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Incident Kita-supporters : la vérité

Le président du FC Nantes, Waldemar Kita.

Le président du FC Nantes, Waldemar Kita. - -

Le 8 janvier à Canet-en-Roussillon, en marge d’un match amical, des incidents ont opposé le président du FC Nantes Waldemar Kita et son staff à des supporteurs hostiles à la direction. RMC Sport fait parler les acteurs et les témoins des faits.

C’est l’histoire d’un « pétage de plomb » (1). Celui des dirigeants nantais qui en sont venus aux mains, au début de l’année 2010, avec une petite poignée de supporteurs des Canaris qui manifestent régulièrement leur hostilité à coup de slogans comme : « Tu dis que tu as tout réussi dans ta vie mais tu as déjà oublié ton passages à Lausanne », « Pigeon d’Or 2009, on n’en veut pas », « La fanfare à la Beaujoire, on n’en veut pas »… Début janvier donc, le boss du FC Nantes et son staff technique ont craqué. Bousculade, échauffourée, poings qui volent et noms d’oiseaux. Les dirigeants parlent « agression », « insulte », « crachat ». Les supporteurs répondent « passage à tabac », « menaces »… Des témoins ont vu, des témoins ont parlé. « Putain, le club est tombé bien bas », conclura l’un d’eux. Voici ce qu’il s’est passé le 8 janvier, à l’occasion d’un match amical de trêve hivernale, entre Waldemar Kita, son staff, et trois supporters remontés.

Le contexte – Le FC Nantes est en stage à Canet-en-Roussillon. Arrivée mardi 5 dans les Pyrénées-Orientales, l’équipe de Jean-Marc Furlan termine son séjour par un match amical, initialement prévu contre le club de CFA de Balma (forfait en raison des chutes de neige), puis finalement disputé au pied levé le vendredi 8 janvier à 20h sur la pelouse du stade Saint-Michel contre le Perpignan Canet Football Club (DH). Il fait froid, le mercure flirte avec les minimas, mais la logique est respectée : Nantes 3 – Perpignan-Canet 0. Buts de Darcheville (13e, 22e) et Bekamenga (67e).

Les faits – Le « 66 » étant une terre de rugby, abritant le champion de France Perpignan, le Stade Saint-Michel peine a garnir ses tribunes. D’autant que les Sang et Or reçoivent le Racing-Métro 92 de Chabal le soir même à Aimé-Giral. Une cinquantaine de personnes « garnissent » les travées. En contrebas, trois supporteurs nantais, accoudés à la main courante, chambrent ouvertement la direction du FC Nantes, abritée du froid quelques mètres devant dans une guérite. Les slogans railleurs (voir plus haut) ne passent pas inaperçus du public, des journalistes et des intéressés. A la mi-temps, tout ce petit monde va se réchauffer autour de la buvette. Deux des supporteurs croisent alors Waldemar Kita, son fils Franck, Gilles Favard, conseiller du président, et Yves Ribardière, intendant du club. Une échauffourée éclate, avant que des membres du club local et des spectateurs n’interviennent pour y mettre un terme. Le match reprend. Les supporteurs se sont tus. Pour autant, ces derniers décident de ne pas en rester là. A 22h35, sur recommandation de la gendarmerie de Canet-en-Roussillon, deux d’entre eux vont déclarer une main courante au commissariat central de Perpignan (lire ci-contre). Que dit-elle ?

Version des supporteurs : « Passage à tabac » – La déclaration a pour objet « Coups et blessure ». Y est notamment écrit : « A la pause, mon ami est allé à la buvette et s’est retrouvé face au président qui lui a demandé de s’expliquer. Il lui a répondu que nous souhaitions son départ. C’est à ce moment là que quatre personnes lui sont tombées dessus et l’ont passé à tabac. Ces personnes se nomment Waldemar Kita, Franck Kita, Yves Ribardière et Gilles Favard. Lorsqu’il est revenu, il nous a expliqué les faits. Je suis donc descendu et j’ai simplement dit à Yves Ribardière que nous déposerions plainte pour ces faits. Il m’a donc attrapé par la manche du blouson, l’arrachant et m’a plaqué contre sa voiture en m’invectivant. »

Version de la direction : « Alcool, mollard et insulte » – Waldemar Kita renvoie la responsabilité sur les supporteurs. « Le type était ivre, il est venu me cracher dessus, me provoquer, c’est tout juste s’il n’a pas voulu se battre avec moi », a-t-il déclaré à RMC Sport (2). Le propriétaire du FC Nantes dément que sa garde rapprochée ait porté des coups. « Personne n’a tapé. On l’a écarté. On ne lui en a pas mis une dans la figure. » Gilles Favard affirme que « le président a été molesté par un soi-disant supporteur. Quand je suis arrivé, le président essuyait un mollard. Je n’ai rien vu d’autre. » Une précision cependant contredite par Kita : « C’est chez nous qu’il y a eu un blessé. L’autre est tombé sur Gilles Favard. » Invité à réagir, Yves Ribardière n’a pas souhaité épiloguer : « C’est du passé. On ne va pas mettre de l’huile sur le feu. S’ils ont fait une main courante, de notre côté on a pris nos dispositions. »

Des témoins : « Echauffourée, pétage de plomb, inquiétude » – Des dirigeants et des membres du Canet-Perpignan étaient naturellement présents. Claude Verdu, directeur technique : « Il y a eu une échauffourée entre des supporteurs et le staff technique. Ces supporteurs ont insulté le président pendant tout le match. Ils insistaient sur le fait que le club ne faisait pas confiance aux jeunes. Ils disaient ‘Kita casse-toi’. On ne peut pas vraiment dire que ce soit grossier. Il ne faut pas en faire une affaire d’Etat, il n’y a pas eu de coups mortels. »
Roger, amoureux du FC Nantes, installé à Cabestany, à une dizaine de kilomètres du Canet, a vu la scène de la mi-temps : « Des coups de poings sont partis. Un des dirigeants a pété les plombs. Il a pris le supporteur par le col. Le jeune avait un bras dans le plâtre, il se débattait. L’autre, le poussait et il s’est retrouvé contre une voiture, le dos contre le pare-brise arrière. Les gens leurs disaient d’arrêter. Si on n’avait pas été là, le supporteur aurait ramassé. » Roger affirme aussi que pendant la première période, les supporteurs ont été injurieux envers la direction nantaise, traitant notamment Kita d’ « enculé ». Une version qui n’a pas été recoupée par d’autres témoignages. Roger, amoureux des Canaris de la première heure, fait part de son inquiétude après ce qu’il a vu. « C’est une broutille. Pour moi, les torts sont partagés, c’est du 0-0. Mais après le match, avec les supporteurs, on s’est dit : ‘Putain, le club est tombé bien bas !’ ». Difficile de le contredire.

(1) Les faits ont été évoqués pour la première fois par RMC Sport le 11 janvier dans l’article « Kita pris dans une échauffourée avec un supporteur ».

(2) A l’exception de l’extrait de la déclaration de main courante, tous les témoignages ont été recueillis par RMC Sport.

La rédaction - Louis Chenaille