Atonio, le « phénomène » qui raffole des entrecôtes

XV de France : Uini Atonio - AFP
- Uini, un « mutant » très habile
Il a 24 ans, mesure 1m96 et pèse 145 kg… hors taxe. Uini Atonio est un colosse né en Nouvelle-Zélande, d’une maman samoane et d’un papa néo-zélandais, qui joue au poste de pilier droit pour La Rochelle et peut-être bientôt pour l’équipe de France puisqu’il fait partie du groupe pour la tournée d’automne. « Il est grand, athlétique, mais il a la dextérité d’un trois-quarts centre, explique son coéquipier rochelais Julien Audy. Il est très habile. C’est un phénomène. Je pense qu’il y a même des trois-quarts chez nous qui sont envieux de sa dextérité. Les Néo-Zélandais, on sait tous qu’ils ont une facilité pour manier le ballon. » Une force et une habileté également très utiles en dehors des terrains, par exemple quand il s’agit de déménager un jacuzzi de 350 kg chez l’un de ses amis !
- Son arrivée en France
Uini Atonio a été repéré par Patrice Collazo, l’entraîneur et responsable du recrutement de La Rochelle, lors d’un tournoi de rugby à dix à Hong-Kong en 2010. Il a débarqué en France le 14 juillet 2011 à l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle, à 20 ans, sans connaître le moindre mot de français et avec pour seuls bagages son billet de train pour La Rochelle et… 15 dollars néo-zélandais. Légèrement dépaysé, Uini Atonio a mis huit heures pour trouver son chemin et arriver en Charente-Maritime, où il s’est très bien intégré. « Il a eu tout de suite l’investissement nécessaire pour apprendre le français et pouvoir communiquer rapidement avec nous, confie Julien Audy. On le considère vraiment comme un Français. Il parle très bien, il fait des blagues qu’un Français pourrait faire. Il a toujours la banane quand il arrive à l’entraînement. C’est un pur bonheur d’être avec lui au quotidien. »
- Supervisé par le staff des Bleus… en Pro D2
Proche de Yannick Bru et Philippe Saint-André, qu’il a respectivement connus à Toulouse et à Gloucester, Patrice Collazo a vu le premier cité venir superviser son colosse en décembre 2013 lors de Lyon-La Rochelle. C’était alors la première fois que le staff actuel des Bleus se penchait sur le cas d’un joueur évoluant en Pro D2. Le potentiel est trop prometteur pour être ignoré au prétexte qu’Atonio n’appartient pas (encore) à l’élite du rugby français, un Top 14 qu’il découvre depuis cet été. « Sa marge de progression est importante, souligne Collazo. Il doit tourner à 60-70% de ce qu’il peut faire. Il est encore très jeune. Beaucoup de personnes oublient qu’il n’a que trois ans de rugby pro. Laissons-lui encore le temps. Je suis convaincu qu’il se bonifiera. »
- Les Bleus, c’était d’abord une blague
Quand il rejoint La Rochelle, Uini Atonio commence par faire sourire les locaux… « Un journaliste m’avait demandé mon objectif, explique-t-il. J’ai répondu en blaguant, je ne sais pas pourquoi, que je voulais jouer pour l’équipe de France dans deux ans. Les journalistes ont tous rigolé ! » La perspective d’intégrer les Bleus est finalement devenue réalité. « Moi, je ne suis pas venu en France pour jouer avec l’équipe de France à la base, reconnait-il. C’était pour aider ma famille, pour gagner un peu d’argent. Mais jouer pour l’équipe de France, c’est une chance, vraiment. » Et le rugby français, le colosse en est désormais fan : « C’est monstrueux ! Quand j’étais petit, c’était soit les All Blacks, soit les Samoa. En France, c’est différent, il y a le ‘‘french flair’’ partout. C’est énorme. »
- La Marseillaise dans son casque
Appelé en septembre pour un stage à Marcoussis, Uini Atonio a dû rapidement se mettre dans la peau d’un international français : « Je me disais : ‘‘Oh là là, on va me demander si je connais la Marseillaise’’. J’ai pris mon casque, je suis allé sur YouTube et j’ai essayé d’apprendre au moins les deux premières lignes. En fait, je connais presque tout ! Mais c’était dur. (Rires) » Pas question de le prouver aux journalistes. Le pilier rochelais réserve ses cordes vocales pour le public du Vélodrome ou du Stade de France.
- La mêlée, son point faible
C’est un comble pour un pilier mais la principale difficulté d’Atonio concerne les mêlées, un secteur très particulier en France, qu’il raconte lui-même : « Le premier truc que Patrice (Collazo) m’a dit, c’était : ‘‘Il faut que tu arrives à faire une mêlée.’’ Je lui ai répondu : ‘‘Tu penses qu’il n’y a pas de mêlée en Nouvelle-Zélande ?’’Il m’a dit de faire attention. Et pour mon premier match ici (à La Rochelle) contre Bourgoin, j’ai fait les mêlées et je peux le dire, j’ai fini au moins deux ou trois fois derrière la ligne ! Donc il y a eu changement… Après ça, j’ai dit : ‘‘OK, il faut que je bosse un peu plus.’’ »
- Uini le tatoué
Atonio, Uini de son prénom (prononcez « Oui-Ni »), a plusieurs tatouages sur le corps, dont un de… Winnie l’ourson ! Même s’il est un peu moins sage… Le pilier de La Rochelle a aussi deux grandes lettres, dans le haut du dos : HB. « Ça veut dire Hati brothers, explique-t-il. On était un groupe de cinq-six en Nouvelle-Zélande. Il y avait notamment Augustine Pulu, qui joue pour les Chiefs et les Blacks. » Un ami qu’il recroisera peut-être l’année prochaine, lors de la Coupe du monde…
- La cuisine française, son péché mignon
Philippe Saint-André et ses adjoints ont demandé à Atonio que la balance affiche 145 kg quand il monte dessus. Un objectif difficile à tenir pour un amoureux de la cuisine française. « On a essayé tous les régimes du monde et à chaque fois, je craque… Mais là, après le premier stage, ça donne un peu plus d’envie, assure le Rochelais. J’arrive à perdre un peu. J’aime bien la cuisine française, les tartares, les entrecôtes bleues. Ça, c’est monstrueux ! Tu ne peux pas manger ça n’importe où. Il n’y a qu’en France ! »