PSG-Real: mise en garde d'Eto'o, caché dans un coffre... le témoignage fort d'Anelka sur son passage à Madrid

La folie lors de sa signature au Real à l'été 1999
"C’est la folie à mon arrivée. Quand tu viens d’Angleterre (il s'engage pour 35 millions d'euros en provenance d'Arsenal, ndlr) et que tu as l’habitude d’avoir une vie privée tranquille, c’est totalement différent en Espagne. Ça a été difficile. En Angleterre, quand tu es sur le terrain, tu as les fans derrière toi. Et quand tu sors du terrain, tu es comme tout le monde. C’est ce que j’aimais en Angleterre. En Espagne, c’est fini. Les photographes sont partout où tu vas. Le patron du restaurant où tu es a pris le soin d’appeler la presse… C’est la lumière tout le temps et c’est difficile si tu ne cherches pas ça. Moi j’étais à l’opposé de ça. Quand je signe au Real Madrid, c’est Lorenzo Sanz (alors président du Real) qui me prend et pas le coach (John Toshack). Toshack est d’ailleurs viré deux-trois mois plus tard et Vicente Del Bosque arrive. La première fois que je vois Toshack, il me serre la main et me dit : "On se voit sur le terrain...""
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Le vestiaire contre lui, la mise en garde d'Eto'o
"C’est très difficile dans le vestiaire. Le premier jour, je n’ai même pas de place attitrée... J’attends que tous les joueurs arrivent. Ils me disent tous : "Ça c’est ma place." Il y a parfois deux joueurs à la même place. Je n’ai pas de place, je dois attendre qu’on m’en donne une. A ce moment-là je me pose des questions, je me dis : "Qu’est-ce que je fais là ?" Le premier jour où j’arrive, Samuel Eto’o vient me voir et me dit de faire attention aux anciens parce qu’ils ont été voir le président pour lui demander pourquoi il a pris Anelka alors qu’il y a Fernando Morientes. Quand on me dit ça, je sais que ça va être très compliqué. La suite a prouvé que c’était un enfer. A ce moment-là c’est compliqué avec beaucoup d’Espagnols. J’arrive dans une famille, dans un grand club avec beaucoup de pression. Il faut que je prouve sur le terrain."
Un jeu pas adapté au Real
"Je suis en concurrence avec Morientes et Raul à mon poste, et en plus je ne suis pas bon sur le terrain. Avec les Espagnols, c’est compliqué. Je ne vais pas dire que Raul était le problème, j’ai beaucoup de respect par rapport à tout ce qu’il a fait. Je ne parle pas espagnol à mon arrivée au Real. Et je ne veux pas m’intégrer. Le fait que Samuel (Eto’o) me dise de faire attention fait que je suis sur la défensive. Je ne fais pas les efforts. Et je ne fais pas la différence sur le terrain. Le jeu est complètement différent de celui d’Arsenal. Moi j’avais l’habitude de jouer en contre, je pensais qu’ils allaient utiliser mes qualités. Ils voulaient un buteur. Quand je voulais jouer vite vers l’avant, ça ne servait à rien. J’ai travaillé mes défauts, mais je n’ai pas montré mes qualités."
La rupture avec Del Bosque
"Est-ce que l’arrivée de Del Bosque (en novembre 1999) change beaucoup de choses ? Non, mais je respecte beaucoup ce coach. C’était la même équipe avec Del Bosque. Je dois m’adapter au jeu. A chaque fois que je ne suis pas bien, on me remet sur le banc. Quand tu es attaquant, tu as besoin de confiance. Il y a ensuite ce match contre Barcelone (en février 2000) où je marque. Je joue le match suivant et là je ne marque pas donc on me remet sur le banc. Je dis alors à Del Bosque qu’on doit parler parce que j’ai besoin de confiance. Pourquoi on me remet sur le banc alors que Morientes lui peut enchaîner cinq-six matchs sans marquer ? Je demande à parler avant l’entraînement. On me dit non et on me demander d’aller m’entraîner. La façon dont ils me l’ont dit... ça ne pouvait pas passer. Ils m’ont dit qu’ils voulaient parler après l’entraînement, moi je voulais parler avant. Après on m’a convoqué et on m’a dit : "Tu as intérêt à être là demain." Et je ne suis pas venu."
L'anecdote de Fred Hermel sur Anelka... qui sèche l'entraînement puis se cache dans le coffre d'une voiture
Fred Hermel, spécialiste du football espagnol pour RMC Sport, était correspondant à Madrid pour France-Soir lors du passage d'Anelka au Real. Dans "Rothen s'enflamme", il est revenu sur cet épisode qui a amené le buteur français à sécher des entraînements.
Fred Hermel : "On voit ce jour-là que sa voiture n’est pas là à l’entraînement. La deuxième fois qu’il ne vient pas à l’entraînement, tous les journalistes se rendent chez Anelka. On est 30 journalistes devant chez lui. Huit heures plus tard, il n’y a plus qu’un journaliste du journal AS et.. moi. Un pote de Nicolas sort les poubelles, je lui fais signe et on me fait entrer. Je m’attends à tomber sur un joueur triste et je vois un mec détendu qui joue au ping-pong. Je commence à jouer au ping-pong avec lui et il me donne une très belle interview. On pensait qu’il était déprimé, alors que pas du tout. J’étais correspondant pour France Soir."
Anelka : "Moi je fais un tennis-ballon ! (rires) Je vois les journalistes sur les toits de voitures, ils filment au-dessus des sapins... Après cet épisode je suis suspendu un mois. Je rentre à Paris. Je pars à l’aéroport dans le coffre d’une voiture parce que je ne veux pas qu’on sache que je parte. Je pars dans le coffre, mon frère conduit, il me dépose au niveau des arrivées de l’aéroport pour esquiver tout le monde. Quand je reviens, la presse est déjà là quand les portes de l’avion commencent à s’ouvrir. Madrid c’est incroyable. Il faut être fort. C’était dur."

Ses deux buts en demi-finale de C1 contre le Bayern
"Rien ne change, mais je réussis à marquer (en mai 2000, à l'aller et au retour face au Bayern Munich en demi-finale de la Ligue des champions). Avant cette demi-finale de C1, il ne faut pas oublier qu’il y a un match où je me fais siffler alors que je suis sur le banc. A la mi-temps, le coach me dit d’aller m’échauffer. Je me fais siffler par 90.000 spectateurs. J’ai la chance de marquer contre le Bayern, ça se passe bien après ça avec les supporters. Mais je n’oublie pas. Je n’ai pas de sentiment de revanche. On gagne la finale après. C’est le plus important. Je suis titulaire lors de la finale. Ça allait de mieux en mieux."
Un départ inéluctable
"Il ne faut pas oublier que je joue quasiment toute la saison à droite alors que je suis un attaquant de pointe... Avec Raul quand on jouait tous les deux sur le terrain, on s’entendait très bien. La difficulté, c’était de jouer à trois avec Morientes. Cette victoire en finale de la Ligue des champions est importante, j’ai senti que j'avais fait quelque chose pour le club. Mes deux buts contre le Bayern font que c'est un peu grâce à moi qu’on gagne la C1. (...) Mon état d’esprit, c’est qu’il s’est passé tellement de choses dans la saison qu’il est presque impossible que je reste malgré mes buts. Je sais que je ne peux pas faire deux saisons comme ça. C’est le seul endroit où je ne me suis pas entendu avec les joueurs."