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Gymnastique: "On verra la nouvelle Mél", promet De Jésus Dos Santos avant les Internationaux de France

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De retour pour la première fois en France depuis son exil à Houston dans le groupe de Simone Biles au printemps, Mélanie de Jésus dos Santos s’aligne ce week-end aux Internationaux de France à Bercy. La Martiniquaise, coachée par les Français Laurent Landi et Cécile Canqueteau, va se tester aux barres asymétriques et à la poutre. Elle évoque sans fard sa défaillance aux JO 2020 (10e du concours général), où elle a été prise par le stress.  

Mélanie de Jésus dos Santos, vous êtes heureuse de retrouver la France ?

Je suis contente d’être de retour au pays, de retrouver mes coéquipières et de voir tout ce monde. Ça me fait vraiment plaisir. J’ai hâte de débuter la compétition.

Vous êtes attendue. Beaucoup de rêve s’attend à voir ‘la nouvelle Mélanie’ avec son entraînement américain. Ça vous travaille ?

Oui. Depuis les JO, je n’ai participé à aucune compétition. Revenir sur une aussi belle compétition avec autant de monde, c’est un peu stressant. Je pense que c’est du bon stress car j’ai hâte d’être à demain. Ça prouve que j’ai envie de revenir. Ça va bien se passer.

On vous a vu aux entraînements aux barres et à la poutre. Tout s’est bien passé ?

J’ai eu une peu de mal car ça faisait 2 ans que je n’avais pas été sur du matériel de la marque Gymnova (celui employé à Bercy). J’avais un peu du mal. Il y a des petites différences. Par exemple, la poutre rebondit moins. Les barres sont plus dures ou plus molles. J’ai pris mes marques, il y a la lumière, l’ambiance, il fallait vraiment que je me remette dedans.

Sur quel agrès avez-vous le plus d’attente ?

Honnêtement les deux. On va dire que les barres c’est mon agrès fort. La poutre c’est un agrès que j’aime. Je ne peux pas choisir.

Vous avez parlé à Laurent Landi après vos passages. Que vous a-t-il expliqué ?

Il me dit de moins me poser de questions. Il me répète que je "sais faire", de prendre du plaisir. J’y vais et c’est tout.

C’est compliqué de foncer sans trop réfléchir ?

C’est vrai. Il ne faut pas trop se poser de questions. On lève le bras et on y va. Je suis formaté pour ça, j’ai tellement travaillé. C’est plus facile à dire qu’à faire mais c’est ce qu’il faut faire et je le ferai.

Qu’avez-vous appris depuis avril et votre départ à Houston ?

Ça ne fait pas longtemps que je suis aux États-Unis mais j’ai déjà appris énormément de choses. Déjà, l’anglais. Une autre technique de gym aussi. Je m’adapte, j’apprends de nouvelles choses. Je m’adapte à la gym américaine.

Avez-vous peur que les juges en ne voyant pas l’ancienne Mélanie, la championne d’Europe, soit plus durs avec votre nouveau style ?

Je pense que c’est le cas pour tout le monde car le code de pointage a changé. Il faut que ce soit fluide et élégant. Je change complètement mon style. Je vais sur quelque chose de gracieux et élégant. Ce dont je n’avais pas du tout l’habitude. Je pense que je vais me faire saquer au début mais ça va venir.

En montant sur le praticable, est-ce que vous vous projetez dans deux ans ? Bercy sera la salle des JO.

Honnêtement non. Je ne me projette pas autant. Quand je viens dans cette salle je me sens chez moi-même si j’ai du mal à me dire que c’est la salle des JO.

C’était essentiel pour vous de partir ?

J’avais besoin de rencontrer de nouvelles personnes, ré apprendre de nouvelles choses avec des techniques différentes. Repartir de zéro, ça me sera bénéfique pour la suite.

La gym américaine n’a rien à voir ?

La gym à l’américaine c’est vraiment différent. Les Américains adorent la gym. C’est hyper motivant, ça donne envie d’aller à l’entraînement. Je ne suis pas dans le même mood qu’ici. C’est ce qui m’aide à travailler comme ça.

