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Ligue 2: comment Sochaux en est arrivé si proche du dépôt de bilan

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Le gendarme financier de la Ligue de football professionnel devrait sceller le sort du FC Sochaux ce mardi, et entraîner la relégation en National d'un club qui pourrait perdre son statut pro et risque le dépôt de bilan.

Un monument en péril

Cette fois, la messe est dite. La DNCG doit confirmer ce mardi la rétrogradation administrative du FC Sochaux, prononcée en première instance le 28 juin dernier. "Le miracle n’aura pas lieu", désespère L’Est Républicain en Une de son édition. Le club franc-comtois n’apportera pas les garanties nécessaires devant le gendarme financier, rapporte France Bleu Belfort-Montbéliard, fataliste. Le club a pourtant multiplié les initiatives pour générer du cash, en vain. L’exode massif de joueurs (I.Sissoko, Weissbeck, Alvero, Doumbia, A.Kalulu, Aaneba, Agouzoul...) a permis de réaliser des économies conséquentes, mais celles-ci demeurent insuffisantes.

Le directeur général exécutif Samuel Laurent, pointé du doigt comme étant le premier responsable de ce désastre, s’était même déplacé jusqu’en Chine pour convaincre le propriétaire Nenking de remettre au pot. Las, il est revenu bredouille de son périple. L’actionnaire chinois, qui avait versé 10 millions d'euros en juin 2022 pour passer la DNCG, a jeté l’éponge. Lundi, la direction a informé les joueurs et les salariés que l’argent n’était pas arrivé, rapporte L’Est Républicain.

Confronté à des difficultés sur le marché de l’immobilier en Chine, Nenking n’est plus en capacité de subvenir aux besoins des Lionceaux. Seul un repreneur, susceptible d’éponger les dettes du club, pourrait lui permettre de présenter un budget pour repartir en National 1. Mais sans un transfert de fonds d’environ 11 millions d’euros, c’est le dépôt de bilan et le risque d’une liquidation judiciaire immédiate qui menacent ce monument du football français, qui pourrait repartir en National 3, voire totalement disparaître.

Comment en est-on arrivé là ?

Dominé la saison dernière par Auxerre en barrage d’accession à l’élite, Sochaux a longtemps lutté pour la montée en Ligue 1 lors du dernier exercice. Troisième de Ligue 2 à la 30e journée, le club franc-comtois s’est liquéfié, terminant la saison par sept défaites de rang. Un désastre. Toujours pensionnaire de Ligue 1 dans les années 2000, avant de connaître la relégation à l’issue de la saison 2013-2014, Sochaux avait tout misé sur la saison 2022-2023 pour accéder à l’étage supérieur et éponger ses dettes.

Pour ce faire, il a pris des risques financiers, en menant un train de vie bien au-dessus de ses moyens, et creusé son déficit (estimé à 22 millions d’euros) en offrant des salaires hors-normes pour un club de sa dimension. Les départs de joueurs se sont enchaînés ces dernières semaines pour alléger la masse salariale, mais le mal était déjà fait. L’effondrement du FC Sochaux ne date pas d’hier, et le malheur qui survient n’est que l’épilogue d’une triste agonie.

Le FC Sochaux vit une longue descente aux enfers depuis 2015, et le désengagement de Peugeot, fondateur et actionnaire depuis 1928. Le club est alors vendu à la société chinoise Ledus, spécialiste des éclairages et filiale de Tech Pro. "Pour 50.000 euros, et pas les sept millions qui ont été annoncés, rappelle Me Yanis Zoubeidi, avocat du FC Sochaux dans l’affaire de la montée en Ligue 1 du RC Lens. Cela a même été expliqué par l’un des intermédiaires qui, au passage, a touché 170.000 euros de commission sur la vente, soit plus que le prix de cession du club. Le ver était dans le fruit." Avec un déficit structurel de 5 millions d'euros par an, les passages devant la DNCG s'enchaînent.

De 2018 à 2019, Sochaux n’est plus qu'un club satellite partenaire d'un consortium espagnol, Baskonia Alavés. Les Basques entreprennent de tout revoir dans le fonctionnement du club, mais se désengagent plus tôt que prévu, alors que le contrat devait normalement durer trois ans. Seul maître à bord, le propriétaire du club, Wing Sang Li, se retrouve en difficulté, avec des emprunts qu'il est incapable de rembourser. Quelques mois plus tard, Nenking, le créancier de Tech Pro, sauve le club de la relégation en apportant quatre millions d’euros. Ce n’est qu’en avril 2020 que le club change une nouvelle fois de propriétaire.

"On va disparaître dans l'indifférence générale"

Conglomérat spécialisé dans l’immobilier, Nenking préside désormais à la destinée d’un fleuron régional. La passation de pouvoir engagée un an plus tôt se concrétise, mais le flou demeure, et le comportement de l’actionnaire majoritaire ne rassure pas les supporters. L’avenir leur donnera raison. "Trop de gens ne connaissant rien au foot et au club sont arrivés", peste Jean Fauverge, entraîneur de l'épopée sochalienne de 1980-1981 en Coupe de l'UEFA, auprès de l'Est Républicain.

"La personnalité de Samuel Laurent est manifestement passée au-dessus de tout. Il disait ne rien connaître au foot, mais il ne connaît rien non plus en gestion d’entreprise", tonne de son côté Jean-Claude Vienot, président de l'association FCSM. "On va disparaître dans l’indifférence générale", déplorait lundi soir, dans l'After, Benjamin, supporter du FC Sochaux depuis vingt ans, . "On nous arrache une partie de nous et on ne peut rien faire. On a plus que nos yeux pour pleurer. On a juste envie de vomir sur ces gens qui sont responsables de ce désastre, qui signe la fin d’une histoire de 95 ans."

QM