"Personne ne nous attend gagnants": les confessions de Thomas Meunier avant Liverpool-Lille

Thomas, expliquez-nous cette série incroyable de 21 matchs sans défaite (record du club) avec cette dernière victoire contre Nice (2-1). Une semaine parfaite avec aussi la qualification Coupe de France à Marseille...
Ça se passe plutôt bien quand on voit la concurrence des équipes adverses avec la qualité de leur noyau (effectif), je ne m'attendais pas à ce qu'on ait 21 matchs sans défaite.
Qu'est-ce que ça veut dire exactement ?
Ça veut dire qu'il y a de la régularité, qu'il y a un groupe qualitatif, qu’il y a un bon staff, un bon groupe de joueurs et tout ça forme l'ensemble lillois, qu'on voit actuellement comme vendredi avec le match contre Nice où en première période, on perd face à une équipe qui a des qualités. En deuxième mi-temps, on parvient à inverser la situation. On a un petit peu toutes ces qualités d'une équipe qui peut prétendre à gagner quelque chose d'ici la fin de saison. Il y a beaucoup de passion aussi, de régularité, d'envie et de motivation. Pour l'instant on est un bon exemple d'une équipe stable qui donne tout à chaque match.
On sent une force mentale dans l’équipe. On l’a vu face à Nice, où vous êtes en difficulté en première mi-temps, ou l'égalisation de Marseille en fin de match en Coupe. À l’Atletico de Madrid, vous êtes menés et vous gagnez en gardant votre sang-froid.
Oui, maintenant on a eu le coup inverse quelquefois. Lyon par exemple, à Nice aussi, à Montpellier. Ces matchs devaient en principe nous apporter des points. On a toujours quelques soucis de gestion en fin de rencontre, c’est arrivé quelquefois sans avoir trop de conséquences puisqu’en fin de compte ce ne sont pas des matchs que l’on perd. En revanche, dans les gros matchs, on était encore plus présent qu’habituellement comme à Marseille, à Nice, l'Atlético, le Real, à la Juventus. Même contre Paris, où c’était une défaite (1-3, en septembre, NDLR), on a très bien joué. Je pense que c’est un groupe qui ne doute pas de ses qualités et un staff qui parvient à les mettre en avant. Moi je suis très heureux parce que je ne connaissais pas vraiment le groupe en arrivant à Lille, je le suivais en peu en Coupe d’Europe l’année passée. Ce que j’ai vu depuis le début, que ce soit au niveau des transferts ou au niveau des plus jeunes, comme chez les joueurs confirmés que j’avais déjà croisés quand j’étais au Paris Saint-Germain, c'est très qualitatif et ça promet pour l’avenir.
Place désormais à Liverpool et Anfield où vous avez joué avec le Paris Saint-Germain (victoire de Liverpool 3-2 en septembre 2018). Quelle est l’atmosphère de ce stade, est-ce que c’est quelque chose de particulier ?
Ça reste un très beau souvenir parce que j'avais pu marquer, et du pied gauche, je tiens à le souligner ! C’était très chouette, il y avait beaucoup d'intensité, c'est vraiment à l’anglaise et moi j'aime ce football. En revanche, au niveau de l’ambiance, je trouve que c'est très réactionnel. Il y a "You’ll never walk alone" au début qui file un peu les chocottes. Si le match n'est pas emballant, il se passera rien dans les tribunes. Il n’y a pas non plus en en Angleterre cette culture des tifos, des ultras, c'est très rare de voir ça là-bas. Les stades sont toujours plein et les gens adorent le football mais ce n’est pas la folie non plus. Maintenant, jouer Liverpool, c'est surtout aussi ce côté mythique de jouer dans un club qui a écrit l'histoire du football européen et anglais.
C’est aussi un stade chargé d’histoire et qui a évolué avec son temps ?
Oui exact. Pour avoir fait plusieurs clubs en Angleterre comme Manchester, Chelsea, Birmingham, franchement, j'aime ce côté un peu traditionnel. Par exemple, jouer à Arsenal dans le nouveau stade, ce n'est pas pareil que jouer à Highbury. C’est pareil pour Tottenham mais à Anfield, j’aime bien cette modernité. On garde le côté ancien, on le met à jour et on fait ressentir aux équipes adverses que c'est le foot anglais, surtout pour les matchs en Coupe d’Europe parce que tout ça ne représente pas seulement un club, c'est une culture du football. Elle est encore belle et bien présente en Premier League. C'est ce côté à l'ancienne qui fait qu'on se souvient de ce genre de moment.
Allez-vous parler partager ton expérience d’Anfield avec les plus jeunes? Comment appréhender l’entrée sur le terrain avec "You’ll never walk alone" face à l’une, voire la meilleure équipe du monde en ce moment ?
Ils sont très bons en ce moment, d'ailleurs vendredi lors de la mise au vert, on regardait le match pendant le repas contre Nottingham et c'est impressionnant. Après ça reste Liverpool, ils ont toujours eu une excellente équipe et de très bons joueurs. Je pense que c'est un privilège de pouvoir affronter ce genre d'équipe mais il ne faut pas aller là-bas en se disant qu'on va en prendre sept et qu’on n'aura pas voix au chapitre. C'est un moment à savourer, il ne faut pas y aller avec la peur ou le stress puisque de toute façon, personne ne nous attend gagnants.
Qu'est-ce qu'on a de plus à perdre ?
Si ce n’est que de prendre du plaisir et savourer justement ce moment jusqu'au bout, parce qu’avec le parcours qu'on réalise en coupe d’Europe, pourquoi ne pas créer quelque chose.
Vu vos résultats contre le Real, la Juve et l’Atlético de Madrid, Lille dégage une force. Ça vous donne de l’espoir ?
Oui, c'est ça, c'est notre force. Ce qui est bien, c'est que l’on ne se sous-estime pas Mais je ne pense pas non plus qu'on ait un visage arrogant. Aux yeux extérieurs, on fait toujours ce qu'on doit faire. Parfois, on peut faire plus mais la Ligue des champions, tout le monde sait très bien que c'est une atmosphère différente. C'est une autre motivation et surtout de jouer dans des endroits comme ça, c'est quelque chose. Il y a des joueurs qui n’affronteront peut-être jamais Liverpool, Arsenal ou Manchester United. C'est pour ça que c'est important de tout donner, de ne pas avoir de regrets quand on affronte ce genre d'équipe, parce qu’il faut que ce soit un match pour "l'histoire".
On vous sent épanoui à Lille, proche de votre Belgique...
C'était aussi l'optique de venir ici. Après mes six mois en Turquie (Trabzonspor), j'avais encore un an de contrat et c'était super. Ça ne m'aurait pas du tout dérangé d’y rester parce que j'ai vraiment apprécié ma courte expérience mais je devais faire une croix sur la famille et sur les enfants et ça, ça allait être compliqué. Je l'ai bien ressenti durant les cinq mois que j'ai passés là-bas. J’avais d’autres options et celle de Lille cochait le plus de cases. Pour l'intégration, c’est un environnement francophone, donc c'est plus facile. C'est à la frontière belge, on n'est pas loin de la famille. La culture aussi... Depuis qu'on a 18 ans, on a vécu un peu à l'étranger et même en étant au Club Bruges, c'est-à-dire en Flandre, c'est une autre langue, une autre culture et donc on s'est dit qu’on allait va peut-être avoir un goût de ce qui nous attend plus tard. Ici à Lille, je suis vraiment comblé. Ma famille aussi est contente de me voir beaucoup plus souvent que d’habitude.