Vous avez mûri en partant ?

C’est quelque chose que j’ai toujours su faire. On m’a appris à me débrouiller seule très jeune. Je suis partie de chez moi à 12 ans. J’ai grandi très vite. Je prends en maturité. Je me sens plus adulte. Je suis aux Etats-Unis toute seule dans un pays que je ne connais pas. Niveau adaptation je suis bien.

Qu’est ce qui vous manque de la France ?
Ça me manque un peu de me sentir chez moi avec des gens qui parlent français. J’aime beaucoup la vie aux Etats-Unis, c’est un style très différent. Je suis très bien là-bas. Ce qui me manque c’est la famille et les filles de l’équipe. A l’entraînement, les Américaines m’ont vite mise à l’aise.

On peut penser que vous allez être la chouchou ce week-end. Le public vous attend.

Je ne le sens pas encore mais je le sais que je suis attendue, grâce aux réseaux. Tant mieux. Ca veut dire que j’ai manqué au public français. C’est cool. Je ne regarde pas vraiment les messages, j’essaye de faire abstraction de tout ça.

On peut dire que c’est une saison particulière même si il y a les Mondiaux à Liverpool ?

C’est une saison de transition où on verra une nouvelle Mél.

Avez-vous retrouvé le plaisir dans la gym ?

Vous avez pu voir que j’ai pu vouloir arrêter à cause des résultats des JO. J’ai pris une pause et je me rends compte que j’aime la gym, j’aime être sur un plateau de compétition. Ça m’avait manqué. Je suis vraiment contente d’être de retour.

Qu’avez-vous fait pendant votre pause post-JO ?
Rien. Absolument rien du tout. J’ai pris le temps de me découvrir en tant que personne normale et pas comme gymnaste.

Quelle analyse faites-vous de votre échec aux JO ?
J’ai eu une préparation compliquée physiquement et mentalement. Arriver aux JO avec un physique réduit et un mental pas très stable c’est compliqué. J’ai réussi à gérer comme j’ai pu. Il n’y avait pas de public c’était très bizarre. J’ai quand même de bons souvenirs. Ce n’est pas ce que j’attendais. On a quand même bien rigolé avec l’équipe et bien travaillé.

La pression était forte ?

On a mis beaucoup d’attente sur moi. Peut-être que je l’ai ressenti plus que les gens le disaient. C’est un stress que je n’avais ressenti. Peut-être que je n’ai pas su le gérer. Généralement j’arrive à gérer le stress mais là j’étais un peu perdu, je n’arrivais pas à gérer.

C’est un point que vous allez travailler pour les JO à Paris ?

Pour Paris ma préparation sera différente. Physiquement je serai mieux (elle touche son front). Mentalement, avec cette pause, je serai bien aussi. Il n’y a pas de raison que ce soit comme à Tokyo. Le fait d’être loin ça sera peut être mieux.

Le problème de la santé mentale chez les sportifs n’est plus tabou depuis que Simone Biles l’a évoqué aux JO ?

On en parle de plus en plus. C’est grâce à Simone et d’autres athlètes qui se sont exprimées à ce sujet. Je ne pense pas que ce soit encore tabou. Je ne suis pas la mieux placée car j’ai du mal à dire ce que je ressens. Je n’oserais pas parler de ça avec Simone mais je pense qu’on peut prendre exemple sur Simone.

Est-ce que la gym universitaire américaine, qui est très en vogue, va influencer ce que vous faites ?

On me connait comme une fille qui danse sur de la musique boom boom. C’est vrai. J’ai changé. Je suis sur quelque chose de plus femme, de plus gracieux, des mouvements différents, des mouvements moins dynamiques. Ca va m’aider car au niveau du souffle c’était compliqué. De plus en plus de gymnastes essayent de se rapprocher de ce qui se fait en universitaire mais avec le nouveau code, ce n’est pas ce que les juges aiment selon moi. J’aimerais bien m’inspirer de la gym universitaire. On est un peu coincé en élite. Il faut rentrer dans une case. C’est un peu fatiguant.

Propos recueillis par Morgan Maury