Quand Fernandez et Courbis se « clashent » au sujet de Bielsa

Rolland Courbis - -
La gestion des matches
Fernandez : « C’est un homme assez méthodique, qui cherche à mettre en place un système. Il a une façon à lui d’attaquer, de prendre un maximum de risques. C’est vrai que parfois, son équipe peut se faire surprendre. Mais c’est innovant parce que son équipe, lors de la première partie de saison, a montré des qualités d’état d’esprit, de collectif de jeu, elle a marqué des buts. C’est vrai qu’en deuxième partie de saison, elle s’est un peu relâchée. Je n’irai pas jusqu’à dire que ce n’est que de la faute les joueurs, car c’est un collectif. Mais cet entraîneur est venu avec quelque chose de nouveau et il nous l’a apporté. »
Courbis : « Je pense que quand on est entraîneur, quel que soit le niveau, on doit avoir un souci. C’est déjà d’analyser la valeur d’un effectif et après essayer de lui transmettre ce qui lui va le mieux pour avoir la satisfaction d’en avoir tiré le maximum. Je vois un gars extraordinairement passionné, très sympa, très malin dans sa communication. En ce qui me concerne, ce n’est pas qu’on en fait trop, c’est que je ne comprends où est-ce qu’il veut en venir. On me parle d’innover quand on évoque le marquage individuel en 2015 ? Si Guy Roux débarque aujourd’hui à River Plate ou à Boca Juniors et qu’il demande aux quatre défenseurs de faire du marquage individuel et à ses latéraux d’avoir la responsabilité d’un couloir qui fait 105m, comme le faisaient Vahirua, Cocard ou Diomède, combien de temps resterait-il ? J’ai vu Guy Roux, et je pense que Bielsa sera très intelligent aussi, s’adapter à l’évolution du football. »
Sa méthode d’entraînement
Fernandez : « Aujourd’hui, on a affaire à des mentalités totalement différentes. Comment tu peux accepter quand un jeune te dit qu’il est fatigué ? Comment peut-il dire qu’il est fatigué ? A 20 ans, tu ne peux pas être fatigué ! Je suis passé par là, on ne peut pas le dire. L’intensité et le rythme qu’on peut mettre dans un entraînement, quand tu es professionnel, tu dois savoir l’intégrer dans ton travail. Les joueurs sont dans une entreprise, on ne leur demande qu’une seule chose, c’est de travailler et de le faire du mieux possible, d’être exigeants, d’avoir un peu d’orgueil. Ils sont rémunérés royalement, en contrepartie on leur demande de donner le maximum sur le terrain. »
Courbis : « On a quand même besoin, à un moment, d’une certaine décontraction, sans pour autant ne pas être concentré. S’il me demande ce qu’il demande à Thauvin ou Imbula, je n’y arrive pas (rires) ! On est obligé d’adorer Bielsa et sa passion. Mais on peut ne pas être d’accord. Je peux par exemple ne pas être d’accord quand j’entends qu’en France on est contre Bielsa. On peut poser quelques questions. Quand tu as dans ton groupe Alessandrini, Thauvin, Payet, Ayew, Gignac et Batshuayi, à l’intersaison tu as besoin d’Ocampos par rapport à ce qu’il te manque ? Et vous voulez terminer combien avec ces joueurs-là, douzièmes ? »
La passion autour de lui
Fernandez : « Il a mis des choses en place et fait quelque chose de remarquable, c’est que le Vélodrome s’est remis à y croire. Le Vélodrome est plein, du monde revient. Les supporters sont heureux, tu ne peux pas les en empêcher. Ils aiment cet homme-là. Il est fascinant par son travail et il est honnête. Pour une fois qu’il y a quelqu’un d’honnête, on est en train de porter un jugement négatif sur quelqu’un d’entier, qui est vrai ! Un mec qui travaille 24h/24, on va commencer à le critiquer ? Il attaque. Il dit que c’est facile de faire une équipe pour défendre, mais que c’est plus compliqué d’en faire une pour attaquer. L’intelligence dans le jeu offensif, ce n’est pas donné à tout le monde. Les supporters sont contents d’avoir du spectacle. Ils ne sont peut-être pas contents à la fin du match mais au moins, ils sont heureux et ils ne s’emmerdent pas. Ils payent leur place et ils en ont pour leur oseille ! »
Courbis : « Ce mec-là est tellement passionné que cette passion, tu es obligé de la respecter. Quand tu le vois en train de tout expliquer dans le moindre détail, c’est que pour lui c’est 24h/24 du football. Il est arrivé avec beaucoup d’habileté. Pour arriver, avec les résultats depuis le mois de janvier, à avoir ces ovations et cette cote, je suis plein d’admiration. Après les matchs ratés, il y a une tactique psychologique à partir du moment où il dit que c’est de sa faute. Je le trouve d’une habileté remarquable. Ce qu’il est arrivé à transmettre aux supporters marseillais, qui sont des passionnés et normalement des impatients, c’est à faire comprendre aux gens : "Ne vous inquiétez pas, en insistant ça va marcher". »