
Premier League: l’heure de la grande révolution à West Ham?

- - AFP
Il est l’entraîneur qui a fait mieux que Pep Guardiola. Car si le Manchester City du Catalan a impressionné la saison dernière en empilant les records et en pratiquant un jeu d’exception, un record lui a résisté : celui du nombre de buts inscrits en Angleterre sur un même exercice toutes compétitions confondues. Ce total appartient aujourd’hui encore à Manuel Pellegrini, avec 151 réalisations pour ses Cityzens lors de la saison 2013-2014 contre 143 pour les hommes de Guardiola la saison passée, à chaque fois en 57 matchs.
Des équipes dont on reconnaît la touche
En novembre 2015, alors qu’il était entraîneur du Bayern, Pep Guardiola couvrait déjà d’éloges celui qui, le saurait-on plus tard, allait lui chauffer la place sur le banc des Cityzens. "Je suis un gran fan de Pellegrini, assurait alors le Catalan. J’ai beaucoup appris de lui et de ses concepts. On peut regarder une de ses équipes sans savoir qui en est l’entraîneur et on reconnaît immédiatement que c’est une équipe de Pellegrini, juste à leur façon de jouer." L’ancien coach du Barça n’avait pourtant connu que deux fois la défaite (un nul) en onze confrontations avec le Chilien.

Manuel Pellegrini est une référence, même s’il ne figure pas toujours en tête de liste des coachs dont on égraine les noms pour parler de jeu. A tort. Posons d’emblée un fait, dont le pragmatisme plairait sans nul doute à José Mourinho: il a des résultats. Champion d’Angleterre (2014) et double vainqueur de la League Cup (2014 et 2016) avec Manchester City, vainqueur de la Coupe Intertoto avec Villarreal en 2004, champion d’Argentine avec San Lorenzo (2001) puis River Plate (2003), champion d’Equateur avec Quito (1999)… Jolie armoires à trophées, même s’il n’en a ajouté aucun lors de son passage au Real Madrid (2009-2010).
Un faiseur de miracles
West Ham sera donc avant tout allé chercher un homme de résultats. Le club londonien sort d’une saison très difficile, terminée à la 13e place mais qui a vu la zone rouge s’approcher dangereusement. Loin des places européennes, que les Hammers avaient atteintes en 2016 (septième place, synonyme de Ligue Europa). Avec en tête le précédent Villarreal?
Tout juste sauvé la saison précédent l’arrivée du technicien chilien, le club espagnol a terminé sur le podium dès la première saison de Manuel Pellegrini. Et même deuxième avec dix points d’avance sur le Barça en 2008. Deux ans plus tôt, le sous-marin jaune avait atteint le dernier carré de la Ligue des champions, battu par Arsenal (1-0 ; 0-0). Au Real Madrid, pas de titre… malgré le nouveau record de points du club en 2010 avec 96 points (99 points pour le Barça, record du championnat). Son Malaga a atteint la quatrième place de Liga en 2012 et disputé la première C1 de son histoire (avec en prime un quart de finale).
West Ham veut sortir du marasme
Une réputation de faiseur de miracles dans le jeu également : on ne s’ennuie pas avec les équipes de Manuel Pellegrini. Avec sa défense ultra poreuse, son manque de leader et l’absence de joueurs créatifs capables d’endosser la responsabilité du jeu, West Ham pratiquait sans doute l’un des pires footballs de Premier League la saison dernière. Pire défense du championnat à égalité avec Stoke City (68 buts encaissés), sans vrai meneur de jeu depuis le départ avec fracas de Dimitri Payet, les Hammers doivent surtout éteindre une crise profonde et un début de divorce avec les supporters.
En mars dernier, certains fans avaient pété les plombs durant le match contre Burnley (conclu sur un sévère 3-0 en faveur des Clarets). Un homme était venu planter le poteau de corner dans le rond central, d’autres avaient foulé la pelouse et des dizaines de supporters s’étaient rassemblés en bas de la tribune présidentielle, pour hurler leur colère devant des dirigeants apeurés. Question de résultats mais aussi de jeu et de spectacle. Les bulles ne suffisent pas à créer une atmosphère de joie et d’apaisement.
Les fans veulent un "football offensif"
"Les fans de West Ham aiment un football offensif, reconnaissait la semaine passée Manuel Pellegrini en conférence de presse. C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles les propriétaires m’ont fait venir. On ne pense pas à la place à laquelle on finira. Il faut qu’on essaie de jouer match après match, d’améliorer ce que le club a fait la saison dernière. Chaque club en Angleterre a l’argent nécessaire pour faire venir de bons joueurs. Il y a six ou sept clubs très forts. On ne pense pas à la fin de la saison." L’homme de 64 ans a conscience de la portée globale de la mission.
Le technicien chilien partira sur de bonnes bases : pour la troisième année consécutive, les 52 000 abonnements ont été vendus. Et les recrues sont arrivées rapidement, avec de jolis coups à la clé: sept nouveaux joueurs à ce jour (il en voulait au moins quatre ou cinq), dont un Jack Wilshere à la relance après avoir enquillé les blessures à Arsenal ou les recrues-phares du club Andriy Yarmolenko (Dortmund) et Felipe Anderson (Lazio).
Des recrues à la hauteur ?

"Jack, Felipe et Yarmolenko ont les qualités dont nous avons besoin pour jouer un beau football offensif, assure leur coach, qui veut visiblement bâtir en s’appuyant sur eux. Felipe et Yarmolenko pourront prouver que leur réputation n’est pas usurpée. Jack Wilshere est un joueur très important, par son expérience et son talent. Il arrive d’un club qui a l’habitude de jouer la Ligue des champions et de se battre pour le titre. Cela va nous aider à changer la mentalité à West Ham. Auront-ils besoin de temps pour s’adapter? Quand vous amenez autant de joueurs, il vous faut sans doute un peu de temps pour trouver le meilleur onze. Mais du temps, le football ne vous en donne pas." Les supporters ont de toute façon perdu patience.
En 2016, avant son exil chinois, Manuel Pellegrini quittait la Premier League dans une quasi indifférence, les yeux ayant déjà dévié vers son très médiatique successeur, Pep Guardiola. Le prix de l’élégance et de la capacité à s’effacer devant ses joueurs et le jeu. Il revient en Angleterre avec l’assurance d’avoir la main sur l’équipe, les dirigeants lui ayant véritablement confié les clés d’un camion en panne sur l’autoroute.