraînement.
Mercredi, le milieu de terrain algérien (30 ans) a été déclaré apte à rejouer par la commission médicale de la Fédération française de football (FFF). Un "retour prochain" à la compétition est envisagé, sans qu’une date précise ne soit pour l'instant connue.
Plongé dans un coma artificiel après son arrêt cardio-respiratoire puis opéré dans la foulée, Bentaleb fait son retour sur les terrains en étant équipé d’un défibrillateur sous cutané. Ce même dispositif a été implanté à Christian Eriksen, victime d’un malaise cardiaque similaire à l’Euro 2021. Selon L’Equipe, Bentaleb a d’ailleurs scrupuleusement suivi un protocole défini par le même cardiologue que le Danois.
"Comme la personne a fait une mort subite, puisqu’en c’en est l’équivalent, on décide de mettre un pacemaker, qui est un petit boîtier, sous la peau", nous détaille le professeur Alain Ducardonnet, cardiologue et consultant santé pour BFMTV. "Sa fonction est de défibriller. Si par hasard la personne refait un arrêt cardio-respiratoire, la machine est capable d’enregistrer ce qu’il se passe et de délivrer un choc. C’est une espèce de boîtier avec des sondes qui vont dans le cœur et qui écoutent le cœur en permanence. S’il y a une désynchronisation du rythme cardiaque, le boîtier envoie une décharge électrique qui va permettre à la personne de ne pas mourir."
2 cm d'épaisseur et 6-7 cm de diamètre
"Qu’on soit joueur ou pas joueur de foot, à partir du moment où on a fait une mort subite, qu’on ait trouvé la cause ou pas, on ne prend pas de risque et on met quoi qu’il arrive un défibrillateur implantable", précise Alain Ducardonnet. "Après une mort subite, on ne peut pas imaginer qu’on laisse vivre, jouer au foot ou faire quoi que ce soit une personne sans ça. C’est la condition sine qua non."
Durant une intervention qui a duré "une heure au maximum", Bentaleb s’est donc vu implanter un petit boîtier rond de 2 cm d’épaisseur et environ 6-7 cm de diamètre. Comme pour tous les sportifs de haut niveau, ce boîtier a été placé sous la peau dans le creux de l’aisselle pour éviter un choc qui pourrait déplacer les sondes ou endommager le boîtier. Pour un patient "normal", ce défibrillateur est placé au-dessous de la clavicule.
"On change un boîtier comme on changerait des piles dans une télécommande"
"C’est à vie", précise Alain Ducardonnet. "Il y a une surveillance très régulière pour l’usure. On le change tous les quatre-cinq ans. Mais on change un boîtier comme on changerait des piles dans une télécommande, c’est très facile à faire. C’est une technique qui est désormais assez ancienne et donc parfaitement contrôlée."
Cette décision de la commission médicale de la FFF pourrait par ailleurs créer une jurisprudence dans l'Hexagone. Jusqu’ici, aucun joueur équipé d’un tel dispositif médical n’a foulé les pelouses du championnat de France.
"Le vrai problème, ce n’est pas tellement le boîtier, sauf s’il est mal placé et qu’il y a un risque de choc, de contusion. C’est surtout le cœur en lui-même", tranche Alain Ducardonnet. "Est-il en bon état? Le muscle cardiaque est-il en bon état? Des zones sont-elles de mauvaise qualité? Tout ça a fait l’objet du bilan médical. J’ai connu ça sur le Tour de France, où j’étais médecin. On se réunit à plusieurs experts et on décide qu’il y a plus de risque de se faire écraser en traversant la rue que de refaire un accident cardiaque", conclut le consultant santé de BFMTV.