"Ce n’est toujours pas digéré, mais j’ai fait le choix d’aller mieux", Mélanie De Jesus Dos Santos se confie un an après sa désillusion aux JO de Paris 2024

Elle a retraversé l’Atlantique pour chasser les nuages, sécher ses larmes et panser ses plaies. Jusqu’à reprendre plaisir à voir le soleil se lever chaque matin. Un an après sa désillusion aux Jeux olympiques de Paris 2024, où elle n’a pas franchi le stade des qualifications alors qu’elle espérait décrocher une médaille, Mélanie De Jesus Dos Santos va mieux. Son retour en Martinique, où elle est née le 5 mars 2000, lui a permis de retrouver son cocon familial pour sortir peu à peu du brouillard. "Ça va, je me sens bien. Je pense que je n’ai jamais été aussi bien, en fait", confie la gymnaste française à RMC Sport. "Je suis revenue m’installer en Martinique et je ne me vois pas repartir pour l’instant. Je passe du temps avec ma famille, mes proches et mes amis. Je sais que je n’ai pas un avion à prendre, donc je vis ma meilleure vie en ce moment."
Une vie qu’il a tout de même fallu remplir sans le planning chargé d’une athlète de haut niveau. "Quand je suis arrivée, je n’avais pas l’habitude d’être chez moi longtemps, donc juste passer une journée à la maison, c’était impossible", souffle la championne de 25 ans. "Il fallait toujours que je fasse quelque chose, que j’aille voir un oncle, une tante, que je profite de la plage. Je faisais plein de choses en même temps… Avant, je n’avais jamais vraiment le temps de rester chez moi à ne rien faire, donc j’ai pris six mois à rester chez moi et je n’ai rien fait de spécial. Maintenant, je m’occupe et je sors assez souvent."
"La gym commence à me manquer un peu"
La native de Schoelcher (dans l’ouest de la Martinique), d’origine portugaise par son père, continue également de s’entretenir physiquement. "Je n’ai pas coupé complétement, parce que mon corps est addict au sport", sourit-elle. "Si je ne fais rien, je tourne en rond et je m’ennuie. Moralement et mentalement, il faut s’obliger à faire quelque chose. Donc je m’obligeais à aller à la salle au début. Mais je me suis rendu compte que je n’avais pas envie d’être enfermée. Du coup, je fais du sport dehors, je vais nager ou courir près de la plage."
En parallèle, la quadruple championne d’Europe va se rendre dans des clubs locaux afin de partager son vécu, son expertise et sa vision de l’entraînement. Titulaire d’un BPJEPS (brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport), Mélanie De Jesus Dos Santos réfléchira peut-être dans un second temps à passer ses diplômes d’entraîneur. En attendant, elle participe régulièrement à des réunions ou des tables rondes avec l’envie "d’apporter quelque chose au sport martiniquais".
Malgré ses projets stimulants, l’ancienne pensionnaire du Pôle France de Saint-Etienne (qu’elle a intégré à l’âge de 12 ans) n’a pas refermé la page traumatisante de Paris 2024. Pas totalement, en tout cas. "Ce n’est pas encore derrière moi. Je commence à le digérer, parce que c’est ce que je veux faire. Parfois, on ne fait pas vraiment d’efforts pour que ça aille mieux. Là, j’ai fait le choix d’aller mieux. Mais non, je n’ai pas encore digéré parce que c’est vraiment la contreperformance de ma carrière", explique-t-elle. "Ce n’est toujours pas digéré mais je me laisse vivre quand même maintenant, en me disant qu’il y a pire dans la vie, que je suis en bonne santé et que ma famille va bien. C’est comme ça que j’arrive à sortir un peu la tête de l’eau, on va dire."

"Je fais l’effort d’appeler mon préparateur mental"
Pour parvenir à cet état d'esprit, Mélanie a dû se faire aider dans la foulée de son échec: "Après les Jeux, j’ai été suivie. J’ai vu pas mal de personnes. J’ai fait de l’hypnose, plein de trucs. Je travaille avec mon préparateur mental. Ce n’est pas très régulier, mais je fais l’effort de l’appeler pour caler un rendez-vous quand j’ai besoin de parler, parce que j’ai envie d’aller mieux. C’est un énorme effort pour moi. Avant, je n’aurais jamais fait ça."
Le fait d’être en Martinique l’aide aussi beaucoup à avancer, même si la gymnaste repense parfois avec nostalgie à l’adrénaline des compétitions: "Oui, ça me manque un peu, parce que j’ai toujours adoré ça. Un peu moins sur la fin, vu que je stressais plus qu’au début. C’est normal, parce qu’on se rend moins compte des choses quand on est toute jeune, on pense juste à faire de la gym. Donc ça me manque un peu mais en même temps pas trop, parce que je me mettais tellement la pression... Sur le moment, je ne me rendais pas compte à quel point! Donc au final, ça va, je peux m’en passer encore un petit peu (sourire)."
"Je n’ai pas envie de finir sur ce qui s’est passé à Paris"
Peut-on quand même imaginer Mélanie De Jesus Dos Santos de retour au plus haut niveau dans les années venir? "Oui, c’est quelque chose qui pourrait arriver. Quand? Je ne sais pas… Mais je n’ai pas envie de finir sur ce qui s’est passé aux JO de Paris. J’espère que vous me reverrez sur des compétitions où je m’amuse. Je veux reprendre du plaisir sans tout le stress que j’ai connu ces dernières années."
Avec les Jeux olympiques de Los Angeles 2028 dans coin de la tête? "J’en parle parce que les gens m’en parlent et me posent la question. La réponse que j’ai, c’est: ‘Vous êtes trop loin pour moi’. Après, c’est loin mais en même temps, c’est bientôt. Ça passe vite. Mais je ne me projette pas sur une prochaine olympiade, pour l’instant en tout cas. De toute façon, je ne suis pas quelqu’un qui se projette. J’avance un peu au jour le jour. Après, si je retrouve le plaisir et l’envie, que j’arrive à faire de la gym en Martinique, pourquoi pas. Si je suis à Los Angeles en 2028, c’est que tout s’est bien déroulé, mais je ne mets rien en place aujourd’hui par rapport à ça".