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Mondiaux de judo: Bouba et Khyar, artistes et déménageurs

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La doublette de champions d’Europe, Daikii Bouba et Walide Khyar, peut réaliser un gros coup ce samedi sur les tatamis de la Laszlo Papp Arena de Budapest dans la catégorie des moins de 66 kilos. Deux garçons qui se connaissent depuis près de 15 ans et qui se retrouvent côte à côte dans ce début d’olympiade, deux judokas flamboyants.

Du titre européen de Walide Khyar en 2016 à Kazan (Russie) et de celui de Daikii Bouba cette année à Podgorica (Monténégro), il reste des émotions similaires. Celles d’avoir assisté à des journées comme tout judoka en rêve et de voir en live un avènement, une naissance. A chaque fois, il s’agissait de leur premier championnat d’Europe. Khyar, 18 ans ce jour-là, avait explosé Orkhan Safarov (Azerbaïdjan) sur un contre et Bouba (29 ans) avait pris dans une feinte de joueurs d’échecs le Russe Murad Chopanov. Le premier est resté un personnage central de l’équipe de France alors que le second ne s’est découvert au plus haut niveau international qu’il y a un peu moins de deux ans.

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"On se connaît depuis longtemps", se souvient Walide Khyar. "On est passé par les même pôles à Strasbourg et Orléans." Fin avril à Podgorica, ils sont montés ensemble sur le podium européen. Bouba sur la plus haute marche et Khyar sur la troisième marche du podium. "J’ai su mettre ma médaille au fond du placard", avoue Bouba avant de s’envoler pour Budapest. "Je suis conquérant comme d’habitude. J’ai envie de faire des choses que je n’ai pas réalisées dans le passé", a expliqué Khyar.

Têtes de série 5 (Bouba) et 8 (Khyar) dans la capitale hongroise, les deux moins de 66 kilos se retrouvent balancés dans un tableau aux allures de jungle comme c’est souvent le cas chez les moins de 66 kilos. En boss de fin, le Japonais Hifumi Abe, double champion olympique en titre et qui n’a pas perdu contre un non-Nippon depuis 2019. Lui et Bouba pourraient s’affronter en quart de finale: "On a mis en place un game plan pour lui", raconte le judoka de l’AJA Paris XX. "Est-ce que ça fonctionnera? On ne sait pas. Ce qui me plaît c’est que je me vois parmi les meilleurs. J’ai une marge de progression et j’ai envie de voir si je suis le plus fort et ça passe par Abe. Il est loin devant les autres. Si je veux gagner je ne vois pas comment je ne pourrais pas avoir à le battre."

"On n'a pas la même approche du combat"

Lors de son premier championnat du monde, Bouba avait battu la tête de série numéro 1 puis s’était incliné face au Finlandais Saha, pris un peu de haut. Une épiphanie qui a changé la mentalité du garçon fan de science-fiction. A Podgorica on a vu la quintessence de son judo, une recherche du ippon après un jeu subtil de feintes souvent conclu sur son létal sasae-tsuri-komi-ashi (technique de jambe) Cinq combats, cinq ippons dans un mélange de finesse et de brutalité. La même journée, Khyar a montré son meilleur visage lors du chemin vers le bronze avec deux victoires de toute beauté face aux Italiens. Brutal puis malin. "Il est droitier et moi je suis gaucher", pose Khyar. "On n’a pas la même approche du combat." Bouba précise: "Walide met une vraie pression sur l’agressivité, la rapidité au kumi-kata (la garde). Quand il emmène les adversaires dans un combat qui dure ils font plus facilement des erreurs. Je suis la version calme. Je pousse les gens à faire des erreurs. Moi c’est plus sur des petites réactions et sur une pression moins agressive, plus en stabilité."

Le judoka du PSG est un véritable adepte du corps-à-corps d’où il peut lancer ura-nage de face (contre). Bouba n’est pas mal à l’aise à cette distance non plus. Il choisit quand même d’être un tout petit peu plus loin ce qui lui permet d’avoir l’espace suffisant pour arriver à vitesse maximale dans les jambes de son opposant. Ils peuvent très bien s’incruster ensemble sur la boîte à la fin de leur journée. Ce serait une sacrée performance. La dernière fois que deux Français sont montés ensemble sur un podium mondial masculin c’était en 2013 chez les moins de 81 kilos. Loïc Piétri avait été sacré et Alain Schmitt avait terminé troisième. Déjà médaillé planétaire en 2023 (bronze), Khyar avait frôlé une finale planétaire dans cette même salle de Budapest en 2021. Annoncé victorieux par l’arbitre puis perdant sur la séquence suivante, il en a tiré un enseignement: "Sur une journée tout est possible. Il faut faire tomber, ne rien calculer. Même si les combats pouvaient durer longtemps ça allait tourner dans mon sens. Il y a souvent eu des grosses surprises les années post-olympiques. J’espère être cette grosse surprise." Khyar-Bouba, la doublette qui peut faire des étincelles.

Morgan Maury, à Budapest (Hongrie)