Manchester City-Sheffield: de la D3 aux portes du top 6, le renouveau des Blades

“Ce n’est pas le résultat que l’on espérait, ni la performance d’ailleurs”: Chris Wilder, l’entraîneur des Reds & Whites, en voulait plus. Juste après le match nul concédé contre Watford (1-1) jeudi, le manager de 52 ans est apparu visage fermé face aux journalistes. Une scène quelque peu surprenante au regard de la place occupée par son équipe Sheffield United (septième après 19 journées, à trois points de Chelsea). Une performance impressionnante pour cet effectif composé, en majorité, par des joueurs qui évoluaient en Championship la saison passée. Certains, à l’instar de John Fleck (28 ans) l’inusable milieu de terrain écossais, étaient déjà présents en League One, que le club a quittée en 2017.
En près de trente ans, Sheffield n’était apparu qu’à deux reprises en première division: de 1992 à 1994 et de 2006 à 2007, avant son retour il y a quelques mois. Trois saisons désastreuses soldées par deux relégations. De rares fulgurances donc, pour cette belle endormie depuis la fin des années 1970. Mais en 19 journées cette saison, elle aura su balayer les critiques qui envoyaient les pensionnaires de Bramall Lane à la dernière place du classement.
Une innovation tactique qui a impressionné Bielsa
Au-delà de l’aspect comptable, les observateurs s’accordent pour dire que les hommes de Chris Wilder sont une équipe plaisante à voir jouer. Disposés dans un 3-5-2 bien regroupé, ils évoluent avec des principes bien établis. A l’heure où beaucoup d’équipes plus modestes ou fraîchement promues choisissent d’évoluer bas sur le terrain, les Blades font tout le contraire.
L’exemple même de cet aplomb tactique se révèle lors des phases offensives de l’équipe: les deux défenseurs centraux excentrés viennent apporter un surnombre sur les côtés en se plaçant devant les ailiers. "Si j’étais assis avec des amis à la terrasse d’un café, je leur dirais que l’entraîneur de notre prochain adversaire, Chris Wilder, est une personne qui propose une innovation que j’avais rarement vue auparavant." Ces mots prononcés par Marcelo Bielsa, avant une confrontation contre Sheffield en décembre 2018, résument parfaitement l’aplomb tactique de cette équipe.
Le 3-4-1-2 audacieux de la saison passée avait conquis le coach argentin. Quelques mois plus tard, c’est un autre grand coach en Angleterre qui est tombé sous le charme de la formation du Yorkshire: Jürgen Klopp, après la victoire de son équipe à Bramall Lane (1-0) le 28 septembre 2019, s’était glissé dans le bureau de Wilder et son staff pour "prendre une bière avec lui et discuter de nos équipes respectives".
Pas de folies cet été
Le symbole de ce Sheffield qui marche réside également dans la stabilité de son effectif. Cet été, les Blades ont dépensé 47 millions d’euros durant le mercato estival, bien loin des 148 millions injectés par Aston Villa. Les profils des joueurs transférés (Oliver McBurnie, Callum Robinson et Lys Mousset, trois attaquants) ont été ciblés et supervisés depuis plusieurs mois. Ces trois apports offensifs sont venus renforcer le noyau dur de l'équipe composé, pour la majorité, de joueurs arrivés libres ou à un prix peu élevé (Lundstram, titulaire inamovible au milieu de terrain est arrivé pour 560.000 euros).
Wilder, figure du club qui impressionne ses adversaires
Et pour encadrer cet ensemble rien de tel qu’un homme baigné dans ce club depuis des décennies. Chris Wilder, originaire de Stocksbridge dans la banlieue proche de Sheffield, a littéralement tout fait ici. De ramasseur de balle à coach, passant par joueur et supporter, il incarne le passé et le présent du club. Une figure pour ses joueurs et les fans du deuxième club de la ville (Wednesday a été créé en 1867, douze ans avant United), qui rassure.
La plupart des Blades n’ont pas d’expériences à ce niveau, et c’est ce qui faisait dire aux observateurs comme au grand public qu’ils n’allaient pas se maintenir en Premier League. Pour l’instant, tous les voyants sont au vert: une place aux portes du top 6, des gros qui ont buté sur l’enthousiasme et l’audace de Sheffield United (3-3 vs Manchester United, victoire 1-0 contre Arsenal, 2-2 à Stamford Bridge et 1-1 à Tottenham). De quoi laisser naître de l’espoir chez les supporters? Pour l’instant, les joueurs “ne se projettent pas plus loin que le prochain match” selon Enda Stevens, l’arrière droit irlandais. L'hiver est parfois doux dans le Yorkshire.