"Il y a une énergie folle": pourquoi les JO de Paris réveillent la créativité des artistes du monde entier

Depuis le début des JO de Paris, les artistes regorgent de créativité dans les stades comme dans les rues de la capitale. - Eric Senmartin - Thomas Tessier - Maïtô @maitegoblet_maito
La cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Paris a tellement bouleversé Thomas Tessier que dès le lendemain, l'illustrateur parisien de 51 ans s'est emparé de son crayon et s'est spontanément mis à dessiner le cavalier d'argent, la vasque olympique et la Tour Eiffel qui ont marqué le spectacle.
Une illustration graphique, aux tons bleus, verts et dorés, inspirée des tableaux du peintre français Robert Delaunay ou encore de l'illustrateur italien Lorenzo Mattotti, selon son créateur.

"J'étais tellement inspiré qu'en deux heures c'était plié", raconte à BFMTV.com cet artiste spécialisé dans la littérature jeunesse, qui a voulu "voir ce qu'il lui restait en tête de ce moment inouï vécu en communion avec des millions de personnes à travers le monde".
L'"impulsion créative" de la cérémonie d'ouverture
"Scotché" par les images de la cérémonie d'ouverture, Thomas Tessier dit avoir souhaité "retranscrire en image le mélange d'émerveillement, de sidération et de poésie" que celle-ci lui a procuré.
Depuis, son affiche au style graphique s'est propagée comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux, pour le plus grand bonheur de son créateur qui ne s'attendait pas du tout à un tel succès. "Beaucoup m'implorent de la commercialiser!", s'étonne-t-il aujourd'hui. Thomas Tessier espère désormais pouvoir faire tirer son affiche en vue d'une éventuelle commercialisation.
Et il est loin d'être le seul à avoir ressorti ses crayons. Depuis le début des Jeux olympiques à Paris, de nombreuses créations artistiques réalisées par des dessinateurs, peintres et autres illustrateurs émergent en ligne. Au lendemain de la cérémonie d'ouverture, Lucas De Roover, étudiant en art à Bruxelles, a notamment réalisé une affiche vintage représentant la prestation de Lady Gaga - relayée et encensée par plusieurs milliers d'internautes sur Twitter.
"J'ai été émerveillé par la mise en scène donc ça m'a donné envie de recréer une affiche à l'ancienne, dans le style typique du cabaret français", explique ce créateur de 24 ans à BFMTV.com.
L'illustrateur Thomas Tessier trouve que la richesse du spectacle de lancement des JO a généré "une vraie impulsion créative". "On a tous pris une claque et c'est aussi ça le propre de l'art: c'est de prendre des contrepieds, de surprendre et en l'occurrence j'ai trouvé qu'il y avait beaucoup de choses de proposées..."
Des créations qui émergent des quatre coins du monde
Cette cérémonie grandiloquente a d'ailleurs suscité une fascination artistique parfois inattendue jusqu'à l'autre bout du monde. En Chine par exemple, un personnage sort du lot: depuis quelques jours, le réseau social Xiaohongshu regorge de dessins et d'illustrations en tout genre reprenant Philippe Katherine à moitié nu, peint en bleu tel le dieu de l'ivresse Dionysos.

"Il a beaucoup amusé et marqué les esprits là-bas car les gens l'associent à un Schtroumpf mignon et dodu", explique à BFMTV.com Esteban Giner, chercheur en sociologie des médias et spécialiste des pratiques en ligne. "Tout un tas d'artistes déclinent son personnage dans des créations à la limite entre l'artistique et l'humoristique. Il a même été réalisé en figurine en pâte à modeler!"

Dans les rues de la capitale, quelques artistes se réjouissent en tout cas de voir naître "une sorte d'effervescence" depuis la cérémonie d'ouverture et le début des épreuves. Bon nombre de croqueurs et dessinateurs semblent d'ailleurs venus de loin pour venir immortaliser des "scènes de vie" ou des "moments sportifs" dans les rues ou les arènes sprotives.

Qu'ils soient débutants, amateurs ou professionnels, certains s'installent sur des banscs ou des murets comme au pied de la Tour Eiffel, d'autres sur les terrasses, près des bouches de métro ou devant l'Hôtel de Ville. "C'est l'évènement d'une vie", "je veux retranscrire l'enthousiasme qu'il y a dans la ville!", expliquent des artistes interrogés par BFMTV.com.
Un effervescense créative dans les rues de Paris
Des spectateurs ont d'ailleurs été photographiés en train d'esquisser ou de peindre des épreuves ces derniers jours, ce qui a suscité les commentaires amusés d'internautes sur les réseaux sociaux. "So french!" (tellement français, NDLR), "Paris est vraiment le paradis des artistes!", pouvait-on lire sous la publication émerveillée d'un touriste américain.
Beach-volley, escrime, natation, hockey sur gazon ou encore rugby... Il faut reconnaître que les artistes sont nombreux à s'adonner à des séances de croquis ou de peinture pendant les épreuves sportives. C'est le cas de dessinateurs professionnels tels que les Françaises Marielle Durand et Marion Rivolier, les Américains Moriah Costa ou Alex Hillkurtz, ou encore l'illustratice japonaise Aya Hoshina.
Ces derniers jours, Marielle Durand se dit "complètement stupéfaite" du regain de créativité qui l'a envahie à Paris depuis vendredi dernier. "Il y a une énergie folle qui me redonne envie de dessiner. Une vitalité incroyable a gagné la ville en quelques jours, et c'est très puissant", s'étonne encore l'artiste, qui vit à Paris depuis de nombreuses années.

Paris, un cadre "esthétiquement unique"
"Je suis totalement dans l'effervescence et je continue à chercher des places pour assister à d'autres épreuves dans les prochains jours", poursuit cette Parisienne de 44 ans. "On vit un moment suspendu, et on a la chance que ça se passe dans une ville esthétiquement unique".

"Saisir la vitesse des athlètes en mouvement, c'est un exercice extrêmement compliqué mais c'est le jeu, c'est là que réside la beauté de la chose", explique l'artiste Marielle Durand, qui a assisté aux qualifications de gymnastique féminine à Bercy ou encore à un match de beach volley sur l'exceptionnel terrain du Champs-de-Mars. Pour elle, "le dessin de vitesse est un bon entraînement qui rejoint presque le sport".
L'exercice est d'autant plus agréable que ces compétitions ont lieu dans des lieux exceptionnels tels que le Grand Palais, le Champs-de-Mars ou les Invalides pour ne citer qu'eux. Des sites visuellement attrayants pour des amoureux des images - qu'ils soient professionnels ou amateurs.
Des artistes en herbe, comme Sylvie Lehoux, comptent d'ailleurs profiter des JO pour capturer Paris sur papier tout au long de l'été. "Une bulle créative" qui enchante cette femme originaire de Villejuif, qui s'adonne chaque jour à l'aquarelle dans ses carnets afin de garder en tête "le mélange des cultures, la joie des visiteurs, l'ambiance des café et des jardins Parisiens" pendant cette parenthèse sportive.
Dimanche dernier, elle a même pu s'entraîner à capturer la gestuelle lors d'une des séances de dessin de modèle vivant - baptisée Croqu'en Sports - organisée sur le thème du sport par la mairie du 13e arrondissement de la capitale dans le cadre des Jeux olympiques.

L'arrivée de la flamme olympique, les concerts organisés ça et là, les rassemblements... Frédérique prend elle-aussi quelques minutes chaque jour pour aller croquer des moments clé des JO. "Ce sont des souvenirs que je vais garder précieusement, et les mettre sur papier me permet d'en apprécier chaque détail", confie cette femme de 56 ans.